IV - ESPAGNE ET PORTUGAL

7. L’ÂGE DES CONQUISTADORS (XVe-XVIe s.)

Les deux caravelles et la nef de Christophe Colomb dans « 1492 » de Ridley Scott (1992).

7.2. Les découvertes de Christophe Colomb

Cristóbal Colón en Espagne, Cristoforo Colombo en Italie, Cristóvão Colombo au Portugal (né à Gênes en 1451, mort à Valladolid en 1506) découvre le 12 octobre 1492- sans s’en rendre compte - le Nouveau Monde, terre qui sera baptisée 15 ans plus tard « Amérique » (en honneur de son compatriote-explorateur florentin Amerigo Vespucci).
Né dans une famille pauvre, marchand au service des grandes familles gênoises, autodidacte complet, Christophe Colomb rejoint en 1476 son frère Bartolomeo qui est cartographe à Lisbonne, puis épouse trois ans plus tard Filipa Moniz Perestrelo, de petite noblesse portugaise ; elle meurt peu de temps après la naissance de leur fils Diego Colomb, vers 1480. (Son second fils, Hernando/Fernand, naîtra en 1488 d’une liaison avec Beatriz Enriquez de Arana, une femme d’origine modeste que Colomb, devenu célèbre, « oublia » d’épouser.) Sachant, comme la majorité de ses contemporains, que la Terre est ronde, il envisage d’atteindre la Chine et le Japon décrits par Marco Polo en naviguant en direction de l’ouest. Le roi du Portugal João II ayant rejeté son projet sans appel, il tente sa chance à Cordoue auprès de la reine Isabelle la Catholique, où il essuie divers échecs en 1486, 1490 et 1491, par excès d’ambition, mais aussi en raison du préavis négatif du concile de l’université de Salamanque qui conteste (à raison) les calculs de Colomb sur la circonférence terrestre. L’année suivante, alors que tombe la Cordoue musulmane, Isabelle approuve son projet après avoir mis en balance les retombées économiques potentielles du voyage comparées à la modeste mise de fonds initiale. Colomb obtient d’être vice-roi et gouverneur général de toutes les terres qu’il découvrira, un dixième des richesses qu’il en retirera, un huitième du profit de son expédition, le titre d’« Amiral de la mer océane » ainsi qu’un titre de noblesse héréditaire.
Chargé par la reine d’atteindre l’Asie orientale (« les Indes ») en traversant l’océan Atlantique avec une flotte de trois navires - deux caravelles, la « Pinta » et la « Niña », et la nef (caraque) « Santa María » - dont il a été nommé amiral, il accoste après un peu plus d’un mois de navigation depuis les îles Canaries sur une île de l’archipel des Bahamas, Guanahani, à laquelle il donne le nom du Christ, San Salvador. Persuadé qu’il se trouve « aux Indes », il donne aux habitants de ces régions le nom d’« Indiens » ; il ne comprendra jamais qu’il a atteint une tout autre terre. Ses navires accostent à Cuba, puis à Saint-Domingue (Haïti) ; la Santa María coule à Cap-Haïtien et, pressé par son équipage, Colomb regagne l’Europe à bord de la Niña en février 1493 où il est reçu comme un héros. Il a laissé 39 hommes à terre dans les Bahamas, chargés d’établir le fort de la Navidad. En septembre, il repart de Cadix à la tête d’une expédition beaucoup plus ambitieuse, avec 17 navires, des chevaux, du bétail et 1500 hommes, dont 700 colons et 12 missionnaires, son objectif étant de fonder une colonie à Haïti (baptisée Hispañola), première colonie espagnole du Nouveau Monde, gouvernée par ses deux frères, Bartolomeo et Giacomo. Il découvre le fortin de la Navidad en cendres et ses occupants blancs massacrés par une tribu voisine ; les Indiens Taïnos, que Colomb a toujours respecté, fournissent des explications qui ne convainquent pas ses lieutenants. Il envisage de faire des esclaves de ces peuples « doux, pacifiques et très simples », mais la reine s’y oppose. Les Espagnols n’en tiennent pas compte, les indigènes fuient ou se révoltent, Colomb « pacifie » la population avec toute la férocité de son temps. En avril 1496, il retourne en Espagne avec 550 Arawaks, dont la moitié meurent durant la traversée ; les survivants sont vendus comme esclaves. Furieux, les Rois Catholiques, qui considèrent ces « Indiens » comme leurs sujets, les font libérer. Ainsi débute la disgrâce de Colomb auprès de la Couronne. En 1498, il repart à la tête de six vaisseaux. Faisant escale aux Canaries, il débarque sur la côte de l’actuel Venezuela, devant l’embouchure de l’Orénoque, mais sans pénétrer sur terre ferme, puis retourne à Hispañola-Haïti où les colons espagnols s’entredéchirent. Après avoir établi sept colonies, Colomb décrète que tout Indien de plus de quatorze ans doit fournir une certaine quantité d’or tous les trois mois. Ceux qui n’y parviennent pas ont les mains coupées. Il institue par la suite l’esclavage, avec recours à la torture.
Quand, en août 1500, Francisco de Bobadilla, émissaire royal, débarque sur l’île, il fait jeter les trois frères Colomb au cachot, ayant découvert sept Espagnols pendus aux potences à Saint-Domingue. Fin octobre 1500, enchaîné dans la cale, Christophe Colomb débarque à Cadix, humilié et accusé. Sa captivité est due au désaccord des Rois catholiques avec les mauvais traitements – tortures et mises en esclavage – que les troupes espagnoles sous son commandement ont infligés aux indigènes, notamment à Haïti, et ceci dès le deuxième voyage. Les souverains le libèrent après six semaines mais personne n’écoute ses revendications ; Nicolás de Ovando est nommé gouverneur à sa place, il ne lui reste désormais que son titre, à présent honorifique, de vice-roi. En mars 1502, il repart une quatrième et dernière fois en expédition, avec l’intention cette fois d’atteindre les riches royaumes des Indes, toujours persuadé que Cuba est une province chinoise. Accompagné de son frère Bartolomeo et de son fils Hernando (13 ans), il atteint la Martinique avec ses quatre caravelles, puis explore les côtes de Honduras, Nicaragua, Costa Rica et du Panama qu’il continue à prendre pour l’Extrême-Orient. Il manque de peu de mourir de la malaria en Jamaïque où sa flotte, qui fait eau de toute part, échoue et où il survit avec son équipage pendant six mois, approvisionné par les indigènes. Les survivants regagnent l’Espagne en septembre 1504. Physiquement très diminué, l’amiral Colomb s’établit à Séville, cherchant vainement à faire reconnaître les droits et richesses qui lui reviennent d’après ses contrats. Il décède à Valladolid deux ans plus tard, en homme fortuné mais amer et humilié, entouré de ses fils (auxquels il lègue par testament un patrimoine considérable) et de son frère. Il n’aura pas la satisfaction de voir son fils Diego nommé gouverneur d’Hispañola par le roi Ferdinand en 1508. Six ans après le décès de l’explorateur, en 1512, la monarchie espagnole promulgue les lois de Burgos afin de protéger les autochtones, mais ces lois resteront sans effet, la distance empêchant tout contrôle de leur mise en œuvre.
En 1845, l’avocat et américaniste Antoine Roselly de Lorgues, fervent catholique, cherche dans son livre La Croix dans les deux mondes à faire reconnaître dans le voyage de Colomb une entreprise directement inspirée par Dieu et à rattacher la figure du navigateur à l’Église catholique. Il est suivi dans sa démarche en 1866 par le cardinal Donnet, archevêque de Bordeaux, qui écrit au pape Pie IX pour obtenir la béatification du navigateur en raison de son « apostolat » d’outre-mer. En 1877, le Vatican envisagera brièvement la béatification de Colomb, « héros du catholicisme », mais l’initiative échouera à cause de la liaison illégitime du navigateur avec Beatriz de Arana. En Espagne sous la dictature de Franco dès 1940, le national-catholicisme du régime adoptera une optique apologétique similaire.
1904Christophe Colomb (FR) de Vincent Lorant-Heilbronn
Pathé Frères S.A. (Paris), no. 1053, 265 m./12 min. - av. Vincent Denizot (Christophe Colomb). – Huit tableaux tournés aux studios Pathé de Vincennes par le peintre-afficheur-décorateur et réalisateur d’origine belge Heilbronn, assisté de Lucien Nonguet. Les titres sont éloquents : 1. « Révolte en mer » - 2. « Débarquement en Amérique » - 3. « Réjouissances indiennes (ballet) » - 4. « Entrée triomphale à Barcelone » - 5. « Réception à la cour d’Espagne » - 6. « Disgrâce de Christophe Colomb » - 7. « Christophe Colomb en prison » - 8. « À la gloire de Colomb – Apothéose ». Lorant-Heilbronn s’inspire notamment de la peinture pompière du XIXe siècle, en particulier des tableaux Primer desembarco de Cristóbal Colón en América de Dióscoro Puebla Tolín (1862) et Colón ante los Reyes Católicos a su regreso de América d’Andrés Crua (1804), tous deux conservés au Prado, et Presentación de Cristóbal Colón a los Reyes Católicos en Barcelona de Ricardo Ankerman y Riera (1892). On renonce aux années avant 1492 et se garde bien d’expliquer la disgrâce et le remplacement du navigateur-gouverneur en 1500. L’apothéose finale sous forme d’exaltation de Colomb avec l’étendard de la Couronne espagnole a lieu devant un groupe de « sauvages païens » grimés en Sioux ou en Cheyennes. Vision de l’avenir ?
Colomb est reçu en héros à la cour royale après sa première traversée (« The Coming of Columbus », 1912).
1912The Coming of Columbus / Christopher Columbus (US) d’Otis Turner
William N. Selig/Selig Polyscope Company (Chicago), 3 bob./40 min. - av. Charles Clary (Christophe Colomb), Kathlyn Williams (Isabelle de Castille), Marshall Stedman, Hobart Bosworth, Tom Santschi, Bessie Eyton, Herbert Rawlinson.
Au cours de la commémoration des 400 ans de la traversée de l’Atlantique en 1892, véritable apothéose de Christophe Colomb en Occident, et en particulier dans le monde hispanico-italo-américain, le président des États-Unis Benjamin Harrison a proclamé le 12 octobre fête nationale sous le nom de « Columbus Day » ; en Espagne, cette même date devient « Día de la Hispanidad (Jour de l’Hispanité) » et en Amérique latine « Día de la Raza (Jour de la Race [blanche]) ». Une année plus tard, à l’occasion de l’Exposition universelle (« World’s Columbian Exposition ») de Chicago en mai-octobre 1893, le gouvernement espagnol sous la régence de Marie-Christine d’Autriche offre aux États-Unis une réplique de la Santa María ; de son côté, la marine américaine finance la construction des deux autres caravelles, de sorte que les trois navires traversent l’océan ensemble, en suivant plus ou moins la route de l’explorateur. Arrivés à la hauteur du fleuve Saint-Laurent, ils parcourent les Grands Lacs jusqu’à Chicago où ils jettent l’ancre et deviennent une attraction touristique au Jackson Park Lagoon. Quinze ans plus tard, flairant une occasion unique, le producteur William Selig investit 50’000 $ pour faire réparer, voiler et repeindre les trois répliques en vue d’un film, opération largement couverte par la presse. The Coming of Columbus est réalisé en été 1911 sur les rives du lac de Michigan et dans les studios Selig de Chicago avec 350 figurants (dont 120 marins). Le récit débute avec l’arrivée de Colomb et de son fils Diego en Espagne, mais on ne perd pas un mot sur les femmes et la descendance du navigateur. Pas un mot non plus sur le fait qu’il s’est trompé de destination, ni sur le sort des Indiens. Coloré à la main, le film remporte un succès dans toute l’Europe, en particulier en Grande-Bretagne et en Autriche, et contribue à améliorer la réputation du cinématographe dans la bourgeoisie et les milieux scolaires. Une copie est offerte au pape Pie X (qui avait interdit les salles de cinéma au clergé romain) afin de lui prouver la valeur éducative du 7e art.
1912/13[Un complot aux fêtes de Christophe Colomb (FR/US) Thanhouser Co.-Pathé no. 5377, 310 m. – Probablement un reportage ou une reconstitution de l’assassinat du maire de Chicago, Carter H. Harrison, Sr., deux jours avant la fin de l’Exposition Universelle de 1912 (cf. film supra).]
La reine Isabelle de Castille (Léontine Massart) autorise Colomb à partir (1917).
1916/17Christophe Colomb / La Vie de Christophe Colomb et sa découverte de l'Amérique / La vida de Cristobál Colón y su descubrimiento de América (FR/ES) de Gérard Bourgeois et René Navarre
Charles Jean Drossner, José Carreras/Films Cinématographiques-Argos Film Madrid-Hispana Film, 2400 m. (2 parties) / 100 min. - av. George Wague (Christophe Colomb), Léontine Massart (Isabelle de Castille), Marcel Verdier (Fernando II d'Aragon), Jean Garat (Bartolomeo Colomb), Mme Lauriane (Beatriz Enriquez de Arana), Donelly (Frère Juan Pérez), Nadette Darson (Felipa de Perestrello), Tressols (le ministre Don Juan Rodríguez de Fonseca), Bader (Don Diego Méndez), E. López (Don Juan de Soria), Ledanois.
Français et Espagnols s’unissent pour produire ce premier long métrage à la gloire du « découvreur des Amériques », interprété presque exclusivement par des Français mais tourné en Espagne neutre, loin des tranchées de la guerre (région de Tarragone, l’Alcazar à Séville, l’Alhambra à Grenade, le Palais de Lloctinent et en studio à Barcelone). Colomb est interprété par Georges Wague, un mime parisien renommé et ami intime de Colette. L’apport hispanique est déterminant quant à l’orientation assez conventionnelle de l’imagerie, célébrant des exploits « sublimes », « glorieux » et « immortels » pour lesquels Colomb, en proie à des « émotions mystiques », puis abandonné par tous, ne récolte qu’ingratitude. Les erreurs du navigateur sont attribuées à son équipage ou à ses capitaines ; le roi Fernando II est présenté comme un monarque envieux et avide tandis que la reine Isabelle, jouée par la vedette franco-belge Léontine Massart, a les contours d’une sainte (le tableau Reposición de Colón de Francisco Jover y Casanova, en 1881, sert de référence picturale). La fausseté de ces clichés romantiques forgés au XIXe siècle n’est plus à démontrer (le navigateur eut de puissants supporters jusqu’à la fin de ses jours). On a droit au « messager de l’œuvre divine qui prend possession des îles au nom du roi de Castille » tandis que les indigènes accueillent infanterie et cavalerie [sic] chrétiennes avec palmes et cris de joie...
Le cinéma espagnol en est encore à ses balbutiements, et diverses personnalités d’avenir participent à l’élaboration du projet, dont Juan Palau Vera au scénario, Salvador Alarma à la direction artistique, Édouard Renault et José María Presque à la caméra, enfin Ramón de Baños de Barcelone pour certains effets visuels alors très remarqués. Trois caravelles en modèles réduits pour les plans larges sont prêtées par le Ministère de la Marine à Madrid, et près de 5000 figurants animent les tableaux à grande mise en scène. L’ensemble coûte plus d’un million de pesetas, soit 800'000 francs d’époque, une fortune engloutie en partie pour la construction des navires. Comme il faut un professionnel expérimenté pour diriger pareille entreprise, le Suisse Gérard Bourgeois prend les commandes. Au début de la guerre en 1914, le réalisateur s’engagea comme volontaire étranger au sein de l’armée française, où il se lia d’amitié avec son compatriote Blaise Cendrars, mais il fut évacué huit jours après son arrivée au front pour cause de maladie et retourna travailler pour le cinéma, ayant déjà réalisé quelque 130 films depuis 1908 chez Lux, Pathé et Éclair, dont plusieurs feuilletons. Son titre de gloire : Les Victimes de l’alcool (1911) d’après L’Assommoir de Zola ; en outre, il passe pour avoir imposé les premiers longs métrages en Europe, ce qui tombe à pic. Dans son œuvre, Christophe Colomb constitue toutefois une parenthèse qui malgré les efforts de reconstitution, se traduit par un insuccès en salle. Son film ne fait pas assez confiance aux images, repose pour l’essentiel sur de longs intertitres et se contente d’une suite de tableaux statiques inspirés, comme déjà en 1904, par la peinture pompière du siècle passé, et dans lesquels gesticule la figuration. On reconnaît en particulier la toile Cristóbal Colón en el convento de la Rábida (1856) d’Eduardo Cano de la Peña lorsque le navigateur réunit tous les moines pour leur expliquer ses projets. Pour l’Espagne, il s’agit cependant d’une des deux plus marquantes productions du muet, avec le Don Juan Tenorio de Ricardo de Baños en 1922. C’est, aux yeux des spectateurs ibériques, l’ébauche d’un cinéma d’unité nationale paléo-franquiste, au moment où le pays est en proie aux revendications d’autonomie en Catalogne, à la grève générale et au manifeste des juntes militaires qui préparent la future guerre civile.
Exploité en France (27.6.1919 à Paris) en 2 époques : 1. « La Vie de Christophe Colomb » - 2. « La Découverte de l’Amérique ». Présenté en Espagne (17.5.1917 à Barcelone, 12.10.1917 à Madrid) en 6 parties : 1. « ¡ La aurora de la obra sublime ! » - 2. « La inspiración de una reina » - 3. « Hacia lo desconocido » - 4. « La obra brilla immortal » - 5. « El apogeo de la gloria » - 6. « La triste recompensa ».
1922/23Christoph Columbus (Die Entdeckung Amerikas) (DE) de Márton Garas
Max Margulies/Film-Handel Gmbh (Berlin), 6 actes/2478 m./109 min. - av. Albert Bassermann (Christophe Colomb), Elsa Bassermann (Filipa Moniz Perestrelo, son épouse), Franz Szechy (Diego Colomb, leur fils), Emerich Pethes (Fernando II d'Aragon), Tamara Duvan (Isabelle de Castille), Ernst Stahl-Nachbaur (Don Luis de la Cerda, duc de Medina-Celi), Carola Toelle (sa fille Maria de Medina-Celi), Ludwig Rethey (Frère Juan Pérez, prieur de La Rábida), Arpád Odry. – La première traversée de Colomb, précédée d’épisodes fictifs au Portugal, dont les amours de l’explorateur et l’influence déterminante de son beau-père Bartolomeo Perestrelo, gouverneur de Madère à Porto Santo. On apprend ainsi que Mme Colomb est toujours en vie quand il entreprend ses démarches auprès des Rois Catholiques, ce qui est faux (elle mourut à Rome en 1485). Dernière mise en scène du pionnier du cinéma hongrois Márton Garas (42 films à son actif) qui, malgré la caution prestigieuse d’Albert Bassermann - vedette de Max Reinhardt et d’Ernst Lubitsch -, de son épouse Elsa et d’Ernst Stahl-Nachbaur ainsi que sa femme Carola Toelle, ne remporte aucun succès. Tournage à Travemünde (Schleswig-Holstein), au bord de la mer Baltique. (Film perdu.) – AT : Jenseits des Ozeans.
1923Columbus (US) d’Edwin L. Hollywood [et Carlisle Ellis]
Robert Glasgow, Arthur Edwin Krows, George Parmly Day/Chronicles of America Picture Corporation (Yale University Press)-Pathé Exchange, 5 bob. - av. Fred Eric (Christophe Colomb), Paul McAllister (João II de Portugal), Dolores Cassinelli (Isabelle de Castille), Robert Gaillard (Fernando II d'Aragon), Leslie Stowe (Frère Juan Pérez, prieur de La Rábida), Howard Truesdale (l’évêque de Ceuta). – Film à caractère didactique de la série « Chronicles of America », une reconstitution scrupuleuse de la première traversée, supervisée par des historiens de l’université de Yale et qui réutilise une des caravelles parquées au Jackson Park Lagoon sur le lac de Michigan (cf. film de 1912). Les autres scènes sont tournées en été 1922 avec des acteurs issus du théâtre dans l’État de New York, à Mount Kisco (pour le palais royal de Portugal), à Huntington (le monastère de La Rábida), à Montauk et dans les studios de la Vitagraph à Flatbush. Le récit s’inspire du roman The Spanish Conquerors ; a Chronicle of the Dawn of Empire Overseas d’Irving Berdine Richman (1919). C’est le dernier long métrage de nationalité américaine sur Colomb, un sujet qui n’intéressera plus la majorité WASP aux États-Unis et que Hollywood évitera.
1923[Animation: Columbus Discovers a New Whirl (US) de Frank A. Nankievel (F. Nankerville), Lee-Bradford Corporation.]
1923/24[épisode historique :] Neuland oder Das glückhaft Schiff – 1. Teil. Das glückhaft Schiff « Santa Maria » - 2. Teil. Columbus (DE) de Hans Behrendt
Otto Gebühr/Otto Gebühr-Film GmbH (Berlin), 6 actes/2030 m. - av. Otto Gebühr (Christophe Colomb/Henri Swald), Reinhold Schünzel (un mutiné/Hein), Georg John (un marin), Aud Egede Nissen, Josef Dischner, Willy Grunwald, Max Gülstorff.
La traversée de l'Atlantique avec le navire de Colomb et le « Columbus », un transatlantique du XXe s. qui voyage de Bremerhaven à New-York pour la compagnie Norddeutsche Lloyd (avril 1924). Le récit mêle les exploits de la nef Santa María sous les ordres de Christophe Colomb avec des épisodes mélodramatiques du XXe siècle et des images documentaires à bord du bateau à vapeur du vieux capitaine Henri Swald qui serait, à en croire la chronique familiale, un lointain descendant de Colomb. Tourné d’août 1923 à avril 1924 à Brême et à Hambourg. L’acteur-producteur Otto Gebühr est surtout connu comme interprète emblématique du roi Frédéric le Grand dans une quinzaine de films allemands entre 1919 et 1942.
1924Columbus and Isabella (US) de Bryan Foy
Universal Pictures, série « Hysterical Historical Comedies » no. 2, 1 bob. - av. William Franey (Christophe Colomb), Ethel Teare (Isabelle de Castille). – Court métrage parodique qui brode sur la relation privilégiée de Colomb avec la reine.
1933The Double-Crossing of Columbus (US) de Joseph Henabery
Série « Broadway Brevities », Samuel Sax/Warner Bros.-Vitaphone, 19 min. – av. Charles Judels (Christophe Colomb), Leona Maricle (Isabelle de Castille), Jackie Kelk, Lilian Dawson, Frank McNellis, Jack North, The Rollickers, Miss Vanessi & The Maxellos, The Vitaphone Beauty Chorus. – Arrêté pour mendicité, Charlie comparait devant le juge où il se compare à Christophe Colomb malmené par la Couronne d’Espagne et évoque en mode comique la découverte du Nouveau Monde. Comédie chantée et dansée tournée aux studios Vitaphone à Brooklyn.
1934® Are We Civilized ? (US) d’Edwin Carewe. – av. Bert Lindley (Christophe Colomb).
1934[Animation : Chris Columbus, Jr. (US) de Walter Lantz, Universal, 9 min. (Oswald le lapin).]
1937[Projet inabouti : Cristoforo Colombo (IT) de Carmine Gallone. Annoncé, puis bloqué par la mise en chantier du superpéplum Scipione l’Africano, projet mussolinien prioritaire confié d’office à Gallone. Ce dernier prévoyait son projet comme première production de sa future société S.A.I Grandi Film Storici, créée en 1938.]
1938[Animation : Chris Columbo (US) d’Eddie Donnelly, Fox, 7 min. (Terry Toon).]
1938/39[Projet inabouti : Christophe Colomb (FR/ES) d’Abel Gance ; Columbus Production (Paris)-Imperio Film (San Sebastian). – av. Victor Francen (Christophe Colomb), Guillaume de Saxe (Fernando II d'Aragon), Robert Le Vigan (Martin Alonso Pinsón), Conchita Montenegro (Isabelle de Castille), Pierre Stephen, Rosa Negueiro, Mary-Lou. – Cantonné depuis son Napoléon (1927) dans la célébration extatique des « grands hommes » à l’écran et considérant le cinéma comme une « machine à ressusciter les héros », Abel Gance, novateur lyrique et naïf, rêve d’un méga-film sur Jésus après avoir illustré Un grand amour de Beethoven en 1936. À l’aube de la guerre, il annonce un *Christophe Colomb à tourner en Espagne, entre Louise (1938) et Paradis perdu (1939) dans sa filmographie, premier chapitre d’une « geste latine » en 3 parties comprenant aussi le Cid Campeador et Ignace de Loyola, une « grandiose trilogie à la gloire de l’Espagne éternelle ». Les autorisations du gouvernement de Franco obtenues, le début du tournage est fixé au 12 juin 1939 à Grenade, en Technicolor. Le scénario et les dialogues sont confiés à Steve Passeur. La mésentente entre producteurs et la guerre coulent le projet. Mais Gance n’abandonne pas : en septembre 1942, il entreprend des pourparlers avec la CIFESA à Valence, puis réessaye avec Madrid en juin 1945, en juin 1946 avec Arthur Rank à Londres, enfin en 1966/67 avec l’ORTF, Curd Jürgens ayant accepté d’interpréter le navigateur dans une télésérie française de Gance en 13 épisodes de 60 minutes. Les troubles de 1968 mettent fin à ce long rêve.]
1939[Animation : Kristopher Kolumbus Jr. (US) de Robert Clampett, Leon Schlesinger Studios/Warner Bros., 7 min. (Looney Tunes: Porky Pie).]
1940[Documentaire : Al borde del gran viaje (ES) d’Antonio Román ; Producción Asociada Cinematográfica Española, S.L. (PACE), court métrage : utilisation de la caravelle ancrée à Huelva depuis l’Exposition ibéroaméricaine de 1929 et les fresques de Daniel Vázquez Díaz (1928-30) au monastère de La Rábida pour décrire les conditions à bord de la Santa María pendant la traversée de 1492.]
Le cinéma mexicain glorifie à son tour le découvreur inconscient du Nouveau Monde (1943).
1943Cristobál Colón o La grandeza de América (MX) de José Díaz Morales
Francisco Hormaechea de la Sota/Columbus Films (Ciudad de México)-Producciones Hormaechea, 135 min. - av. Julio Villarreal (Christophe Colomb), Consuelo Frank (Isabelle de Castille), José Baviera (Fernando II d'Aragon), Lina Montes (Beatriz Enríquez de Arana), Carlos López Moctezuma (Francisco de Bobadilla), Andrés Novo (Frère Juan Pérez), Manuel Arvide (le cardinal Pedro Gonzales de Mendoza), Alejandro Cobo (Pedro), Gloria Jordan (la fille de taverne), Jésus Valero (Luis de Santángel, secrétaire de la reine), Rafael María De Labra (Martín Alonso Pinzón), Roberto Cañedo, Gerardo del Castillo, Edmundo Espino, Adolfo Ballano Bueno, Freddy Fernandez, José Ortíz de Zárate, Angel T. Sala, Roberto Corell, Hernán Vera, Daniel Pastor, Manuel Noriega, Jorge Landeta.
Alors que la planète est en guerre, l’imprésario mexicain Francisco de Hormaechea et le centre éducatif des Hermanos Arechederra s’unissent pour produire cette « magnifique épopée de la découverte de l’Amérique » (slogan publicitaire), une exaltation de l’« Hispanité » sur le continent américain même, enfin un hommage incongru à Colomb qui évite le moindre questionnement critique. Le comédien espagnol Julio Villarreal incarne l’explorateur béni par le Ciel et ses représentants sur Terre, les Monarques Très Catholiques. Villareal s’est illustré dans le cinéma populaire local en incarnant Louis XIII dans la version mexicaine de Los tres mosqueteros (1932), l’abbé Faria dans El conde de Montecristo (1942), ou le vil Ogareff dans Miguel Strogoff (1944). Le script montre la Junta d’experts de Salamanque peuplée de crétins qui ricanent à l’idée d’une Terre sphérique (alors qu’en vérité, elle contestait seulement la fiabilité des théories géographiques du Génois), tandis que Colomb apparaît comme un génie illuminé, persuadé de découvrir un monde nouveau. Sa mort dans la misère est, elle aussi, une légende. Le film est réalisé de janvier à mars 1943 dans la baie de Veracruz et aux studios de la Columbus Films à Ciudad de México avec plus de 1800 figurants. L’architecte catalan Manuel Fontanals reconstruit à grands frais et sur 1200 m2 l’intérieur de la cathédrale de Barcelone, où les souverains espagnols reçoivent Colomb à son retour en 1493, accompagné d’une poignée d’Indiens baptisés. Le camp militaire pour le siège de Grenade est établi à Xochimilco, au sud de México, avec 200 tentes et plus de mille cavaliers. Mais cette débauche de chiffres ne provoque que les éclats de rire de la presse mexicaine, amusée par le syndrome « Cecil B. DeMille » appliqué à plus de deux heures de leçon de manuel scolaire et illustrées avec un maximum de solennité. Le film, aujourd’hui bien oublié, est exploité en 1946 en Espagne par la Columbia Pictures américaine où il suscite l’indignation des milieux franquistes, en raison surtout de la présence au générique de nombreux républicains exilés, notamment le réalisateur tolédan José Díaz Morales qui immigra au Mexique dix ans plus tôt après s’être fait une réputation de dangereux journaliste gauchiste dans l’Heraldo de Madrid. À Madrid-même, le film est affublé d’un commentaire en off au lendemain du débarquement de Colomb qui précise qu’« une de ces terres qui vivent dans le péché et qui ont besoin d’être convertis à la vraie religion, celle de Notre Seigneur Jésus-Christ, a été atteinte grâce à et au nom de l’Espagne ». Enfin, tout ce qui pourrait nuire à l’image de la nation et offenser les vrais patriotes, comme les intrigues du gouverneur des Indes et vice-roi de Nouvelle-Espagne Francisco de Bobadilla contre Colomb et ses frères, est censuré.
1945® Where Do We Go From Here? (Drôle d’histoire) (US) de Gregory Ratoff. - av. Fortunio Bonanova (Christophe Colomb).
1948The Story of Christopher Columbus : Proving the Earth is round (US)
Encyclopedia Britannica Films Inc.-Emerson Film Corporation (Boston), 17 min. – av. Nelson Leigh (Christophe Colomb), Ward Blackburn, Watson Downs, James Logan, Forrest Taylor. - Un court métrage didactique en 16mm qui résume en un quart d’heure l’enfance du navigateur à Gênes avec son frère Bartholomé, sa fascination pour les récits de Marco Polo, son envie d’aller « jusqu’au bout du monde pour prouver que la Terre est une sphère » - affirmation imbécile héritée des Lumières -, le refus du roi de Portugal, les étapes à La Rábida et à la cour d’Espagne, enfin la découverte de ces « terres vierges » que la Providence a données à l’Humanité civilisée. Un cumul de clichés et de contre-vérités destiné aux écoles américaines. Bravo, c’est ainsi qu’on éduque la jeunesse.
Fredric March découvre l’Amérique en « glorious Technicolor » (1949).
1949Christopher Columbus (Christophe Colomb) (GB) de David MacDonald
A. Frank Bundy, Sydney et Betty Box/Gainsborough Pictures-J. Arthur Rank Film (London), 105 min. - av. Fredric March (Christophe Colomb), Florence Eldridge (Isabelle de Castille), Francis Lister (Fernando II d'Aragon), Francis L. Sullivan (Francisco de Bobadilla), Kathleen Ryan (Beatriz Enríquez de Arana), Linden Travers (Beatriz de Peranza), Derek Bond (Diego de Arana), James Robertson Justice (Martín Alonso Pinzón), Nora Swinburne (Juana de Torres), Felix Aylmer (Père Juan Pérez), David Cole (Diego, fils de Colomb), Edward Rigby (Pedro), Niall MacGinnis (Juan de la Cosa), Abraham Sofaer (Luis de Santángel), Richard Aherne (Vincente Yañez Pinzón), Ronald Adam (Hernando de Talavera), David Cole (Diego Colomb), Sonia Holm (Filipa Moniz Perestrelo, sa mère), Clive Morton (Corres de Cunha), Leslie Perrins (Don Aguera), Michael Dear (chef Gromet).
Synopsis : En 1485, accompagné de son fils Diego (dont la mère est décédée), Christophe Colomb s’achemine vers le monastère de La Rábida où il convainc le père Pérez, ancien confesseur de la reine de Castille, d’intercéder auprès de la souveraine pour pouvoir lui présenter son audacieux projet. Juana de Torres lui obtient un entretien avec le roi Fernando II, mais durant les mois d’attente, il s’attire l’hostilité de l’intrigant Francisco de Bobadilla, un balourd borné et sournois qui a l’oreille du roi, réfute l’idée que la Terre soit une sphère et défend ses propres intérêts aux Canaries. Il aurait voulu jeter l’extravagant marin dans les bras de sa cousine, la veuve Beatriz de Pereza, mais le roi, chaud lapin, se la réserve, à la colère de la très catholique Isabelle. À bout de ressources, Colomb est invité à séjourner chez Diego de Arana où sa sœur Beatriz de Arana devient sa compagne. Il ne prend la mer que six ans plus tard, rappelé alors qu’il s’apprête à tenter sa chance en France. Suit la traversée qui enchaîne les épisodes connus... Les indigènes, constate-t-il, sont « amicaux, naïfs et pacifiques », ils accueillent les Espagnols avec enthousiasme et il interdit à son équipage de s’emparer de leurs parures en or (« nous sommes là pour les convertir au christianisme, non pour les exploiter »). Son retour en Espagne en 1493 est suivi de quelques mois de fête et d’intense félicité, puis, une fois Colomb reparti gérer ses découvertes outre-mer, les intrigues de cour menées par Bobadilla reprennent le dessus. Le navigateur est à nouveau discrédité et c’est en chaînes qu’il est ramené en Espagne. Il ne doit son salut qu’à la protection de la reine et il se retire désespéré et profondément humilié. « On se souviendra de mon nom longtemps après la disparition de ces deux monarques », conclut-il furieux en quittant le palais. Fin.
Pourquoi un film anglais en Technicolor sur Colomb, alors que rien, historiquement, ne relie la Grande-Bretagne à l’explorateur latin ? En 1941 paraît à Londres le roman Columbus, dernier best-seller de Rafael Sabatini, l’auteur italo-britannique des aventures rocambolesques de Scaramouche, Captain Blood et The Sea Hawk, magnifiées par le cinéma ; Sabatini est le Dumas du pauvre, rivalisant avec ses confrères, l'Italien Emilio Salgari et le Français Michel Zévaco. Le producteur Sydney Box, chef de Gainsborough Pictures, passionné par la matière, en rachète les droits et s’assure le financement de la Rank Film, la « firme au gong » qui cherche à s’introduire sur le marché américain où le cinéma britannique fait piteuse figure (hormis la London Films de Korda). Sydney Box et sa femme Muriel doivent toutefois entièrement revoir le script, la biographie de Sabatini étant par trop romanesque. Pour le rôle-titre, on envisage d’abord Stewart Granger (1946), puis Arturo de Córdova, Cyril Cusack, enfin James Mason (1947). Mais afin de s’assurer une distribution juteuse de l’autre côté de l’Atlantique, Box s’assure finalement la participation d’une grande star, célébrée à Hollywood (deux fois oscarisée) comme à Broadway : Fredric March, accompagné de sa femme Florence Eldrige en Isabelle la Catholique (elle fut Elizabeth Ire d’Angleterre dans Mary of Scotland de John Ford en 1936). Le couple politiquement très actif. sympathisants des républicains pendant la guerre civile espagnole et co-fondateur démocrate de la Hollywood Anti-Nazi League avant la guerre, a eu maille à partir avec l’extrême-droite à Washington (la HUAC de Martin Dies) et vient de gagner en 1948 un procès pour diffamation contre une virulente publication anti-communiste qui l’accusait de sympathies pour Moscou. C’est dire que leur séjour en Angleterre tombe à pic: pour ce couple courageux, un changement d’air d’impose. Le tournage de Christopher Columbus se fait avec un budget élevé de £500'000 de mai à octobre 1948 (17 semaines) aux studios Gainsborough à Shepherd’s Bush et à Pinewood, enjolivé d’extérieurs dans les Caraïbes, sur les îles de Saint-Vincent et les Grenadines, de Dominique (à Woodford Hill Bay) et de la Barbade où la réplique de la Santa María, construite en Espagne, s’égare pendant deux jours avant d’être détruite par un incendie et doit être remplacée ; un navire-dortoir venu de Marseille transporte artistes, techniciens et matériel sur place.
Mais très vite, March se rend compte que les cuisiniers ne connaissent pas leur recette, car ni le script de Sydney Box ni la mise en scène peu imaginative de MacDonald ne lui laissent l’opportunité de nuancer son portrait, lui qui avait récolté sa première statuette d’or dans le fascinant double rôle de Dr. Jekyll et Mr. Hyde (R. Mamoulian, 1931). Son portrait est néanmoins très proche de ce qu’ont rapporté les contemporains du Génois : brillant, pieux, capricieux, déterminé, monomane, sûr de lui, irascible, rigide et profondément irritant, profil qui fait le principal sinon l’unique intérêt du film mais dont le réalisateur ne sait pas tirer parti. L’acteur regagne les États-Unis très déçu, refusant même de participer à la promotion aux USA, et pour cause : malgré ses jolis chromos colorés (merci Natalie Kalmus), le film, beaucoup trop sage, voire soporifique, néglige le spectaculaire pour errer durant 45 minutes dans les dédales d’inutiles intrigues de cour (au point où l’on regretterait presque Sabatini), et il faut 25 minutes de bavardage supplémentaire à bord de la Santa María avant d’atteindre les Bahamas. Un commentaire en off résume en quelques images les trois autres voyages, moins glorieux. Sous cet aspect, le film se range dans la catégorie des biopics britanniques de l’époque consacrés à des explorateurs qui, comme Scott of the Antarctic (1948) de Charles Frend, se terminent sur un échec et non sur l’exaltation à l’américaine du héros.
De surcroît, le film qui se veut scrupuleux, omet d’expliquer les raisons de la disgrâce de Colomb (massacres d’indigènes, trafic d’esclaves, gestion désastreuse des terres de la Couronne, etc.), perpétue dans son texte introductif le mythe selon lequel le Moyen Âge croyait que la Terre était plate (une absurdité refutée par tous les savants de l’époque) et que seul Colomb n’était pas dupe, reprend la légende d’Isabelle qui aurait vendu ses bijoux personnels pour aider l’explorateur, affirme que les Indiens sont une foule de sauvages gentils et obéissants, ravis d’accueillir de si magnifiques « découvreurs » auxquels ils peuvent offrir leurs cigares et sacrifier leur propre culture, enfin que le navigateur était conscient qu’il avait découvert des terres inconnues. Fernando II est montré pusillanime, adultère et couard, très loin du modèle du « prince » que vit en lui Machiavel. Mais il y a pire : n’ayant pas reconnu le roi alors que celui-ci cherchait à abuser de Beatriz de Pereza, Colomb le jette à terre et le monarque déconfit s’en va sans un mot : la scène est aberrante, car après pareille intervention, au pire, le roturier génois aurait fini sur le billot, au mieux il n’aurait jamais obtenu le feu vert pour son expédition ! Bref, Colomb représente la modernité et la foi chrétienne, capables – comme on l’a constaté ! - d’éradiquer la superstition, l’ignorance et la convoitise. Pour l’exploitation aux États-Unis, le Production Code américain exige de réécrire les passages concernant l’enfant illégitime de Colomb avec Beatriz de Arana afin de montrer que les amants se sentent fautifs et font contrition. Sydney Box se facilite la tâche en rayant l’enfant du scénario : ainsi disparaît Hernando Colomb (1488-1539), bibliographe et cosmographe qui accompagna son géniteur lors de son quatrième voyage et rédigea plus tard sa biographie. En revanche, les spectateurs américains (et le public de la RFA encore sous occupation alliée) ont l’exclusivité mondiale d’un final ronflant : sur son lit de mort, Colomb est consolé par la vision de ses deux compagnons Arana et Martín Pinzón qui lui prédisent combien puissante sera la nation - les États-Unis - qui va peupler le Nouveau Monde et qui comblera l’humanité de ses bienfaits... Le film sort à New York le 12 octobre, date commémorative du « Columbus Day » depuis 1792. Certaines copies présentent même un extrait de la Déclaration d’Indépendance commenté par George Washington, Abraham Lincoln et Franklin D. Roosevelt. Ce salmigondis flagorneur n’arrange toutefois pas la décevante carrière commerciale d’une production qui ne récupèrera qu’un quart de son investissement. – DE/AT : Columbus, DE-RDA : Columbus entdeckt Amerika, IT : Cristoforo Colombo, ES (tv 2020) : La verdadera historia de Cristóbal Colón.
L’Église encourage Colomb (Antonio Vilar) à persévérer dans sa quête « divine » de navigateur (1951).
1951Alba de América (Cristobál Colón) [Aube de l’Amérique] (ES) de Juan de Orduña
Vicente Casanova, Enrique Balader/CIFESA (Compañía Industrial Film Español S.A., Valencia), 121 min./112 min./ 108 min. - av. Antonio Vilar (Christophe Colomb), Amparo Rivelles (Isabelle de Castille), José Suárez (Fernando II de Aragon), Alberto Romea (le cardinal Mendoza), Maria Martin (Beatriz de Arana), Virgilio Teixeira (Pedro de Arana), Luis S. Torrecilla (Luis de Santángel), Jacinto San Emeterio (Gonzalo de Córdoba), Anna Maria Custodio (Beatriz de Bobadilla), Manuel Luna (Isaac, le banquier juif), Eduardo Fajardo (Gaston d’Armagnac), Jesús Tordesillas (Frère Juan Pérez), Ana María Custodio (la mère de Beatriz), José Marco Davó (Martín Alonso Pinzón), Ernesto Vilches (un chevrier), Nicolás D. Perchicot (Frère Antonio de Marchena), Fernando Sancho (Pedro Salcedo), Arturo Marín (Pedro Vázquez de la Frontera), Antonio Casas (Juan de la Cosa), Vicente Soler (le comte de Quintanilla), Félix Dafauce (Villamarín), José Sepúlveda (Cristóbal Sarniento), Francisco Arenzana (Francisco Arias), Jacinto San Emeterio (Gonzalo de Córdoba), Domingo Rivas (Enrico de Guzman, duc de Medina-Sidonia), Antonio Almorós (Vicente Yáñez Pinzón).
En Espagne, le Christopher Columbus britannique sorti en 1949 (cf. supra) ne passe pas inaperçu, étant jugé peu flatteur envers ce que Madrid estime être le personnage le plus marquant de l’histoire nationale. On y décèlerait, rapporte la presse, des traces de la « légende noire » antiespagnole propagée par la perfide Albion depuis le XVIe siècle (Fernando II et ses courtisans y sont caricaturés). Dès 1940, les revues cinématographiques de l’immédiate post-guerre civile ont appelé à hauts cris la création d’un cinéma historique national exaltant la grandeur d’un passé glorieux que le régime de Franco s’applique à ressusciter. La menace d’un film anglais sur Colomb produit, réalisé et interprété par Leslie Howard pendant la guerre s’est évaporée avec la mort tragique de ce dernier, abattu par la Luftwaffe en 1943, mais en France, Abel Gance persiste toujours (cf. supra, 1938/39). Enfin, le « biopic » technicolorisé avec Fredric March, jadis sympathisant de la cause républicaine pendant la guerre civile, déclenche l’alarme générale et l’amiral Carrero Blanco, éminence grise du franquisme et sous-secrétaire de la Vice-présidence, donne l’impulsion décisive pour venger pareil affront. Le Sous-secrétariat de l’Éducation populaire et l’Institut de Culture Hispanique (Instituto de Cultura Hispánica) décident de patronner un film dont José Rodulfo Boata, rédacteur de Radio Nacional, écrit le scénario en suivant des instructions très précises, approuvées par Franco en personne. Ainsi apparaît une initiative officieuse, imposée par le régime à travers l’organisme public du Consejo de la Hispanidad, avec l’objectif de répondre aux « offenses », aux « outrages » et à « l’infamie » du film anglais (bien sûr interdit en Espagne en vertu d’une loi de 1937 contre la déformation du passé national par les médias étrangers). La campagne de réhabilitation de l’honneur du pays commence par une série radiophonique d’Angel Ara sur Colomb, suivi de la mise en chantier d’Alba de América dont le titre sert également de rappel à ces Amériques inféodées à Washington qui – l’Argentine de Péron exceptée – isolent la péninsule ibérique (à laquelle elles doivent leur « aube » civilisationnelle) du reste du monde. La production incombe à la CIFESA valencienne, auréolée de la réputation des ronflantes fresques historiques Locura de amor (1948, cf. chap. 2.2) et Agustina de Aragón (1950, cf. Napoléon, chap. 13.1).
Baptême pour le « bon sauvage », bénédictions pour les Rois Catholiques (« Alba de America », 1951).
 L’État refuse d’investir de l’argent, mais la CIFESA s’épargne les frais de la construction d’une réplique de la Santa María offerte par le Ministère de la Marine (et ensuite parquée comme attraction touristique dans le port de Barcelone) ; les deux autres caravelles sont sacrifiées, faute d’argent. Quant au réalisateur-maison, Juan de Orduña, il se sent d’abord flatté d’avoir été choisi pour mener à bien pareille entreprise, s’imaginant ainsi bénéficier de tous les appuis politiques et religieux du pays, même s’il désapprouve progressivement le scénario imposé. Celui-ci est alourdi par d’érudites références, privé d’émotion, encombré de discours et d’attitudes solennels au point où la vedette d’Agustina, Aurora Bautista, décline le rôle pivotal d’Isabelle la Catholique, réduite à une statue de musée de cire, à une icône sans vie. Orduña la remplace par sa rivale, Amparo Rivelles, 26 ans - la reine en avait 41 en 1492 -, qu’il vient de diriger dans La leona de Castilla (1951, cf. chap. 3.1). Doublée en espagnol (alors que l’authentique Colomb baragouinait cette langue !), la vedette portugaise Antonio Vilar, qui incarna le poète national lisboète Camoëns en 1946 cinq ans plus tôt, campe le navigateur. On renonce à la couleur, le procédé hispanique Cinefotocolor n’étant pas satisfaisant. La réalisation prend six mois, du 21 mai au 20 octobre 1951 dans les studios de la Sevilla Films à Madrid et en extérieurs à Barcelone, à Benidorm sur la Costa Blanca (Alicante), à Malaga et au monastère de La Rábida (Palos de la Frontera, Huelva). Des Mexicains immigrés sont grimés en Indiens. Lorsque le film est sur le point de sortir, un changement de ministère fait qu’on lui retire la qualification « d’intérêt national », ce qui équivaut à un lâchage gouvernemental et à un travail de sape sur le plan de l’exploitation mise en route lors de la sortie, le 20 décembre 1951. En mars 1952, l’administration revient sur sa décision après une campagne de presse nourrie, mais le mal est fait. Les salles sont pleines mais le film tient à peine sept semaines malgré une presse honteusement complaisante et la rhétorique patriotarde de la publicité. La CIFESA, qui a investi 10 millions de pesetas, renonce progressivement à la production et fermera ses portes six ans plus tard. Condamné à une performance ridicule, scrutant l’horizon en déclamant sentencieusement des banalités, Antonio Vilar se console avec le prix spécial de la critique décerné par le Circulo de Escritores Cinematográficos (CEC). Quant à Juan de Orduña, il va se tourner désormais vers des sujets plus frivoles et créativement moins contraignants.
Le diktat alourdissant des prétendues exactitudes historiques réduit l’attrait du film auprès du grand public : on a oublié qu’à l’écran, la rigueur des érudits se transforme facilement en rigor mortis, indépendamment du fait que si l’on corrige des erreurs commises par les films précédents, on en introduit d’autres en taisant tout ce qui pourrait nuire à la « gloire de l’Espagne » ou, inversement, en ne mettant en valeur que ce qui convient aux caciques du moment et/ou à la toute puissante Église nationale-catholique. Celle-ci admet que les motivations de Colomb sont aussi matérielles (métaux précieux), mais puisqu’il y va de l’intérêt du royaume et vu que le navigateur-prophète s’affirme envoyé par Dieu, elle ferme les yeux. Pour présenter dans toute leur splendeur les Rois Catholiques, incarnations de l’utopie unitaire, le film les montre pendant le siège de la Cordoue musulmane ; Gonzalo de Córdoba s’illustre au combat sur les remparts tandis que la reine, représentante de la Mère-Patrie, se montre à la fois compatissante envers les blessés et, comme il se doit, soumise à la volonté de son époux. Son portrait correspond exactement à l’idéal de la Seccion Femenina du parti : mère, épouse, patriote et catholique. Orduña organise la fin d’Al-Andalus en un « tableau vivant » copié sur la toile La Capitulación de Granada de Francisco Pradilla (1882). Beatriz de Arana est montrée comme une compagne asexuée (non pas comme la maîtresse du navigateur et la mère de son fils naturel, broutille embarrassante qui est une fois de plus passée sous silence), ce qui élimine tout aparté romantico-sentimental. Colomb défend la dame contre deux traîtres et maîtres-chanteurs inventés de toutes pièces, Gaston d’Armagnac et le banquier portugais Isaac, personnifications de la double menace franco-juive selon l’imaginaire franquiste ; Gaston sera tué en duel par un spadassin espagnol, Isaac emprisonné pour malversations – en attendant pire. Les deux lascars étaient chargés par les puissances européennes d’inciter Colomb à naviguer sous le pavillon franco-anglais, ce que le héros du film refuse net. Or c’est le contraire qui est vrai : envoyé par son frère, Bartolomé Colomb se rendit d'abord en vain aux cours royales de Paris et de Londres pour financer le voyage.
Alba de América, qui ne relate que la première traversée, commence sur mer, 58 jours après avoir quitté les côtes espagnoles. L’équipage de la Santa María est près de se mutiner et de jeter l’« étranger » – Colomb – par-dessus bord. Compagnon du capitaine, l’armateur Martín Alonso Pinzón (commandant de la Pinta et ex-marchand d’esclaves dont le scénario tait le manque de loyauté et les bassesses) raconte aux marins – ainsi qu’aux spectateurs - dans un long flash-back de 94 minutes le parcours de sept ans et les vicissitudes de l’« admirable visionnaire » pour se faire entendre, tout en précisant que si Colomb n’est pas castillan mais « citoyen du monde », l’entreprise dont il assume les commandes est bien espagnole et elle lui a été confiée par la Couronne. Son discours sous-entend qu’en terre castillane, Colomb n’a rencontré que des gens bienveillants et encourageants, ses difficultés provenant seules de son orgueil et de sa déplorable intransigeance. L’origine génoise du navigateur est passée sous silence. La Santa María devient emblème de la Nation et la traversée de l’océan une métaphore de l’Histoire, tandis qu’à bord, seules comptent les valeurs qui ont permis de vaincre le chaos républicain en 1936-39 : unité, ordre, hiérarchie et discipline. Rarement un film en costumes aura autant parlé du présent. Enfin, une ellipse temporelle permet d’ignorer le rapport de Colomb avec les Indiens, présentés dans l’ultime séquence du film, dans le chœur de la cathédrale bondée de Barcelone, comme de nouveaux adeptes de la communion hispanique, quoique sans voix ni culture ni personnalité : baptisés, ils sont désormais « membres de la noble famille des Espagnes », conclut la reine (en voix off), avec une seule foi et une seule langue, « le plus beau miracle de tous les siècles ». Le plan final montre Colomb, témoin de ce « miracle », se transformant en silhouette pour marquer son passage à la postérité. Le Colomb historique n’est donc ici qu’un prétexte, l’instrument d’une emprise religieuse au cours de laquelle le salut des âmes « païennes » est une fin en soi, bien au-dessus des basses motivations économiques que le Génois, en visionnaire arrogant et matérialiste, défendait au départ. « L’Espagne a non seulement découvert l’Amérique, elle l’a conquise, christianisée et civilisée presque entièrement, un fait qui constitue une épopée tellement grandiose qu’elle touche à l’inconcevable » écrit sans rire Frère Ignacio González Ménendez-Reigada, confesseur de Mme Franco, dans son Catecismo patriótico español (1939), résumant à la fois le credo pompeux d’un régime à l’intégrité toute relative et l’idéologie qui traverse Alba de América. La musique du générique du film – l’hymne Gloria in excelsis Deo ! - en devient aussi le leitmotiv. José Antonio Primo de Rivera, fondateur de la Phalange fasciste fusillé par les républicains en 1936, n’affirmait-il pas aussi que « l’Espagne alla en Amérique non pour son or mais pour dire aux Indiens que nous sommes tous des frères, comme les Blancs et les Noirs » (Textos de doctrina politica) ? On peut rêver.
Aveuglés par la mystique nationaliste, historiens, politiciens et cinéastes ibériques oblitèrent les véritables motivations derrière l’investissement de la Couronne de Castille dans l’aventure hasardeuse de Colomb en « Asie » : les Rois Catholiques ne comptaient pas sérieusement baptiser des bouddhistes de Cipango (Japon) ou de Cathay (Chine), voire des hindous ou musulmans, mais marchander avec le Grand Khan pour ramener de l’or, des perles, des parfums et des épices en contournant le blocus tant naval que terrestre des Ottomans ! – IT (1956) : Il segreto di Cristoforo Colombo, PT : Cristóvão Colombo, US : Dawn of America.
1951[Animation : Hare We Go (US) de Robert McKimson ; Warner Bros., 7 min. - av. les voix de Mel Blanc (Bugs Bunny / Christophe Colomb /Ferdinand d’Aragon) et Bea Benederet (Isabelle de Castille).]
1953(tv) Christopher Columbus Sets Foot on San Salvador (October 12, 1492) / Columbus Discovers America (US) de Sidney Lumet
Série « You Are There », saison 2, épis. 7 (CBS 11.10.53), 30 min. – av. Walter Cronkite (présentation). – Des journalistes de la télévision américaine assistent à l’arrivée (reconstituée) de Colomb dans le Nouveau Monde et commentent l’événement.
1955(tv) Christopher Columbus (US) de Dave Butler
Série « Captain Z-RO » (saison 1, épis. 1), Kathleen K. Rawlings, Henry Brown/W. A. Palmer Films Inc. (ABC 18.12.55), 26 min. - av. Edward Stevlingson (Christophe Colomb), Jack Fleming (Alfredo), Richard Camp (Rico), Jack Sullivan (Carlos), Richard Lage (Pedro), Laurence Bedini, Robert Warfield, Robert Gillette (des marins), Roy Steffens (Captain Z-RO), Bruce Haynes (Jet). - Série pour la jeunesse : grâce à leur machine à explorer le temps, le capitaine Z-RO et ses assistants scrutent le passé pour préparer le futur. Ici, l’assistant Jet évite une mutinerie à bord de la Santa María en octobre 1492, alors que les marins désespèrent et qu’aucune terre n’est en vue.
1957(tv) Cristóvão Colombo (BR) série télévisée
TV Tupi São Paulo (feuilleton). – av. Felipe Wagner (Christophe Colomb).
1957® The Story of Mankind (US) d’Irwin Allen. - av. Anthony Dexter (Christophe Colomb).
1961[Animation : Christopher Columbus (US) de Gerard Baldwin, Frank Braxton, Peter Burness ; Jay Ward Productions, 5 min. – série « Peabody’s Improbable History »]
1962[Cristóbal Colón en la facultad de medicina (AR) de Julio Saraceni, 93 min. - av. José Marrone (Christophe Colomb), Juanita Martínez, Nelly Lainez. - Comédie burlesque qui se déroule dans le présent.]
1963(tv-th) Christoph Columbus oder Die Entdeckung Amerikas (DE-RDA) de Hanns Anselm Perten (th) et Henry Riedel (tv)
Deutscher Fernsehfunk der DDR, Ost-Berlin (DFF 29.9.63). – av. Hermann Wagemann (Christophe Colomb), Ralph Borgwardt (José Vendrino), Lothar Krompholz (Fernando II d'Aragon), Karin Seybert (la reine Isabelle de Castille), Kurt Grandeit (le chancelier Luis de Santángel), Frit Süssenbach (le trésorier Quintanilla), Christine van Santen (la marquise de Moya), Gerd Micheel (Amerigo Vespucci), Walter Müller (l’archevêque), Wolfgang Greese (Rodrigo), Fritz Barthold (Diego), Kurt Wetzel (un officier), Dieter Unruh (chef indien), Erika Solbrig (Anacoána).
La comédie satirique de Walter Hasenclever et Kurt Tucholsky (1932) servie par l’Allemagne communiste avec des piques actualisées contre l’Amérique de la guerre froide et tournée au Ostseestudio à Rostock (pour les détails, cf. infra, le téléfilm de Helmut Käutner en 1969).
1968(tv-th) El Nuevo Mundo [La Découverte du Nouveau Monde] (ES)
Série « Teatro de siempre », Radiotelevisión Española, Madrid (TVE 10.10.68). – av. Arturo López (Christophe Colomb), Maria Paredes, José María Prada, Ana María Vidal, Carlos Mendy. – Dramatique d’après la pièce El Nuevo Mundo descubierto por Cristóbal Colón que Félix Lope de Vega a consacrée au navigateur au début de sa carrière (écrite vers 1596, jouée en 1614). C’est un drame rarement représenté et qui ne fut suivi, malgré l’influence de l’Espagne du Siècle d’Or sur le théâtre français et l’admiration de Jean-Jacques Rousseau, d’aucun essai d’adaptation ni d’imitation. Une hagiographie à la dramaturgie compliquée qui présente le navigateur comme un instrument de la Providence, vision évidemment favorisée par la monarchie hispanique. La nouvelle du décès de Colomb le 20 mai 1506 à Valladolid n’a eu qu’un faible écho (sa mort n’a même pas été consignée dans les procès-verbaux du Conseil municipal) et l’exaltation du Génois et de son entreprise de découvreur (biographies, drames, tableaux) ne commencera réellement qu’au XVIIIe siècle et s’épanouira au XIXe siècle.
Andrea Cecchi (le Père Juan) et Francisco Rabal (Colomb) dans le téléfilm de Vittorio Cottafavi (1968).
1968** (tv) Cristoforo Colombo / Cristobál Colón (IT/ES) télésérie de Vittorio Cottafavi
Javier Pérez Pellón, José María Otero/Televisión Española (TVE)-Radiotelevisione Italiana (RAI) (RAI Programma Nazionale 22.9.+29.9.+6.10.+13.10.68 / TVE 12.10.68), 276 min. / 4 parties : 67+67+70+72 min. - av. Francisco Rabal (Christophe Colomb), Roldano Lupi (Bartolomeo Colombo), Aurora Bautista (Isabelle de Castille), José Suarez (Fernando II d'Aragon), Paulo Graziosi (João II du Portugal), Alfredo Mayo (le cardinal Hernando de Talavera, président de la Junta de Salamanque), Paola Pitagora (Beatriz Enríquez de Arana), Antonio Casas (Martín Alonso Pinzón), Andrea Checchi (Père Juan Pérez), Julieta Serrano (Filipa Moniz Perestrelo), Mario Morales (Diego de Arana), Paola Pitagora (Beatriz Enríquez de Arana), Lorenzo Robledo (Martin Behaim), Juan Cazalilla (Dr. Sánchez), Guido Alberti (le barbier), Carlos Lemos (Sanchez), Luigi Vannucchi (narration italienne).
Ce premier film à la fois intelligent et adulte sur Colomb est une coproduction télévisée italo-espagnole signée Vittorio Cottafavi. Après le retentissant échec commercial de I cento cavalieri (1964), alors l’unique film à aborder de manière honnête l’occupation de l’Espagne par les Maures (cf. chap. 1.2), Cottafavi, humaniste, moraliste, favori de la cinéphilie parisienne pointue, a tourné le dos au cinéma pour se consacrer exclusivement et avec une rare intelligence au petit écran où il peut donner libre cours à sa vaste culture, entre Shakespeare, Tolstoï, Euripide, Molière, Ionesco, Dürrenmatt ou Tennessee Williams. En 1965, sa mini-série Vita di Dante a présenté la vie et les combats politiques du poète florentin dans une perspective brechtienne, évitant tous les pièges du « biopic » classique (cf. Italie, chap. 4.5). Cette réussite n’est pas passée inaperçue, et lorsque Alfredo Sánchez Bella, politicien lié à l’Opus Dei et ambassadeur d’Espagne à Rome, planifie une série de coproductions entre la TVE et la RAI, c’est à Cottafavi que l’on offre le premier projet, consacré au grand navigateur. En inaugurant cette toute première collaboration des médias cathodiques espagnols avec l’étranger, Sánchez Bella ne se doute pas à quel point le sujet tombe à pic : l’Amérique est à l’ordre du jour, la guerre du Vietnam bat son plein, dénoncée publiquement par Martin Luther King (les soldats afro-américains y paient le plus lourd tribut), tandis que la contestation gagne les campus où l’histoire officielle et son récit national fabriqué par les colonisateurs sont remis en cause. Le découvreur involontaire du Nouveau Monde devient le représentant de l’eurocentrisme et de l’impérialisme culturel tandis que le terme même de « découverte » est rejeté par les descendants amérindiens. Le « Colombus Day » du 12 octobre invite à la commémoration et non plus à la célébration et filmer les exploits du navigateur n’est désormais plus une démarche innocente.
Pour camper un Colomb vigoureux, farouche et persuasif, Cottafavi a choisi Francisco Rabal, un homme de gauche qui a travaillé pour les plus grands, Buñuel (Nazarin, Viridiana, Belle de Jour), Antonioni (L’eclisse), Friedkin (French Connection), Visconti, Chabrol, Zurlini, Saura, plus tard Almodóvar, etc. Aurora Bautista, jadis reine du cinéma franquiste en costumes (Locura de amor en 1948, Agustina de Aragón en 1950) incarne Isabelle. La série est filmée en 35mm noir et blanc durant quatre mois (de septembre 1967 à mi-janvier 1968), presque entièrement en extérieurs, notamment à Cordoue, à l’Alhambra à Grenade, sur la Costa Brava et à Barcelone, en mobilisant quelque 500 figurants et en utilisant la caravelle qui avait déjà servi pour Alba de America seize ans plus tôt (cf. supra), le tout suivi jusqu’en mars du travail aux studios RAI de la Via Teulada à Rome.
À l’arrivée, Cottafavi livre son œuvre télévisée de loin la plus la plus ambitieuse (elle lui vaudra la Médaille Guglielmo Marconi 1969) et peut-être la plus aboutie, stylistiquement à mi-chemin entre les audaces d’Orson Welles avec ses mouvements d’appareil inventifs, et l’ironique théâtralité d’un Manuel De Oliveira. Le scénario élaboré par Dante Guardamagna et Lucio Mandarà ne laisse rien dans l’ombre, mais, très soucieux de cohérence historique, complète le récit à l’aide de cartes géographiques, de gravures et de longs passages muets commentés en off qui résument de manière distanciée les événements tout en conférant à l’ensemble une certaine austérité documentaire. Selon ses propres dires, Cottafavi tente d’être contemporain des évènements et de son personnage, caméra au poing. Son film débute en 1477 sur l’île portugaise de Madère où Colomb, « un inconnu, un étranger pour tous, autodidacte passionné qui vit dans l’avenir », se marie, a un fils, s’établit à Lisbonne, tente vainement sa chance auprès du roi João Ier, perd son épouse et gagne l’Espagne. Suivent les épisodes connus des années d’attente jusqu’en 1492, sa liaison extraconjugale et son deuxième fils. Après la première traversée, la trahison de Pinzón qui disparaît avec la Pinta pour chercher l’or qu’il ne trouve pas à Guanahani/San Salvador et l’accueil triomphal à Barcelone, Cottafavi détaille la descente aux enfers : le massacre des marins restés sur place, les calomnies à la Cour, les naufrages, la rébellion indigène, etc. Infirme, Colomb décède à Valladolid à l’âge de 54 ans, ayant renoncé sur un coup de tête rageur à l’exploration qui lui aurait révélé le Venezuela, le Brésil, l’Argentine, toute l’Amérique du Sud... Le portrait du navigateur n’est pas tendre, Cottafavi le montrant « au quotidien », avec ses contradictions, son égoïsme, sa cupidité, ses élans tyranniques et, sur la fin, ses crises de rage hystériques. « Avec son obsession religieuse, sa profonde connaissance de la Bible, explique le réalisateur, c’était en un certain sens la dernière âme du Moyen Âge qui se dissolvait dans la Renaissance, un mutant divisé par la recherche et les intuitions d’une nouvelle science, ce qui explique l’incompréhension de son entourage. « Nous avons réfuté l’idolâtrie rhétorique des manuels scolaires qui ont toujours présenté Colomb comme un héros sans faille, précise pour sa part Francisco Rabal. Il était doté d’un immense courage, d’une volonté d’acier et d’intuitions miraculeuses, certes, mais aussi marqué par ses faiblesses, ses erreurs et ses péchés. Il affichait un orgueil que les Inquisiteurs jugeaient diabolique, au point de passer un temps pour un hérétique. Il avait aussi de grandes ambitions politiques et visait peut-être à fonder une dynastie familiale autonome dans le Nouveau Monde. Hélas, il fut un gouverneur pitoyable des terres qu’il a découvertes. Il l’admit lui-même : pas indigne de gouverner, mais incapable » (Solo io potevo scoprire l’America, in : Oggi, sept. 1968).
Les barbes des Espagnols et la plume du scribe amusent les caciques (« Cristoforo Colombo », tv 1968).
 Quand sort la télésérie, la presse romaine s’offusque qu’on ait dépensé 500 millions de lires pour ne pas souligner avec fermeté que Colomb était génois, alors qu’à Madrid, c’est Don Cristobal Colón, duc de Veragua et descendant espagnol du navigateur, qui présente la production à la TVE. Cottafavi : « À Rome on est convaincu qu’il était italien, à Madrid on le considère comme espagnol ; or il était sûrement d’origine juive - et sûrement pirate ! » (Il aurait combattu en corsaire contre Venise.) Dès le deuxième épisode, l’accueil de la presse franquiste se refroidit. « J’ai baigné le débarquement en Amérique dans un climat d’enthousiasme et de confusion, affirme le cinéaste, mais aussi avec une touche de ridicule pour fuir cette représentation sacrée des événements historiques et faire plutôt « téléjournal ». Quand on plante le drapeau espagnol dans le sable, on entend musicalement comme un cri, comme si la terre était blessée par l’enseigne. Et lorsqu’on proclame officiellement la prise de possession de l’île au nom du roi, un indigène curieux s’empare amusé de la plume du notaire tandis que d’autres, imberbes, touchent avec étonnement et éclats de rires les barbes des intrus, créant une confusion générale. C’était un peuple joyeux et bon, inconscient de la tragédie qui s’annonçait pour eux. C’est sans doute cette scène et ce qu’elle sous-entend qui a irrité la censure franquiste. » Le film montre les « Indiens » choisir un béret plutôt qu’un couteau et ne voulant par la suite ni travailler ni être payés, ce qui dépasse l’entendement de Colomb et le fait réagir avec brutalité. Quant à la chute de Grenade, elle est représentée sans bataille : « Je me borne à montrer l’humiliation de la population civile arabe, appréhendant la violence qui les attend. La bande sonore, elle, se résume à des hourrahs des vainqueurs qui ont quelque chose de bestial, entre le braiement d’un âne et le rugissement d’un lion. » (Dossier Vittorio Cottafavi, Filmoteca Nacional, Barcelona, 1980, p. 45). Ailleurs, le cinéaste précise : « Avant de monter sur le trône, Ferdinand de Castille était marchand d’armes, produits qu’il vendait à ses compatriotes pour asseoir son pouvoir tout en commerçant avec les Arabes. Aux yeux d’Al-Andalûs, les Rois Catholiques faisaient figure de demi-sauvages ; la civilisation raffinée des Arabes possédait le savoir mathématique, médicinal et astronomique, les Espagnols avaient la force et la violence. (...) Ces Rois Catholiques sont comme des fresques sur les murs, quelque chose d’inhumain qui attire Colomb et contre lequel il se heurte » (Filmcritica no. 190, août 1968). Son téléfilm cherche ainsi à cerner avec lucidité autant l’homme que son époque, ce qui est sa qualité première. La production télévisuelle européenne n’étant pas encore minée par la concurrence des chaînes privées, Cristoforo Colombo bénéficie d’un audimat satisfaisant dans les deux pays concernés, mais peine à s’imposer ailleurs faute d’attraits racoleurs. - DE : Christoph Kolumbus (série baptisée « jeu documentaire » et réduite à 2 parties de 90 et 85 min. par la ZDF, 8.5.1970).
1969(tv) Christoph Kolumbus oder Die Entdeckung Amerikas (DE) de Helmut Käutner
Wolfgang Völker/Hessischer Rundfunk (Frankfurt am Main) (ARD 7.9.69), 88 min. - av. Karl Michael Vogler (Christophe Colomb), Margot Trooger (Isabelle de Castille), Theo Lingen (Fernando II d'Aragon), Udo Vioff (Amerigo Vespucci), Walter Hoor (Pepi, un marin), Hans Clarin (Pepi, son descendant au XXe s.), Klaus Schwarzkopf (Vendrino, inspecteur des finances royales), Hannelore Eisner (Anacoana, une Amérindienne), Maria Sebaldt (la marquise), Benno Hoffmann (un homme-médecine), Joseph Offenbach (le chancelier Luis de Santángel), Harry Wüstenhagen (Antonio de Quintanilla, trésorier royal), Fritz Rémond Jr. (le chef amérindien), Henning Schlüter (le cuisinier à bord), Friedrich Maurer (l’archevêque), Karl Friedrich (Père Bernardi), A. M. Rueffer (Père Gonzala), Edgar Hoppe (Diego Colomb), Gernot Duda (Rodrigo), Thomas Löbi (le mousse).
Helmut Käutner, le cinéaste allemand le plus marquant de l’ère Adenauer (Des Teufels General/Le Général du diable, 1955), adapte l’unique pièce du satiriste allemand Kurt Tucholsky, démocrate de gauche, socialiste, pacifiste et antimilitariste – exilé en Suède où il se suicida en 1935 - pour le petit écran. La « comédie en un prologue et six tableaux » a été écrite et jouée jadis à Berlin (1932) sous le pseudonyme de Peter Panter, en collaboration avec le romancier expressionniste Walter Hasenclever, qui, lui aussi, fuira le Reich, s’exilera à Nice et, interné en France, se suicidera avant l’arrivée des troupes nazies en 1940. Isabelle la Catholique y accepte de financer le voyage de Colomb parce que les caisses d’État sont vides et qu’elle se laisse séduire par un commerçant génois charmant et avide de profit ; il doit toutefois emmener avec lui un inspecteur des finances qui engage un gang de repris de justice au lieu de véritables marins. Une fois arrivé, Colomb trouve le Nouveau Monde plutôt étrange et très réactionnaire, excepté les Indiennes aux mœurs assez libres. Alors qu’on leur annonce officiellement qu’ils sont désormais « découverts », les indigènes prennent les Espagnols pour des cannibales, car par le passé, les visiteurs venus de l’Est ont toujours eu mauvaise réputation. Chez eux, les armes, les banques et les navires de guerre sont interdits, et depuis lors, la paix règne, etc. Un mix d’Histoire et de satire auquel Käutner a apporté son propre grain de sel. Tucholsky persifle son héros qui sait tirer profit de la Couronne comme de l’Église, et truffe l’action d’allusions politiques modernes et de joyeux anachronismes. Tournage en mai-juin 1969 aux studios de télévision de Francfort, avec Hannelore Elsner en Indienne aux seins nus, du jamais vu sur le petit écran en RFA !
1974(tv) Witness to Yesterday : Christopher Columbus (CA) d’Arthur Voronka
Tom Moore, Arthur Voronka/Look Hear Productions-Global Television Network (Global 19.3.74), 30 min. – av. William Hutt (Christophe Colomb), Patrick Watson (l’interviewer). - Colomb est interviewé par un journaliste-vedette de la télévision canadienne.
1975(tv-df) The Story of Christopher Columbus (Christophe Colomb) (GB/US/DE) de Lawrence Gordon Clark
Série « Explorers / Entdecker (Les Grands Explorateurs) » no. 10, Michael Latham/BBCtv-Time Life Inc.-WDR (BBC Two 16.11.75), 50 min. – av. Carlos Ballesteros (Christophe Colomb). - Docu-fiction présenté par David Attenborough (Royal Geographical Society), frère de Richard : le déclin dramatique d’un homme qui fit une découverte qu’il ne prit jamais au sérieux (script : Jesse Lasky Jr. et Pat Silver).
1975(tv-th) Christophe Colomb (FR) de Pierre Cavassilas
Antenne 2 (A2 11.8.75), 110 min. - av. Victor Garivier (Christophe Colomb), Jean de Conninck (Don Alonso), Brigitte Fossey (Isabelle de Castille), Roland Monod (le prieur), André Julien (Juan), Sylvie Fennec (la Vierge), Gérard Melki (le Christ).
Se sentant choisi par le Christ et soutenu par la Vierge, Christophe Colomb, de passage au monastère de la Rábida, prépare avec obstination, fougue et folie son voyage vers des contrées inconnues, sans égards pour les éventuelles victimes de l’entreprise... Dramatique tirée d’une pièce de Nikos Kazantzakis jamais jouée de son vivant, Chistophe Colomb ou la Pomme d’Or (Christoforos Colomvos), et qui a été mise en scène pour la première fois en 1966 en Argentine. Pierre Cavassilas, qui a traduit le texte en français, reprend aussi la musique de scène de Mikis Theodorakis composée pour le Théâtre Populaire Grec à Athènes en 1975.
1976(tv-th) Christophe Colomb (FR) de Jean-Louis Barrault (th) et Jean-Paul Carrère (tv)
Compagnie Renaud-Barrault-Antenne 2 (A2 19.2.76). - av. Laurent Terzieff (Christophe Colomb, du drame), Jean-Louis Barrault (Christophe Colomb, la légende), Madeleine Renaud (Isabelle de Castille), Pierre Boutron (Fernando II d’Aragon), Marie-Hélène Dasté (Susanna Fontanarossa, la mère de Colomb), Catherine Eckerlé (la sœur de Colomb), Laurence Schumann (Filipa Moniz Perestrelo, la femme portugaise de Colomb), Popeck (Domenico Colombo, le père de Colomb), Yves Gasc (l’explicateur).
Le Livre de Christophe Colomb (1927) est une pièce de théâtre hagiographique en deux parties de l’auteur catholique Paul Claudel, un « oratorium scénique » commandé par Max Reinhardt et présenté sur scène à Berlin en 1930 avec une musique de Darius Milhaud. En 1975, pour la mise en scène de Barrault au Théâtre d’Orsay à Paris (reprise ici), on présente une nouvelle partition de scène de Milhaud composée en 1954. Claudel est scandalisé d’apprendre qu’aucun auteur français n’a consacré un seul texte au découvreur d’Amérique. Il en fait un héros représentant l’Europe entière, celui qui apporta le christianisme aux caciques et qui réunit les peuples de la Terre, justification ultime d’une expédition bénie par Isabelle la Catholique. – Rappellons qu’en avril 1947, Jacques Becker annonça la réalisation cinématographique d’un Christophe Colomb franco-italien dont le scénario provenait de Paul Claudel, produit par la société Universalia (Salvo D’Angelo). Sans suite. Faut-il s’en féliciter ?
1982Cristobál Colón, de oficio... descubridor (ES) de Mariano Ozores
José Frade/Constan Films, 85 min./77 min. - av. Andrès Pajares (Christophe Colomb), Fiorella Faltoyano (Isabelle de Castille), Luis Varela (Fernando II d'Aragon), Maria Kosty (Felipa Moniz Perestrelo, l’épouse de Colomb), Rafaela Aparicio (Aixa, mère de Boabdil), Angel de Andrés (Fère Juan Pérez), Quique Camoiras (Tomás de Torquemada, Grand Inquisiteur), José Carabias (Boabdil el Chico), Alberto Fernández (Juan de la Cosa), Antonio Gamero (Frère Marcelino Camacho de Carabanchel), Antonio Garisa (Domenico Colomb, père de Christophe), Manuel Gómez Bur (le cardinal Francisco Jiménez de Cisneros), Alfredo Mayo (Diego de Deza), Juanito Navarro (Fetuchino), Antonio Ozores (João II de Portugal), Emiliano Redondo (Paolo dal Pozzo Toscanelli), Pedro Valentin (Bartolomé Colomb, frère de Christophe), Zori (Martín Alonso Pinzón), Fernando Santos (Vicente Yáñez Pinzón).
Comédie espagnole de la « transition démocratique », truffée d’anachronismes faciles et de chansons vaudevillesques, tournée à Almeria (Andalousie). Une interprétation humoristique des préparatifs de Colomb, "découvreur de profession", avant son voyage et ses efforts pour convaincre la reine de Castille, manipulatrice, cynique, masculine, vulgaire (un clône féminin de Franco) et son époux, un grand enfant efféminé. Narratrice, Isabelle commence sa présentation de Colomb en se trompant de nom et celui-ci, mentalement dérangé après son retour d’Amérique, a l’apparence physique d’un naufragé. Les renvois à la réalité politique et sociale de l’Espagne post-franquiste pullulent, comme les révoltes autonomistes et le coup d’État raté du lieutenant-colonel franquiste Antonio Tejero en février 1981. Colomb prédit pour le Nouveau Monde un avenir radieux comprenant armes nucléaires, guerre du Vietnam, Neil Armstrong sur la lune, Marilyn Monroe et Elvis Presley, Boabdil dirige un casino, le roi du Portugal se pavane en disc-jockey, Torquemada tient de violents propos antisémites et fait le salut hitlérien en quittant la Cour, etc. Enfin, en débarquant, Colomb découvre une publicité pour Coca Cola et lorsqu’il plante sa bannière dans le sable de la plage, le pétrole jaillit en abondance... Bref, Mariano Ozores voudrait imiter Mel Brooks et Monty Python ; hélas, il ne livre que du cabaret, démonté par la critique mais qui fait rire 1,5 millions de spectateurs dans le pays.
1983® Juana la loca ... de vez en cuando (ES) de José Ramon Larraz. - av. Juanito Navarro (Christophe Colomb).
1983[Animation : Cristóbal Colón – valiente, terco y soñador (BO) de Fernando Laverde ; Fonacine, 63 min.]
1984(tv-df) Cristobál Colón (ES) de Carlos Serrano
Série « Paisaje con figuras », Radio-Televisión Española (TVE 10.10.84), 40 min. – av. Iñaki Aierra (Christophe Colomb), Antonio Gala (présentation). – Docu-fiction.
1984® Stuck on You (US) de Michael Herz, Lloyd Kaufman. – av. Carl Sturmer (Christophe Colomb), Robin Burroughs (Isabelle de Castille).
1984® Orinoko, nuevo mundo (VE) de Diego Risquez. – av. Rolando Peña (Christophe Colomb).
1985(tv-th) Christophe Colomb (FR) de Patrick Martin
(FR3 26.5.85). - av. Armand Arapian/Claude Meloni (Christophe Colomb), Christine Barbaux (Isabelle de Castille), Michel Hubert (Fernando II d’Aragon). - Le drame de Paul Claudel avec une musique de scène de Darius Milhaud (cf. supra, captation de 1976).
Gabriel Byrne (Colomb) et Faye Dunaway (Isabelle) dans la série tv d’Alberto Lattuada (1985).
1985** (tv) Cristoforo Colombo / Christopher Columbus / Christophe Colomb / Christoph Kolumbus (IT/FR/DE/US) télésérie d’Alberto Lattuada [et Giuseppe Vari]
Silvio Clementelli, Anna Maria Clementelli/Clesi Cinematografica-RAI Radiotelevisione Italiana-CBS-Lorimar Telepictures-Antenne 2 (FR2)-Bavaria Atelier GmbH (RAI due 7.-28.3.85), 3 x 120 min. (360 min) / (CBS 19.+20.5.85 /ARD-Das Erste 25.12.85), 316 min. - av. Gabriel Byrne (Christophe Colomb), Faye Dunaway (Isabelle de Castille), Nicol Williamson (Fernando II d'Aragon), Max von Sydow (Joao II de Portugal), Eli Wallach (le cardinal Hernando de Talavera), Mark Buffery (Bartolomeo Colombo), Audrey Matson (Filipa Moniz Perestrelo, femme de Colomb), Virna Lisi (Moniz Perestrelo, mère de Filipa Colomb), Kasimir Berger/Luca Orlandini/Claudio Aliotti (Diego, fils aîné de Colomb), Anne Canovas (Beatriz Enriquez de Arana), Oliver Reed (Martín Alonso Pinzón), Raf Vallone (Mastro Vizinho), Rossano Brazzi (Diego Ortiz de Vilhegas), Massimo Girotti (le duc de Medinacoeli), Michel Auclair (Luis de Santángel), Jean-François Poron (cpt. Alonso de Mardan), Gregory Snegoff (Francisco Pinzón), John Suda (Ruiz), Antonio Marsina (Vicente Pinzón), Elpidia Carrillo (Coana), William Berger (José de Bobadilla), Keith Buckley (De Torres), Mark Buffery (Bartholomeo Colombo), Larry Lamb (Don Castillo), Stefano Madia (Federico), Murray Melvin (Père Linares), Jack Watson (Père Marchena), Hal Yamanouchi (Guacanabo/Guacanagarix, cacique Taino), Patrick Bauchau (Don Rodrigo), Sal Borgese (Juan), Alexander Lopez (Diego Taino), Francesco Lattuada (Rodrigo de Triana), Keith Buckley (Luis de Torres, l’interprète), Fabiola Toledo (Doña Maria de Toledo, fiancée de Diego Colomb), Josefina Vetencourt (Clara de Moya).
Précisons d’emblée que cette mini-série n’est pas un projet personnel d’Alberto Lattuada, un cinéaste particulièrement éclectique qui introduisit jadis Fellini dans la mise en scène, tour à tour calligraphe (soin maniaque du décor et des détails de cadrage), néoréaliste, littéraire (Gogol, Pouchkine, Tchékhov, Machiavel), érotomane subtil, fin psychologue et satiriste féroce ayant dirigé dans les années 1940-60 les plus grandes stars du cinéma italien. Lorsque le producteur romain Silvio Clementelli lui propose ce mégaprojet pour le petit écran, Lattuada, 71 ans, est en fin de carrière et n’a jamais travaillé pour la télévision, médium dont les limitations visuelles l’ont toujours dérangé. Pourtant, esprit humaniste et foncièrement libertaire, il se passionne pour le « cas » Colomb au fil de ses nombreuses et érudites lectures, découvrant en ce dernier un navigateur phénoménal et dans ses expéditions la « victoire d’une erreur sublime » (le calcul concernant la circonférence terrestre que lui reprochaient à raison les savants espagnols opposés à son aventure). Pour pallier la complexité de la matière, Lattuada s’assure la collaboration du dramaturge turinois Tullio Pinelli, le fidèle scénariste de tous les films de Fellini, de Luci de varietà en 1950 à La voce della luna en 1990. Clementelli gère cette coproduction internationale de 15 millions $ initiée par la RAI à Rome mais financée en majeure partie par des capitaux américains d’IBM, avec l’appui de Lorimar Pictures et CBS Television (New York). Sans doute est-il encouragé par le succès cathodique mondial de la toute récente série sur Marco Polo de Giuliano Montaldo (également initiée par la RAI mais financée par Procter & Gamble) ; ce même Marco Polo, d’ailleurs, dont les récits sur l’Asie ont tant appâté et motivé Colomb. À l’affiche figurent l’Irlandais Gabriel Byrne (révélé grâce à Hanna K. de Costa-Gavras) dans le rôle-titre, entouré d’une impressionnante garniture de vedettes de cinéma : Faye Dunaway (oscarisée avec Network de Sidney Lumet), Oliver Reed, Max von Sydow, Eli Wallach et les Italiens Rossano Brazzi, Raf Vallone, Massimo Girotti et Virna Lisi. Le tournage - en anglais – s’étend sur sept mois à partir de janvier 1984, dont trois aux Mediterranean Film Studios à Malte (Il-Kalkara) où sont construites les répliques des caravelles, deux mois en Espagne (Andalousie, Açores et Canaries, île de La Gomera vers Santa Cruz de Ténérife), enfin deux à Saint-Domingue (République Dominicaine). Le chef-opérateur Franco Di Giacomo a travaillé avec Bertolucci, Leone, Bellochio et les frères Taviani. Pour la seconde équipe chargée de filmer les échauffourées et actions militaires, Lattuada se fait seconder par le réalisateur Giuseppe Vari, bien connu des amateurs de péplums (les Visigoths d’Alaric dans La vendetta dei barbari en 1960, les Vikings de I Normanni en 1962, les zombies de Roma contro Roma en 1964 et autres joyeux nanars).
Le résultat de ces efforts se présente sous forme d’une série de six heures en trois parties, la première contant les difficultés de Colomb à monter son expédition au Portugal comme en Espagne ; on le découvre en 1476, seul rescapé d’un navire génois en flammes détruit par les Français, puis hébergé par des pillards gitans ; il séjourne en Afrique portugaise où il assiste à l’exécution d’esclaves noirs, puis, une fois passé en Espagne après le décès de son épouse, il est témoin des « grâces » de l’Inquisition qui condamne une poignée d’hérétiques au bûcher. A Palos en été 1492, il peine à réunir un équipage constitué de la vermine de la société locale (juifs exclus), peu encline à se risquer vers l’inconnu, et Lattuada rend tangible l’angoisse du départ à terre comme sur les navires (on prie dans les églises), mais aussi la défiance de l’entourage (« il grimpe bien pour un homme qui a passé sept ans à genoux », murmure-t-on lorsque Colomb se hisse au sommet du mât). À bord, se renfrognent quelques bien-nés, « ça pue l’ail et les sardines salées ». Une plongée révèle les trois minuscules embarcations perdues dans un océan sans fin, après avoir semé des vaisseaux de guerre chargés de les couler sur ordre secret de João de Portugal (Max von Sydow), monarque sournois et sans scrupules, mais néanmoins admiratif. Le deuxième volet relate les deux premiers voyages et les errances dans l’archipel des Antilles pour trouver les trésors promis à la Couronne, cela sans ne jamais aborder la terre ferme du continent américain. La troisième partie illustre les difficultés croissantes de Colomb, ses conflits d’autorité de plus en plus dramatiques avec les indigènes, ses capitaines et ses conseillers militaires, l’intervention musclée du plénipotentiaire Bobadilla, le retour du navigateur en chaînes, la réhabilitation royale, un quatrième voyage miné par une santé précaire et le décès à Valladolid, oublié par tous (ce qui est faux). Isabelle morte, Fernando reconnaîtra plus tard les mérites de Colomb en nommant son fils Don Diego gouverneur, puis vice-roi des Indes.
Colomb refuse d’assister au massacre des caciques qui s’opposent aux travaux forcés (Lattuada, tv 1985).
 Comme le travail plus didactique de Cottafavi en 1968 (cf. supra), la durée du spectacle – cette fois en couleurs – permet de développer de nombreux épisodes négligés à l’écran ou à peine évoqués jusqu’alors. Conscient qu’il s’adresse à un très large public, Lattuada opte pour une imagerie majestueuse, une certaine flamboyance visuelle dans les archipels, tout en renonçant à ses pirouettes artistiques et se permettant de menues libertés dans la dramatisation (c’est par ex. Beatriz Enriquez qui refuse d’épouser le père de son fils Hernando pour ne pas perturber sa mission providentielle et devoir séjourner à la Cour comme le souhaiterait la reine). La relation du navigateur avec sa principale alliée en Espagne – Faye Dunaway, rarement aussi belle (près de 30 minutes à l’écran) – laisse percer un trouble sensuel partagé, même si le souci avoué d’Isabelle reste les âmes à sauver ; son époux Ferdinand, pragmatique, opportuniste, insensible aux affabulations du Génois, est à l’instar de son entourage surtout concerné par les possibles gains matériels de l’aventure. Le récit s’axe en particulier autour de trois adversaires topiques. D’un côté le riche armateur Martín Alonzo Pinzón (v. 1441-1493) de Palos de la Frontera qu’interprète Oliver Reed, capitaine désobéissant, déloyal puis rival déclaré de Colomb qu’il trahit en lui faussant compagnie à bord du meilleur navire de la triade, la Niña, pour retourner le premier en Espagne avec sa propre récolte de richesses et d’esclaves ; il ne survit pas à son échec, son cœur le lâche (en réalité, il mourut de la fièvre). L’autre ennemi mortel est le fanatique père Linares du Saint-Office (personnage fictif, lui) qui refuse de baptiser les caciques (« christianiser l’ennemi empêche leur exploitation ») et qui calomnie à la Cour cet « impudent roturier étranger, probablement un juif converti, nourrissant une rancœur contre le sang noble espagnol » ; raciste, irrité par le mélange et la cohabitation ethniques entre marins et femmes indigènes qui se développe sous ses yeux (Lattuada esquisse même une tragique idylle interraciale), le clerc se console en songeant que « plus la faveur est grande, moins elle dure ». Quant à Guacanabo (ou Guacanagari), chef Taino, il est d’abord l’allié inconditionnel de Colomb, puis se retourne contre tout ce qu’il représente. Dans la jungle d’Hispañola, Colomb, embarrassé mais étrangement passif sinon lâche, détourne la tête et laisse ses soldats massacrer les Indiens insurgés avec mousquets et cavalerie, incendier les villages, violer les femmes ; la syphilis se propage. Rebelles à l’autorité de leur gouverneur (« on n’insulte pas des soldats en les traitant d’assassins »), les hidalgos estiment que « leurs hommes ont légitimement profité des bienfaits de la Providence ». Réalisant qu’il ne peut ni nourrir les prisonniers caciques, ni les libérer ni les exécuter, Colomb ordonne de les livrer au marché des esclaves à Séville « où ils pourront devenir des chrétiens et rapporter de l’or ». Alors qu’il est ramené à son tour en chaînes en Espagne, le gouverneur manqué revoit une dernière fois Guacanabo esclave et malade. Peu avant de décéder, Isabelle convoque Colomb pour le remercier d’avoir donné au royaume « un nouveau monde, sans limites » et alors qu’il se plaint de la désobéissance de ses sujets, elle s’avoue impuissante et lui conseille de « satisfaire leur soif de l’or » s’il veut sauver ses découvertes.
En cours de tournage, Gabriel Byrne se plaint du fait que si l’on connaît en détail les exploits du navigateur, l’homme Colomb reste pour lui un mystère, affirmant pour sa part que le véritable découvreur de l’Amérique était le saint abbé et missionnaire irlandais Brendan au VIe siècle... Lattuada voit surtout en Colomb une figure tragique, sur le plan individuel mais aussi collectif, ses explorations constituant la moelle-même d’une colonisation génocidaire, fruit d’une logique aussi perverse qu’inévitable dont il ne veut pas se sentir responsable (« mon but est clair : l’or pour l’État, les âmes pour l’Église »). L’explorateur pressent toutefois les expéditions de Cortez et de Pizzarro et la disparition de civilisations entières, « une tragédie préannoncée dans cette série, souligne le cinéaste, et déjà partiellement appliquée par Colomb lui-même et ses capitaines sur les indigènes des Caraïbes. L’activité esclavagiste des Espagnols eut pour conséquence immédiate l’interruption de l’activité agricole par les indigènes qui, engagés dans leur révolte, ne se souciaient plus de s’occuper de la terre, ruinant leur principale richesse. L’esclavage était une solution cynique, surtout pour quelqu’un comme Colomb, qui se disait catholique et qui l’était peut-être au fond de son cœur, mais une solution sans alternative » (I film di Alberto Lattuada de Callisto Cosulichi, Gremese, Rome, p. 125). Le cinéaste publiera ses souvenirs de tournage dans un livre (Cristoforo Colombo : diario di bordo co-écrit avec Brizio Montinaro, Mondadori, 1985.)
Encadré par la sortie de diverses publications savantes et/ou populaires ainsi qu’une vaste campagne éditoriale sous l’égide de Mondadori, le lancement de la série en Italie a lieu à bord du paquebot Achille Lauro en présence de 300 membres de la presse internationale (29 février-2 mars). Au départ, la RAI avait vivement souhaité associer la télévision espagnole (TVE) au projet, mais à la lecture du scénario, Madrid refusa d’y participer, alléguant des « erreurs historiques inacceptables » et une tendance générale antiespagnole ; l’idéologie du passé n’est pas enterrée, la transition démocratique du régime après la mort du caudillo en 1975 est encore « pactée » entre le secteur réformiste des franquistes et les forces d’opposition dont les mains sont liées par une loi d’amnistie face aux crimes du passé. L’ambassadeur d’Espagne en Italie n’ayant pas été invité à la première festive de la série au Teatro Marguerita à Gênes (parrainée par le président de la République Sandro Pertini) et certains journaleux ibériques parlant d’une « découverte de l’Amérique opérée malgré les Espagnols », la TVE a même refusé de diffuser la série. En revanche, les régions en conflit avec Madrid comme la TV3 catalane (Barcelone) et la chaîne basque (Euskal Telebisca) à Bilbao se font un malin plaisir de la programmer dans tout le nord du pays, estimant au contraire – et à raison - que « les discrépances historiques sont minimes ». Aux États-Unis, la version diffusée par la CBS est amputée d’une vingtaine de minutes de crainte de s’aliéner les intégristes catholiques et les suprématistes des États du Sud : disparaissent toute illustration des crimes de la colonisation, tortures des indigènes, exécutions et pillages qui pourraient réveiller de vieux démons. Preuve que la télésérie de Lattuada, fût-ce sous une forme plus consensuelle que celle de Cottafavi, est bien à la hauteur de ses ambitions. Modèle en son genre, elle reste en bonne place dans le souvenir des cinéphiles. – ES (Tv Cataloña 26.9.85) : Cristóbal Colón.
1986® (tv) Le Printemps (FR) de Pierre Cavassilas [d’apr. Denis Guénoun] (TF1 23.7.-13.8.86), 4 p. – av. Laurent Davy (Panfilo de Narvaez), Philippe Granarolo (Christophe Colomb), Josiane Carle (Isabelle de Castille). – Fresque couvrant l’Europe des années 1527 à 1541.
1987[Animation : (tv) Les Aventures de Christophe Colomb (FR) de Thibault Chatel, AB Productions (Paris)-TF1, 62 min.]
1989(vd-mus) Cristóbal Colón (ES) de Tito Capobianco
Gran Teatre del Liceu, Barcelona (TVE 24.9.89), 118 min. – av. José Carreras (Christophe Colomb), Montserrat Caballé (Isabelle de Castille), Stefano Palatchi (Fernando II d'Aragon), Victoria Vergara (Beatriz Enríquez de Arana), Carlos Chausson (Martin Alonso Pinzón). – Captation vidéo de la première de l’opéra Cristóbal Colón / Christopher Columbus (1986) en deux actes du compositeur catalano-américain Leonardo Balada qui conte la première traversée de Colomb en flash-backs (livret d’Antonio Gala). En 1996, Balada composera une suite, La Muerte de Colón / Death of Columbus.
1991® (tv) Réquiem por Granada / Granada, addio / Die Löwen der Alhambra (ES/IT/DE/AT) de Vicente Escrivá. - av. Juanjo Puigcorbe (Christophe Colomb), Juan Jesus Perez Sanchez (Juan Ponce de León), Marita Marschall (Isabelle de Castille), Pedro Díez del Corral (Fernando d’Aragon). – cf. chap. 2.1.
George Corraface découvre le Nouveau Monde malgré la menace de Marlon Brando (1992).
1992Christopher Columbus : The Discovery / Cristóbal Colón : El Descubrimiento (Christophe Colomb, 1492, un rivage inconnu / Christophe Colomb : La Découverte) (GB/US/ES/[PA]) de John Glen
Alexander et Ilya Salkind, Robert Simmonds, Jane Chaplin, Maria Monreal/Christopher Columbus Productions, Inc. (Panama)-Sociedad Estatal Quinto Centenario (Madrid), 121 min./116 min. - av. Marlon Brando (Thomas de Torquemada), Tom Selleck (Fernando II d'Aragon), George Corraface (Christophe Colomb), Rachel Ward (Isabelle de Castille), Robert Davi (Martin Alonso Pinzón), Catherine Zeta Jones (Beatriz Enríquez de Arana), Oliver Cotton (Diego de Arana, son cousin), Benicio del Toro (Alvaro Harana, son fils), Mathieu Carrière (João II de Portugal), Simon Dormandy (Bartolomé Bives), Michael Gothard (l’espion de l’Inquisition), Branscombe Richmond (le chef indien), Christopher Chaplin (Rodrigo de Escobedo), Manuel de Blas (Vicente Pinzón), Oliver Cotton (Pedro de Arana, frère de Beatriz), Geneviève Allenbury (la femme d’Arana), Glyn Grain (Juan de la Cosa), Peter Guinness (Frère Juan Pérez), Nigel Terry (Roldán), Nitzan Sharron (Benjamin), Steven Hartley (Pedro de Terreros), Hugo Blick (Antonio de Torres), Nigel Harrison (Gonzalo), Christopher Hunter (Morales), Clive Arrindel (Don Guarco), Caleb Lloyd / Andrew Dicks (Diego Colomb), Steven Fletcher (Rodrigo de Triana), Richard Cubison (Isaac), Mark Long (Joseph), Nicholas Selby (Monsignor Camos), John Grillo (le géographe de Chios), Serge Malik (l’alcalde de Malaga), Tailinh Forest Flower [=Tailinh Agoyo] (la fille indienne), Steven Fletcher (Rodrigo de Triana).
En 1992, l’UNESCO exige que la commémoration des 500 ans de la traversée de Colomb se fasse sous le label baptisé « Rencontre de Deux Mondes », car on n’a rien découvert, sinon des cultures qui existaient déjà. Emblématique de l’esprit d’ouverture de la Renaissance, le navigateur porte aussi la culpabilité du monde occidental et s’attire la haine des peuples indigènes d’Amérique, tandis que les Afro-Américains lisent dans 1492 les prémices de la traite des Noirs. De son côté, le Conseil National des Églises nord-américaines déclare qu’à présent l’heure n’est plus à la célébration, mais à la réflexion et à la repentance. En Espagne devenue pleinement démocratique, la notion de la soi-disante « légende noire » antiespagnole est éradiquée, la critique du passé conquérant est admise sinon encouragée et des cinéastes comme Saura, Almodóvar, Erice, Aranda, Trueba ou Amenábar s’en chargent.
Pour néanmoins marquer l’événement historique à l’écran, deux projets rivaux se pressent au portillon avec l’appui des autorités ibériques. Le premier est du clan Salkind, entreprise familiale battant pavillon panaméen, et le second du Britannique Ridley Scott (cf. infra). Producteurs franco-russes à passeport mexicain et établis en Suisse et en Floride, risque-tout incultes et pas toujours fiables, Alexander et son fils Ilya Salkind ont fait fortune grâce à la franchise des Superman avec Christopher Reeve (1978 à 1983), suivi de Superwoman ; à leurs yeux, Cristopher Columbus : The Discovery contera la grande aventure d’un supernavigateur, réalisé par George Pan Cosmatos (Rambo II), avec Timothy « 007 » Dalton et Isabella Rossellini en reine. Mais le scénario imposé fâche, le trio claque la porte et la direction est remise in extremis à John Glen, qui a signé 8 James Bond, dont 3 comme réalisateur de seconde équipe : les cascades en cascade, ça le connaît ! Salkind veut un film d’aventures à la Robin des Bois, une « success story », dit-il, qui amuse aussi les enfants, surtout « no politics » et « nothing heavy ». En tête d’affiche, Marlon Brando en adipeux Grand Inquisiteur Torquemada. Il reçoit 5 millions de $ pour apparaître dix minutes à l’écran, grimé en noir comme la mort dans un épisode fantaisiste. Politiquement engagée pour la cause des Amérindiens, la supervedette a accepté de participer contre la promesse que le scénario soit réécrit et que Colomb y apparaisse comme un ambitieux sans scrupules, complice de l’extermination des Indiens. Mais une fois les scènes avec Brando à Madrid enregistrées, Salkind père jettera les propositions révisionnistes de la star à la corbeille (contre l’avis de son fils) et Brando exigera en vain que son nom soit retiré du générique. Après avoir envisagé Mel Gibson, Richard Gere, Michael Douglas et Willem Dafoe, la production confie le rôle-titre à un presqu’inconnu, le « Latin Lover » franco-grec George Corraface, formé par Peter Brook (il a débuté à l’écran dans son Mahabharata).
S’il veut battre le projet rival de Scott, Glen a 55 jours pour mettre son film en boite, avec un budget de 48 millions de $ (Panavision et Technicolor). Le comité de la « Sociedad Estatal Quinto Centenario España 1492-1992 » prête exclusivement au duo Salkind les trois répliques des caravelles ancrées à Palos de la Frontera. Le premier clap tombe à la fin novembre 1991 dans les bassins du Mediterranean Film Studio (Fort San Rocco) à Malte, suivi de prises de vues aux Îles Vierges américaines (Caraïbes, parc national de San Juan), en Espagne à Madrid (Talamanca de Jarama), Guadalajara (Castillo de Sigüenza), Huelva (Mazagón) et à Ségovie, au Portugal (Cabo Espichel, Reguengos de Monsaraz), enfin aux studios de Pinewood à Londres ; une deuxième équipe a déjà filmé dès fin août des extérieurs en mer et sur l’île de Gomero, près de Puerto Rico. Quant au script, il porte deux signatures célèbres, celle du romancier Mario Puzo, auteur de renommée mondiale et scénariste oscarisé des trois Godfather/Le Parrain de Coppola, et celle de John Briley, Oscar pour le Gandhi d’Attenborough. Et pourtant, ce qu’on découvre à l’écran est ahurissant :
En quête de rares cartes de navigation turques, Colomb arrive vers 1480 sur l’île grecque de Chios, en mer Égée, où, tel Errol Flynn, le sourire éclatant, le jeune coq croise le fer et le poignard dans le souk avec des brigands ottomans. Il gagne Lisbonne avec son fils Diego et, grâce à son frère, obtient une audience auprès du roi João ; celui-ci se montre méfiant et tente de s’accaparer les précieuses cartes. Dans la nuit, Colomb et son fils s’enfuient en Espagne, poursuivis par des soudards du souverain. Coups d’épée. Gonzalo, un des agresseurs blessés par Colomb, jure vengeance. En attendant l’accord des Rois Catholiques, Colomb vit chez son vieil ami Diego de Arana à Séville et s’éprend de la cousine de ce dernier, la belle Beatriz. Il travaille pour un cartographe hébreu (inventé) et prend la défense des juifs persécutés (autre invention). Un soir, il est tiré de son lit par les sbires de l’Inquisition, puis malmené et interrogé par Torquemada qui cherche à le faire brûler pour son raisonnement trop scientifique, mais sa vive intelligence et son à-propos le sauvent (en réalité, les deux ne se sont jamais rencontrés). Quand, une fois les affreux Maures en chaînes, l’Espagne devient enfin totalement chrétienne, le couple royal reçoit le navigateur dans l’Alhambra et, la reine, séduite par ce joli cœur, lui donne son pendentif et l’autorise à partir. Ne trouvant pas d’équipage en dehors de son ami Arana, le nouvel amiral se sert dans les geôles de la prison locale, ignorant qu’à bord se trouvent l’espion Gonzalo et son acolyte, la brute Roldán, chargés de sabotage (une allusion à l’administrateur Francisco Roldán Jiménez, chef de la rébellion contre Colomb à Hispañola, v. 1450-1502). L’œil torve, Gonzalo l’a surpris dans la cabine en train de faire l’amour avec Beatriz. Pinzón est du voyage, dévoré par la jalousie, de même que le mousse juif Benjamin et le jeune Alvaro qui hait son père Arana, celui-ci l’ayant défiguré jadis, et qui veut régler ses comptes avec lui. Pendant la traversée, Colomb sème les navires portugais lancés à ses trousses et découvre une tentative de sabotage sur la Pinta ; Gonzalo est démasqué, attaché au mât et assassiné dans la nuit par son complice Roldán. Puis c’est le calme plat. À l’équipage qui se mutine (encouragé par Pinzón), Colomb promet de se laisser décapiter si aucune terre n’est en vue dans les 72 heures. La nuit, tandis que les marins sont fascinés par feu de Saint-Elme, Colomb surprend Roldán cherchant à violer le mousse juif et, après un combat singulier, l’abandonne aux requins. Le troisième jour, Colomb et Arana sont prêts à mourir sur le billot, suspense, Alvaro attend avec sa hache, quand enfin une île surgit à l’horizon. Les caciques de San Salvador couvrent les intrus de bijoux précieux et semblent ouverts à la nouvelle religion, leurs femmes sont jolies et exhibent généreusement leurs seins nus. Mais la Santa María coule après une tempête et son équipage doit rester sur l’île sous les ordres d’Arana. Quant à Colomb, il retourne en Espagne avec la Niña, cherchant à rattraper Pinzón qui s’est éclipsé à bord de la Pinta, les coffres chargés d’or et qui veut usurper la gloire de son amiral. À San Salvador, Alvaro tue son père d’un coup d’épée et déclenche la guerre générale avec les Indiens qui lui font un sort, ce qui ne présage rien de bon. (En vérité, Arana était en charge du Fort Navidad au départ de Colomb et fut massacré avec ses 38 compatriotes par les Indiens kalinago de Caonabo.) Mais qu’importe, puisque Super-Colomb de Sherwood Forest arrive le premier en Espagne – Pinzón succombe à la fièvre - et offre, sans une ride et tout sourire, les trésors du « Nouveau Monde » aux Rois Catholiques, qui sont très reconnaissants, surtout Isabelle. Happy End.
Dans son approche, son enchaînement d’aventures décontractées et son traitement caricatural, le film a 30 ans de retard. Néanmoins, euphorique en visionnant les rushes, Alexander Salkind annonce une suite : *Columbus 2 – Diego’s Story. On frémit dans les coulisses. Mais Christopher Columbus : The Discovery sombre corps et biens au box-office américain, malgré son honnête facture technique, comptabilisant des entrées de seulement 8 millions de $, soit un sixième des fonds investis. Ilya Salkind et son épouse Jane Chaplin (fille de Sir Charles) se retournent contre leur père Alexander, l’accusant de rupture de contrat, d’escroquerie et de chantage : les factures impayées font nombre, les avocats jubilent, la presse ricane. Leur production décroche un Razzie Award (Golden Rasperry Award) 1993, parodie américaine de récompenses de cinéma se déroulant la veille de la remise des Oscars, pour « le pire acteur de l’année (Tom Selleck) », suivi de cinq nominations pour « le pire film, le pire second rôle (Brando), le pire réalisateur, le pire scénario et le pire nouveau venu (Corraface). » Le Stinkers Bad Movie Award (Los Angeles) de 1992 le nomine également comme le plus mauvais film. En Europe, les distributeurs français le refusent et son exploitation reste largement confinée au marché vidéo VHS ou au petit écran. À ce titre seulement : une rareté. - DE : Christopher Columbus, der Entdecker, IT : Cristoforo Colombo : la scoperta.
Colomb (Gérard Depardieu) perplexe face aux « bons sauvages » du film de Ridley Scott (« 1492 »).
1991/92* 1492 : The Conquest of Paradise / 1492 - Christophe Colomb / 1492 - La conquista del paraiso (GB/FR/ES/[US]) de Ridley Scott
Ridley Scott, Alain Goldman, Roselyne Bosch, Marc Boyman, Pere Fages/Gaumont Film Company-Légende Productions (Paris)-France 3 Cinéma-Percy Main Productions (R. Scott)-Due West Productions-CYRK Films S.A. (Madrid)-Touchstone Corporation N.V.-[Paramount Pictures], 162 min./USA: 153 min. - av. Gérard Depardieu (Christophe Colomb), Sigourney Weaver (Isabelle de Castille), Armand Assante (Gabriel Sanchez, trésorier de la Couronne), Fernando Rey (Antonio de Marchena, astronome à La Rábida), Fernando García Rimada (Fernando II d’Aragon), Mark Margolis (Francisco de Bobadilla), Angela Molina (Beatriz Enríquez de Arana), Michael Wincott (Adrián de Moxica), Arnold Vosloo (Hernando de Guevara), Albert Vidal (le cardinal Hernando de Talavera), Tchéky Karyo (Martin Alonso Pinzón), Angela Rosal (sa femme), Silvia Montero (sa fille), Frank Langella (le banquier Luis de Santángel), Kevin Dunn (cpt. Diego Méndez), Kario Salem (Arojaz), Loren Dean / Billy L. Sullivan (Hernando Colomb adulte /10 ans), John Heffernan (Frère Bernal Buyl/Bernardo Boíl), Steven Waddington (Bartolomeo Colomb), Fernando Guillén Cuervo (Giacomo Colomb), José Luis Ferrer (Alonso de Bolaños), Bercelio Moya (Utapan, l’interprète), Alejandrino Moya (le chef Guarionex), Florin Moya (le chamane), Juan Diego Botto (Diego Colomb), Achero Mañas (le mousse), Isabel Prinz (Dueña), Jack Taylor (Vicuna).
« La découverte de l’Amérique n’a pas porté chance à Colomb, et lui-même n’a pas porté chance à l’Amérique... », telle est la conclusion lapidaire de Ridley Scott une fois 1492 : The Conquest of Paradise achevé. C’est Alexandre Salkind, producteur de Christopher Columbus : The Discovery (cf. supra), qui a d’abord offert la direction de son film au fameux cinéaste britannique. Celui-ci a refusé, étant lui-même déjà affairé à sa propre version de la découverte des Amériques, initiée en 1987 par le Français Alain Goldman, bras droit de Marin Karmitz, et basée sur les recherches ainsi qu’un script de sa compagne Roselyne Bosch (alors journaliste au Point). Scott n’est que le cinquième choix de Goldman : Francis Ford Coppola, Roland Joffé, Oliver Stone et David Puttnam ont tous décliné. Scott, lui, est un passionné d’histoire (son premier film, The Duellists, drame situé sous Napoléon, avait été primé au Festival de Cannes 1977) ; il veut offrir une spéculation intelligente sur ce qui est arrivé dans les Caraïbes, démystifier une icône et restituer, avec précision mais sans égards, l’Espagne fanatisée de l’époque. Le cinéaste s’est fait une belle réputation d’illustrateur surdoué et sérieux avec deux incontournables de la science-fiction, le traumatisant Alien (1979) et Blade Runner (1982), puis, récemment, avec l’ode libertaire féministe Thelma and Louise (1991), mais il n’a pas encore fait ses preuves dans le cinéma d’Histoire comme le péplum Gladiator (2002) ou la fresque médiévale Kingdom of Heaven (2005), virulente dénonciation des Croisades. La mise en chantier de cette production indépendante en priorité anglo-française, d’abord intitulée simplement Columbus, est prévue pour sortir mondialement la semaine du 12 octobre 1992, soit un demi-millénaire, jour pour jour, après le débarquement du Génois sur l’île de Guanahani. Son financement se fait sans immixtion d’Hollywood – le sujet est risqué, les studios américains sont frileux - par prévente à la distribution (Gaumont, Paramount) pays par pays, avec le soutien de Jack Lang et des Ministères de la Culture à Paris et à Madrid.
Scott a accepté la tâche à la condition sine qua non d’obtenir Gérard Depardieu et ce dernier, ayant consenti sans hésiter, possède certes l’envergure, la passion, l’énergie colossale et le rayonnement indispensables au rôle (mais pas le nez aquilin). Hélas, il dit ses dialogues anglais avec un accent français très marqué ; on sait que Colomb parlait un espagnol à forte coloration italo-portugaise, mais avec Depardieu qui (de son propre aveu) ne comprenait pas tout ce qu’il dit, ses propos seront parfois incompréhensibles pour l’Américain lambda et nuiront à la carrière du film outre-Atlantique (« dee lund eez closh » signifiant « the land is close », ironise la presse yankee). Pour Isabelle, Scott a souhaité son amie Sigourney Weaver (ou Anjelica Huston, voire Glen Close au cas où sa star d’Alien n’était pas disponible). Salkind menace Scott d’un procès si ce dernier utilise dans le titre de son film le patronyme du navigateur - dont il se serait légalement (?) réservé l’exclusivité.
Le tournage (de décembre 1991 à mars 1992) se déroule aux studios britanniques de Pinewood, puis en extérieurs en Espagne, à Cáceres (Santa María, l’autodafé à Plaza de San Jorge), Trujillo, Salamanque (couvent-cathédrale de San Esteban), Séville (Casa de Pilatos, Reales Alcázares), et surtout à Costa Rica, à Playa Herradura, dans les environs de Jacó (côte ouest du Pacifique) et sur les rives du Tulín. Scott y fait établir trois villages indiens, une mine d’or, le port de Palos et la petite ville d’Isabela sur 80'000 mètres2 où l’on dresse une cathédrale, un hôtel de ville, des casernements, une prison et la résidence de Colomb. Les répliques de la Santa María et de la Pinta sont construites à Bristol, celle de la Niña à Bahia par la Fundação Columbus brésilienne et directement dirigées sur Costa Rica. Les six principaux personnages indiens sont interprétés par des Waunanas colombiens qui ont déjà figuré dans The Mission de Roland Joffé en 1986. Résultat : Scott fabrique le biopic cinématographique le plus long – 162 minutes - consacré à Colomb.
Le scénario, parfois bancal et appliqué, mais autrement plus ambitieux que le ciné-photo-roman traficoté par Mario Puzo pour les dollars de Salkind, reprend les étapes connues. Hernando Colomb s’y remémore la vie de son papa décédé et son récit en flash-back débute en 1491 sur les rives de l’Atlantique... où Colomb explique à son fils cadet, enfant naturel de 10 ans, pourquoi la terre est une sphère, puis il rend visite à son autre fils, Diego, confié aux éducateurs franciscains de La Rábida, avant de se préparer à affronter les experts de l’université de Salamanque. À Séville, il assiste avec son fils à l’atroce exécution publique d’hérétiques par l’Inquisition. Au lendemain de son échec à l’Académie, Pinzón, armateur de Palos, et le banquier Luis de Santángel emmènent le navigateur auprès des Rois Catholiques, qui finissent par donner leur feu vert. Après une traversée bien plus longue qu’annoncée, après la découverte de San Salvador suivi du premier contact avec les indigènes terrés dans la forêt et le naufrage de la Santa María, Colomb rentre en Espagne, laissant 39 hommes dans le fort de la Navidad. (Erreur : Colomb rentre avec trois navires, alors que la Santa María a fait naufrage.) Une année plus tard, revenant en ordre de marche militaire avec régiments, clercs, artisans, chevaux et bétail, il découvre le fort en ruines et les squelettes de ses hommes tués par une tribu étrangère. Les explications des Indiens Taïnos, qui ont la confiance et le respect de Colomb, ne convainquent pas les lieutenants, dont l’arrogant hidalgo Adrián de Moxica : ils veulent voir le sang des « macaques » couler. Alors que Colomb achève l’édification en dur de la colonie de La Isabela, première ville du Nouveau Monde, et fait hisser une gigantesque cloche dans la nouvelle cathédrale, Moxica et ses amis font sécession et déclenchent les hostilités. Ils sont traqués dans la jungle par Colomb et les Taïnos ; Moxica se suicide (en réalité il fut pendu) tandis que les principaux opposants sont garrottés en place publique. Colomb, surnommé ironiquement « le gouverneur des moustiques », compromet son autorité en obligeant les nobles à travailler et ne la maintient qu’en châtiant les opposants. Moxica ayant tranché la main d’un cacique qui ne ramenait pas de métal jaune, Colomb en vient à souhaiter l’introduction d’esclaves africains. Ses ennemis à la Cour lui reprochent son échec : il ne ramène ni or ni paradis terrestre, et il s’est montré un chef incompétent, secondé par des frères qu’il a trop favorisés. Remplacé par Bobadilla, Colomb est emprisonné, puis libéré par la reine. Il se voit même dépossédé de sa réputation par son compatriote florentin Amerigo Vespucci qui, lui, a découvert le continent (et non les îles) et lui aurait donné son nom d’Amérique. Une dernière expédition avant de mourir lui fait découvrir les côtes est du Panama, où des Indiens lui signalent l’existence d’un océan à l’ouest.
Cela dit, même chez Ridley Scott, Colomb reste un héros qui affronte l’ignorance de son époque : on le voit se mettre en colère près d’un globe terrestre en s’exclamant « on nous a raconté que ça, c’est plat ! ». Le film sort à la date prévue, simultanément sur 5000 écrans, dont 800 aux États-Unis, et doublé en six langues. Comme on pouvait s’y attendre, le sens visuel très marqué de Scott (peintre de formation), son esthétique du « tout pour l’image » séduisent les uns mais irritent un peu partout une presse plus pointue et/ou les allergiques au cinéma-spectacle, agacés par la somptuosité trop décorative de l’épopée, sa « joliesse publicitaire », ses « effets tape-à-l’œil », son « esbroufe », ses « caravelles glissant sous des ciels filtrés en rouge ou gris plomb » et y voient, pour résumer, « un film-bateau qui confond vision et panavision, une grande fresque évangélique où le soleil se couche tous les quarts d’heure » (Le Nouveau Quotidien, 16.10.92). Certes, tout ambitieux qu’il soit, 1492 : The Conquest of Paradise déçoit à première vue par son ton ampoulé (ce que souligne la musique facilement envahissante de Vangelis). Les cadrages flamboyants y rivalisent avec le goût prononcé de Scott pour l’hyperréalisme, censé restituer ici un siècle d’obscurantisme féroce, une société brutale (le supplice du garrot où l’on insiste longuement sur la langue écumante des torturés, la chair brûlée dans les flammes des bûchers, le tout servi en gros plans gore, etc.), éléments que le cinéaste introduit au détriment du narratif, qui l’étirent inutilement et, à l’occasion, déséquilibrent le récit. Depardieu, quoiqu’emporté et autoritaire, donne du souffle à la voilure, mais ne peut s’empêcher d’humaniser son personnage, d’en faire un rêveur à la fois caractériel et intrépide.
On peut être choqué par l’édulcoration de son Colomb, montré soucieux du respect dû aux indigènes, du moins dans ses discours. Au premier abord, le scénario reflète en effet l’autoportrait du navigateur transmis par son hagiographe de fils, récusant toute responsabilité dans les bains de sang en Jamaïque et faisant de l’aristocrate basque Adrián de Moxica/Mojica (1453-1499) comme de son complice-administrateur Francisco Roldán Jiménez (v.1450-1502) des caractériels dangereux, cruels et hyperviolents, sa nemesis à l’autre bout de la Terre. On ne voit pas non plus Colomb ramené en Espagne en chaînes sur ordre de Bobadilla et ses propres erreurs, lâchetés ou violences ne sont jamais mis clairement en évidence (le coup des mains coupées des mauvais travailleurs semble être son idée, et sera reprise trois siècles plus tard par le roi Léopold Ier de Belgique au Congo). Soit, l’écran le montre tourmenté par les remords d’avoir failli à la construction du paradis, mais, ironise un peu facilement Jean-Jacques Bernard, « cette culpabilité nous est servie comme une messe ayant Colomb pour officiant. On ne le montre pas bigot lui-même, mais tellement juste et bon, anéanti d’amour pour son prochain, admonestant les nobles comme Jésus les pharisiens. Bref, ce qu’il découvre, ce n’est pas le Nouveau Monde, mais le Nouveau Testament (...). À force de multiplier les points de vue photographiques, le film manque d’un point de vue tout court » (Première, oct. 1992). Et Libération de fulminer : « Voici un Colomb à deux doigts du ‘politiquement correct’, bardé de tous les visas consensuels possibles » (12.10.92). N’empêche, 1492 : The Conquest of Paradise sort d’abord dans l’Hexagone où il remporte un joli succès public – Depardieu oblige - avec plus de trois millions de spectateurs. Mais lestée de critiques très médiocres, l’exploitation outre-Atlantique un mois plus tard (avec 10 minutes de coupes pour éliminer l’excès de violences) fait pire que le projet concurrent de Salkind : il engrange à peine 7 millions de $ au box-office américain, le plus gros échec de Scott outre-Atlantique. À l’international, son film rapporte 59 millions de $ (sur un investissement de plus de 45 millions), soit un résultat plutôt décevant. Ce bilan conforte la rumeur selon laquelle tous les biopics sur Colomb pour le grand écran seraient un sujet maudit et déficitaire.
Le deuxième débarquement de Colomb en 1493 contraste fortement avec le premier...
 Trente ans plus tard, les regards se sont nuancés. L’ouvrage est certes mineur dans la filmographie de Sir Ridley Scott (annobli par Elisabeth II en 2003), mais reste un « beau livre d’images fortes qui vaut mieux que l’accueil tiède lui ayant été réservé » (Jean-Paul Andrevon, Encyclopédie de la Guerre au cinéma, Paris, 2018), ainsi que le confirment, entre autres, la grande rétrospective de son œuvre à l’Institut Lumière à Lyon (été 2022) et divers ouvrages consacrés à sa carrière. Même la musique exotico-élégiaque de Vangelis, nominée au Golden Globe Award, quoiqu’abhorrée par certains, est devenue au fil des ans un hit mondial (António Guterres utilisera son fameux thème Conquest of Paradise pour sa campagne électorale au Portugal en 1995, de même que Boris Yeltsine en 1996 en Russie) ; Scott avait déjà sollicité les talents de Vangelis alias Evangelos Odysseas Papathanassiou avec succès dans Blade Runner. Ce que la narration ne dit pas expressément, la mise en scène l’exprime à sa place, même si le réalisateur – opposé à la pensée historique dominante – estime qu’il n’y a pas lieu d’appliquer une vision moderne à un monde différent : son Colomb ambivalent « représente plus un utopiste raté qu’un démon » (Ian Nathan), un esprit d’aujourd’hui sapé par sa suffisance, aveugle à ses propres péchés. Irritée par l’imagerie trop léchée de Scott, la presse de 1992 n’y a vu que du feu, introduisant dans ses jugements cette même superficialité qu’ils reprochaient à son film.
Le cinéaste traite la première traversée de l’Atlantique sans les habituels digressions et incidents (qu’on a déjà vu cent fois, dit-il), car avec l’apparition « magique » de la verdoyante forêt vierge de Guanahani, d’abord cachée par les brumes matinales puis, celles-ci évanouies, piquée de puits de lumière et d’une pluie de pollen, le spectateur pressent que le propos de Scott va s’orienter vers Joseph Conrad et son Au cœur des ténèbres (Heart of Darkness, 1899), voyage africain au sein des tréfonds les plus ténébreux de l’humain. Même si les premiers pas sur l’île sont filmés en ralenti, comme ceux des astronautes sur la lune, l’émotion de la découverte de la jungle amazonienne avec ses multiples inconnues, ses serpents mortels, l’innocence, les rires, les bains et la chasse en harmonie avec la nature introduisent une dimension autre : le paradis comme l’enfer peuvent être terrestres. Et le contraste avec la deuxième expédition fait mieux ressentir la souillure que représentera l’action colonisatrice ultérieure (évangélisation forcée, exploitation minière, esclavage, maladies importées). Colomb oublie sa nature d’explorateur pour devenir administrateur. Ainsi, le pur-sang tant admiré de Moxica est-il réquisitionné comme une vulgaire bête de somme pour la construction du clocher de la cathédrale, tandis que les nobles, du jamais vu, sont contraints au travail (cette notion inconnue chez les caciques) à l’instar de tout le monde. Mais alors que la colonie sombre dans un chaos sanglant, La Isabela, cité idéale de la Renaissance conçue d’après des plans de Léonard de Vinci, est balayée par un cyclone tropical aux dimensions surnaturelles, telle une punition céleste, une nouvelle tour de Babel. La cloche géante s’écrase symboliquement au sol, tandis qu’un grouillonnement d’insectes répugnants envahit les lieux et fait fuir les survivants. À son insu, Colomb-Prométhée, instaurateur d’un pouvoir totalitaire occidental, est bien la source du mal, et c’est sa mauvaise conscience qui se matérialise sous la forme d’un rejet généralisé venant des siens comme des autres. « Il sait bien, remarque Claude Monnier, que ce cyclone lui est personnellement destiné, car le vent déchaîné vient le chercher jusque dans sa demeure », dans une séquence « à l’ambiance proprement infernale, mêlant le sifflement suraigu de la tempête, les chœurs hurlants de Vangelis et les teintes monochromatiques irréelles, passant du jaune orangé des flammes au bleu froid des trombes d’eau » (Ridley Scott, Le cinéma au cœur des ténèbres, L’Harmattan, Paris, 2014, p. 146). Malgré ses beaux discours, le navigateur prisonnier de sa quête de gloire et d’argent a toujours refusé d’embrasser les valeurs des indigènes. Aux Indiens qu’il accuse d’avoir crucifié des militaires espagnols, on lui répond « tu fais pareil avec ton dieu ! », tandis que son fidèle interprète, Utapan, une présence mais pas un individu à ses yeux, lui reproche de n’avoir jamais fait l’effort d’apprendre sa langue à lui, puis de tourner définitivement le dos à son « découvreur ». On ne saurait être plus clair. Ce bémol fait écho à la scène de la chute de Grenade (filmée à Trujillo), lorsque le ministre-trésorier valencien Luis de Santángel souffle au navigateur : « C’est une victoire tragique. Nous perdons une grande culture. Chaque victoire a son prix, n’est-ce-pas, señor Colomb ? »
Le dernier tiers du film est hélas un peu précipité et décousu (trace de multiples coupes) : il s’achève sur la mélancolie et l’amertume de Colomb, fatigué, les cheveux gris, à l’instar de sa royale protectrice qui estime elle aussi que « son Nouveau Monde, dont personne ne veut, est un désastre ». Il a lui-même détruit son rêve, de ses propres mains, en souillant des peuples qui ne connaissaient pas le mot « mensonge ». La vérité est que Colomb, qui émerge d’un cauchemar, n’a jamais eu ni les qualités ni la moindre idée des actions à mettre en œuvre pour transformer sa découverte en nouveau paradis. Conscient de cet éclairage, Gilbert Salachas en déduira que ce Colomb-là « n’est pas le prophète, le précurseur des temps modernes, mais un simple navigateur attaché à sa monomanie » (Télérama 24.12.97). Pour un film-anniversaire, c’est une douche froide et une conclusion qui reflète la teneur pessimiste sinon nihiliste présente dans toute l’œuvre du cinéaste, celle d’un idéal gangréné par la corruption et l’orgueil. L’échec tant critique que public du film va éloigner Scott des plateaux de tournage pendant quatre ans.
1992(tv) The True Adventures of Christopher Columbus (GB) de Patrick Barlow et Philip Bonham-Carter
George Faber/BBCtv (BBC Two 28.-31.7.92), 4 x 20 min. – av. Patrick Barlow (Christophe Colomb), Tim Bigott-Smith (Fernando II d'Aragon), Miranda Richardson (la reine Isabelle de Castille), Victor Banerjee (Guacanagari), Freddie Jones (Herald), Ian McNeice (Frère Buil), Kenny Ireland (Hermajho), Graham Stark (un loup de mer), Chris Ryan (Premier matelot), Tanveer Ghani (le fils de Guacanagari), Nirjay Mahindru (Ayamara), Henry Goodman (Amerigo Vespucci), James Saxon (Bobadilla), Hugh Quarshie (sultan maure), Johon Nettleton (un prêtre), Badi Uzzaman, Anthony Venditti, Adrian Hansell, Martin Muncaster (narration).
Programme alternatif satirique de la BBC pour les 500 ans de la découverte des Amériques qui démonte l’image de Colomb en explorateur héroïque. Avec la chute de Constantinople, il devient urgent de trouver un explorateur qui établisse une nouvelle route vers l’Orient et l’Asie : Colomb fait l’affaire. - Épisodes : 1. « Palace of Destiny » - 2. « Land of the Indians » – 3. « Heaven or Hell » – 4. « Admiral of Mosquitos ».
1992(tv) Bye Bye Columbus (GB) de Peter Barnes
Ann Scott/Greenpoint Production-BBCtv (BBC Two 3.2.92), 50 min. – av. Daniel Massey (Christophe Colomb), Simon Callow (Frère Marchena), John Turner (Louis de Santangel), Dilys Laye (Beatriz de Bobadilla), Peter Bayliss (le cardinal Mendoza), Harriet Walter (Isabelle de Castille), Alex Jannings (Fernando II d'Aragon), James Laurenson (le Grand Inquisiteur Thomas de Torquemada), Timothy West (Martin Pinzon), Nicholas Farrell (Rodrigo), Timoyth Bateson (Frère Nervo), Christopher Eldridge (Roldan), Christie Horn (Beatriz de Arana), Jack Shepherd (le chanteur), Shaun Prendergast et Barry Stanton (des marins). – Autre programme satirique de la BBC : Colomb y est un aventurier cynique et irrévérencieux dont le mandat divin vient d’un perroquet qui imite la voix de Dieu. Lorsque la reine Isabelle le réprimande pour avoir réduit les Indiens en esclavage, il répond : « Mais nous n’embarquons que les esclaves cannibales, comme ça ils peuvent s’entre-dévorer pendant le voyage... ». No comment.
1992Carry On… Columbus (GB) de Gerald Thomas
John Goldstone/Comedy House-Island World-Peter Rogers Productions, 91 min. – av. Jim Dale (Christophe Colomb), Bernard Cribbins (Mordecai Mendoza), Peter Richardson (Bart Columbus), Sara Crowe (Fatima, l’espionne turque), Julian Clary (Don Juan Diego), Richard Wilson (Don Felipe), Maureen Lipman (la comtesse Esmeralda), Alexei Sayle (Ahmed), Rik Mayall (le sultan ottoman), Leslie Phillips (Fernando II d’Aragon), June Whitfield (Isabelle de Castille), James Faulkner (Thomas de Torquemada), Reed Martin (Pocahontas), Charles Fleischer (Pontiac).
Chris Columbus et son frère Bart s’embarquent pour l’Amérique et, hélas, ils la découvrent, ceci malgré les efforts de sape du sultan ottoman et de son espionne favorite Fatima, envoyée à Lisbonne afin d’empêcher le Génois de ruiner le trafic des caravanes en Orient par ses découvertes. Les Indiens des Bahamas portent des noms comme Pontiac ou Pocahontas, ont l’accent de Brooklyn, refusent les cadeaux des Espagnols et leur donnent en échange d’un prompt départ une malle de faux or... C’est le 32ème épisode de la très populaire série anglaise des Carry on..., après un intermède de 14 ans. La parodie burlesque est filmée en Eastmancolor d’avril à mai 1992 aux studios de Pinewood et sur le lac de Frensham Ponds (Surrey Hills), mais l’esprit n’y est plus, les comédiens ont changé et Gerald Thomas, le réalisateur de la franchise, décédera l’année suivante. Malgré un budget minimal de 2,5 millions £, le film, dont le script est particulièrement bâclé, est un gros échec commercial. La production se console en constatant qu’elle perd moins d’argent que les deux récentes fresques de John Glen (1991) et Ridley Scott (1992) sur le même sujet. En 2004, The Sunday Telegraph publiera une liste des plus mauvais films britanniques de tous les temps, liste établie par les professionnels du spectacle, et Carry On... Columbus remportera la palme. – ES : La loca pandilla de Chris Columbus, DE : Mach’s nochmal, Columbus.
1992La marrana [La Truie] (ES) de José Luis Cuerda
Rafael Díaz-Salgado, Pepe Ferrándiz, José Luis Olaizola/Central de Producciones Audiovisuales S.L. (CPA)-Antea Films-Generalitat Valenciana-Ministerio de Cultura, 105 min. - av. Alfredo Landa (Bartolomé Gutierrez), Antonio Resines (Ruy), Fernando Rey (Frère Juan, obsédé sexuel), Cayetana Guillen Cuervo (Putilla, la prostituée), Antonio Dechent (Bartolomé de Torres), Manuel Alexandre (Frère Jerónimo), Antonio Gamero (Mancebía), Hans Burman (Bartolomé García), Javier Artiñano (Javier de Artiñano), Agustín González (l’aveugle), El Gran Wyoming (le troubadour), Marta Dualde (sa putain), Gabriel Latorre (un juif), Cristina Collado (sa femme), Jesús Del Olmo (Juan de Moguer), Rodolfo Montero (Alfonso Clavijo), Fernando Menor (Pedro Izquierdo), Fernando Serrano (Chahu Lequeitio).
En juillet 1492, de retour de trois ans de captivité en Tunisie, Bartolomé Gutierrez, un paysan d’Estrémadure, est pris dans une colonne de malheureux juifs séfarades chassés du pays par les Rois Catholiques. Bartolomé veut retrouver son oncle abbé qui est intervenu en sa faveur et a payé sa rançon, mais son plus grand rêve, c’est de manger enfin de ce porc dont il a été si longtemps privé chez les musulmans ! En cours de route, il se lie d’amitié avec Ruy, un déserteur qui a fui le siège de Grenade pour se réfugier au Portugal ... et qui est accompagné d’une intouchable truie, sa mascotte. Le duo affamé erre de monastères en bordels, échappe de justesse aux brigands comme à la gendarmerie de la Santa Hermandad et, sur conseil d’un prieur dévoyé, envisage finalement un engagement à bord de l’un des trois navires commandés par Christophe Colomb, prêt à quitter le port de Palos de la Frontera en Andalousie pour un long voyage aux Indes. Mais la grande majorité des équipages est constituée de voleurs, de fugitifs et de meurtriers, puisque leurs Majestés très chrétiennes ont fait la promesse que ceux qui s’embarquent verront tous leurs crimes pardonnés. L’un d’eux est Bartolomé de Torres, un fugitif qui parvient à s’enrôler avec d’autres bandits, attire les naïfs Bartolomé et Ruy dans un guet-apens après les avoir enivrés et les dépossède de leur bien le plus précieux, la truie. Elle sera mangée à bord. Tandis que les navires de Colomb disparaissent à l’horizon, les deux malheureux se consolent en pensant que, après tout, ce voyage n’est peut-être pas aussi important que cela...
Une comédie picaresque à moitié réussie, tonitruante, répétitive, parfois scatologique, mise sur pied pour démythifier les pompeuses et irritantes festivités de commémoration autour du Grand Navigateur à l’écran comme à la ville. Elle est réalisée par le producteur d’Alejandro Amenabar, José Luis Cuerda, généralement mieux inspiré. Son scénario introduit dans l’action un authentique membre de l’équipage de Colomb, l’ex-assassin Bartolomé de Torres, et le tournage a lieu au village de La Alberca (Salamanque), à Trujillo (Cáceres) et au monastère de Veruela (Vera de Moncayo, Saragosse). Alfredo Landa reçoit le Prix Goya 1993 et le prix ADIRCAE pour la meilleure interprétation de l’année, Hans Burmann est nominé aux Goyas pour la meilleure photo.
1992[Animation : Die Abenteuer von Pico und Columbus / The Magic Voyage (DE) de Michael Schoemann; MS Film-Bavaria, 80 min.]
1992[Animation : (tv) Cristoforo Colombo. Alla scoperta dell’America / Christopher Columbus : The Commemorative Series (CH/IT/JP/SP) de Miguel Herberg et Fumio Kurokawa ; Abdabra Cinématographique S.A., Zug-Doro TV Merchandising S.r.l. Roma-Nippon Animation Co. Ltd.-Sociedad V. Centanario Spagna, 91 min.]
1992(vd) Columbus on Trial (US) de Lourdes Portillo
Lourdes Portillo/Xochitl Film & Video Productions (San Francisco)-Culture Clash (New York), 18 min. – av. Herbert Siguenza (Christophe Colomb), Ric Salinas (son avocat amérindien).
Une contribution salace du cinéma chicano new-yorkais inspirée par l’anniversaire du 500ème et imaginée par la cinéaste mexicano-américaine Lourdes Portillo (scénario de Richard Montoya) : clown grotesque, Christophe Colomb est extrait de sa tombe pour comparaître devant un tribunal formé par le groupe comique de Culture Clash. Devant un parterre de journalistes agités, il est accusé d’atrocités et de viols commis envers les Indiens du Nouveau Monde. Le juge et l’avocat sont des chicanos loyaux à leurs racines hispaniques tandis que le procureur est un indigène ; parmi les témoins à charge, un esclave noir et une jeune chicana qui, de crainte que Colomb soit absous, l’abat d’un coup de feu. - Un court métrage qui revoit l’histoire américaine et la colonisation sous un aspect férocement parodique. Projeté au Sundance Film Festival 1993, au London Film Festival, à la Biennale de Whitney et primé du National Educational Golden Apple Award. – N. B. : la réaction anti-Colomb et surtout perceptible dans le domaine du documentaire, par ex. avec Columbus Didn’t Discover Us (US) de Robbie Leppezer en 1981 (24 min.), Surviving Columbus (US) de Diane Reyna en 1992 (153 min.), Colon : The Scatological Columbus Epic des Betapunks Sean Harris et Eric Gravley en 1992, ou Before Columbus, Programme One : Invasion (CA) de Brian Moser; Central Productions-National Film Board of Canada (NFB) en 1993 (51 min.).
2001(tv-df) Das Amerika-Rätsel. Auf Geheimkurs in die Neue Welt (Vingt ans avant Christophe Colomb. Mission secrète vers le Nouveau Monde) (DE) de Wolfgang Wegner, Michael Gregor
Studio Hamburg-ZDF (Arte 21.7.01), 55 min. – Docu-fiction: en 1473, Christian Ier de Danemark et Alphonse V de Portugal chargent l’amiral allemand Dietrich Pining, le Portuguais João Vaz Cortereal et le capitaine Hans Pothorst de gagner les Indes par l’Atlantique nord; ils atteignent l’Islande, les colonies vikings du Groenland, le Labrador et la Terre Neuve.
2002[Animation : Johan Padan – A la descoverta de le Americhe (IT) de Giulio Cingoli; Luciano Beretta, Maurizio Manni/Green Movie Group-Immagine-RAI, 83 min. – av. les voix de Fiorello (Johan jeune), Dario Fo (Johan vieux), Melina Martello (Isabelle de Castille). - Tiré de la pièce de Dario Fo, prix Nobel de la littérature, anticonformiste et provocateur : pour fuir l’Inquisition, l’Italien Johan Padan embarque sur un navire et suit Christophe Colomb à Séville, puis vers les Amériques. Mais il n’y supporte pas la mise en esclavage des Indiens et les aide à quitter le navire qui emmène cent d’entre eux vers l’Espagne quand ce dernier vient à couler. De retour sur la terre, il se mêle à une tribu qui, après quelques péripéties, le prend pour le fils du Soleil et de la Lune.]
2004(tv-df) Kolumbus’ letzte Reise / Le Dernier Voyage de Christophe Colomb (DE/FR/IT) de Marc Brasse et Karl Vandenhole
Spiegel Tv-Arte-La 7-ZDF (Arte 19.6.04), 55 min. - En mai 1502, Colomb effectue son quatrième et ultime voyage vers l’Amérique, toujours à la recherche de la route des Indes par l’ouest et espérant racheter ainsi son honneur bafoué à la cour d’Espagne. Après une première escale sur les côtes de l’actuel Honduras et une rencontre avec la population maya, l’expédition tourne à la catastrophe. Les quatre caravelles, en piteux état, prennent l’eau au large de Panama. Colomb doit se défaire de deux navires, fait naufrage à la Jamaïque où il reste bloqué à terre plus d’une année, son équipage se mutine. En juin 1504, il retourne en Espagne où il meurt seul à Valladolid. - Docu-fiction avec reconstitutions et comédiens anonymes qui cherche à illustrer le contraste flagrant entre l’idolâtrie que l’on voue aux exploits de Colomb et l’abandon absolu dans lequel il serait mort peu après son retour en Espagne (une contre-vérité propagée par les romantiques).
2005(tv-df) Columbus – Myth or Man ? (GB) de Harry Marshall
Channel 5 Broadcasting Ltd.-Icon Films (Channel Five 28.6.05), 55 min. – Docu-fiction avec reconstitutions et comédiens anonymes.
2006® Night at the Museum (La Nuit au musée) (US) de Shawn Levy. – av. Pierfrancesco Favino (Christophe Colomb).
2006El ultimo viaje del Almirante [Le dernier voyage de l’Amiral] (ES) de Iván Sáinz-Pardo
Roberto Lozano/CESNA Producciones (Valladolid), 20 min. – av. Juan Antonio Quintanilla (Christophe Colomb), Juan Ignacio Miralles “Licas” (Hernando de Talavera, archevêque de Grenade), Paco Rojo (Diego Colomb), Andrés Ruiz (Hernando Colomb), Gabriel Omar Monroy (indigène enfant), J. Carlos Boyer (indigène adulte), Enrique Conzález “Gigi” (l’Inquisiteur), Pablo Rodriguez Santamaría (un jeune clerc), Jesús Angel Castrodeza, Olga Mansilla, Carlos Pinedo.
Valladolid, le 20 mai 1506. Sur son lit de mort, Christophe Colomb tente de comprendre et d’assimiler les possibles conséquences de son rôle en tant que navigateur, explorateur, coloniseur et propagateur de la foi catholique, alors que certains commencent à parler de « destruction de nos paradis ». On y fait également allusion à une hypothétique traversée de l’Atlantique par Alonso Sánchez de Huelva, avant Colomb, et dont ce dernier avait entendu parler. Court métrage à l’occasion des 500 ans de la mort de Colomb.
2007[Christophe Colomb, l’énigme / Cristóvão Colombo – o enigma (FR/PT) de Manoel de Oliveira. -
François d’Artemare, Maria João Mayer/Les Films de l’Après-Midi-Filmes do Tejo, 75 min. - av. Ricardo Trepa / Manoel de Oliveira (Manuel Luciano da Silva jeune et âgé), Leonor Baldaque / Maria Isabel de Oliveira (Silvia Jorge da Silva jeune et âgée), Jorge Trepa (Herminio da Silva), Lourença Baldaque (l’ange), Luis Miguel Cintra (le narrateur). - Une enquête sur les origines portugaises de Christophe Colomb, inspirée par le livre polémique Cristòvão Colon era Português de Manuel Luciano da Silva et de son épouse Silvia Jorge da Silva (paru en 1987 et 2006). Les auteurs de cet ouvrage ont fait leur voyage de noces en Algarve et sont persuadés que l’explorateur est né dans la région de l’Alentejo et serait donc portugais, une théorie apparue d’ailleurs déjà en 1915. « Pas un film scientifique ou historique », insiste avec malice le fameux réalisateur lisboète de Oliveira (alors centenaire !), « mais une fiction à teneur romanesque, suggérant la grandiose aventure des Grandes Découvertes ».]
2007(tv-df) Columbus : The Lost Voyage (GB/US) d’Anna Thomson
Sophia Roberts/The History Channel-Lion Television (History Channel 8.10.07), 120 min. – av. Olegar Fedorov (Christophe Colomb), Alvaro Martin (Fernando Colomb), David Sant (Bartholomé Colomb), Javier Mazan (Francisco de Porras), Ivan de Lucas (Diego de Porras), Carlos J. de la Torre (Diego Mendez), Daniel Stokes (le gouverneur Nicolas Ovando), Denis Crampton (le chef Quibian), Osvaldo Barrera, Dante Concha et José Vásquez (des Indiens), Felix Bachmann Quadros (un marin), Richard Fish et Adam Schuch-des Forges (des combattants espagnols), Robert Salvidge (skipper), Edward Herrmann (narration). - Docu-fiction sur le quatrième et dernier voyage de Colomb, un échec : toujours pas de passage vers les Indes, pas d’or à récolter, des hommes et des navires perdus, l’établissement d’une colonie échoue, une partie des marins épuisés choisissent de rester à Puerto Rico et Colomb n’a plus le soutien des monarques.
2009El manuscrito / Santiago Chevalier y el Manuscrito del Almirante (DO/ES) de Alan Nadal Piantini
Kovermann Pictures (Santo Domingo), 100 min. - av. Alan Nadal Porro (Christophe Colomb), Alan Nadal Piantini (Santiago Chevalier), Javier Pinto (Francisco Santos), Alex Spijksma (Dr. Esteve), Karol Gonzales (sgt. Pepper), Dafne Guzmán (l’historienne Elena Montero), Alfonso Jiménez (Jaro), Jesús Brasero (José Luis), Juan Roldán, Alan Nadal Sr.
Ce premier film d’aventures du cinéma dominicain tisse les exploits d’un jeune émule d’Indiana Jones, Santiago Chevalier, et un professeur d’histoire impliqués dans une tentative de vol des restes de Christophe Colomb et du secret qui entoure ses trésors convoités par un obscur groupe de mercenaires espagnols. Tournée en été-automne 2008 à Alicante, Madrid et Santo Domingo, l’intrigue navigue entre le XVIe et le XXIe siècle.
2009(tv-df) America Before Columbus / 1492 : Der Kolumbus-Effekt (1492 – Le Clash des continents) (US/DE) de Cristina Trebbi
Uwe Kersken/Gruppe 5 Filmproduktion-National Geographic Channel-ZDF (National Geographic 22.11.09 / Arte 30.1.10), 92 min. - av. K. J. Linhein (Hernando de Soto). - Docu-fiction avec des comédiens anonymes dans les rôles de Colomb et d’Isabelle la Catholique. Comment la rencontre entre l’Europe et l’Amérique va modifier l’équilibre écologique de la planète : l’Amérique précolombienne n’est pas un paradis sauvage ni un « nouveau monde » vierge, mais un continent avec des millions d’habitants qui ont développé une vaste infrastructure de cités, de canaux, de vergers. Les Européens apportent les chevaux, mais aussi de nouvelles maladies ; ils rapportent la pomme de terre qui deviendra vite essentielle à l’alimentation du Vieux Continent. Belliqueux et en manque de ressources naturelles, les Européens n’ont pu s’établir en Amérique que parce que les microbes, les plantes et les animaux qu’ils y ont introduits leur ont donné un avantage sur les populations autochtones.
L’évangélisation du Nouveau Monde par les Espagnols dans « También la lluvia » (2010) d’Icíar Bollaín.
2010* También la lluvia / Même la pluie (ES/MX/FR) de Icíar Bollaín
Juan Gordon, Eric Altmayer, Mónica Lozano, Emma Lustres/Morena Films-Alebrije Cine y Video-Mandarin Cinéma-Tambien la Lluvia AIE-Vacafilms-Canal+ España-Canal+ France, 103 min. – av. Karra Elejale (Christophe Colomb), Carlos Santos (Bartolomé de Las Casas), Raúl Arévalo (Antonio de Montesinos), Juan Carlos Aduviri (Hatuey, le chef rebelle des Taïnos), Najwa Nimri (la reine Isabelle de Castille), Milena Soliz (Panuca), Luis Tosar (Costa, le producteur du film), Gael García Bernal (le réalisateur Sebastián).
Le cinéaste Sebastián arrive à Cochabamba, en Bolivie, pour réaliser un film controversé sur l’arrivée de Christophe Colomb aux Antilles, la rébellion des Taïnos du chef Hatuey, l’asservissement des populations indigènes et le rôle qu’ont joué leurs défenseurs espagnols, le prêtre dominicain Antonio de Montesinos et son successeur Bartolomé de Las Casas (cf. chap. 7.8). Colomb est ici poussé par la passion de l'or, son comportement conflictuel se traduit par une obsession de planter des croix et des potences, d'asservir et de soumettre les Indiens au travail forcé ou d'en faire des serviteurs. Durant le tournage, des manifestations éclatent pour contester la privatisation de l’eau par une multinationale américaine, initiative qui ruine la population. Le pays s’embrase et met aussi en péril l’aboutissement du tournage du film, l’acteur qui incarne Hatuey, Daniel, étant aussi l’un des meneurs de cette « guerre de l’eau ». Le film, dans lequel alternent scènes tournées en costumes (avec un Colomb alcoolique) et manifestations du XXIe siècle, introduit un parallèle astucieux entre les exploitations passées et présentes des autochtones d’Amérique latine. Bollaín recourt au cinéma dans le cinéma pour placer au centre de son œuvre un kaléidoscope de perspectives qui problématisent le succès et les limites de toute approche du passé et les difficultés et défis pour l'aborder dans toute sa complexité. C'est un film de fiction (celui d'Icíar Bollaín) sur le tournage d'un autre film (celui de Sebastián et Costa sur Colomb), auquel s'ajoutent d'autres productions, celle d’un documentaire sur le tournage du film de Colomb, et un autre avorté (le refus de tourner un documentaire sur les exactions contre les Indiens qui protestent contre la privatisation de l'eau), en plus des scènes qui montrent les acteurs visionnant des extraits de ce qui est filmé, ou regardant des reportages télévisés sur les manifestations des Indiens contre le gouvernement. Le scénario est du réalisateur écossais Paul Laverty, fidèle collaborateur de Ken Loach. Primé à la Berlinale 2011 (prix du public), Les Arcs Film Festival, Prix Ariel (Mexique) et Palm Springs International Film Festival Award pour Icíar Bollian, 3 prix Goya (Madrid), etc. Le film est dédié à la mémoire d'Howard Zinn, historien et militant célèbre pour sa position contre la guerre du Vietnam, la défense des droits des marginalisés et son livre populaire A People's History of the United States (1980), d'après les ouvrages et études sur Colomb de l’écrivain néerlandais Hans Koning (Columbus. His Enterprise : Exploding the Myth (1976), etc.
2013® (tv) Isabel (ES) série d’Oriol Ferrer. – av. Julio Manrique (Christophe Colomb).
2016® (tv) Assassin’s Creed (US/FR/GB) de Justin Kurzel. – av. Gabriel Andreu (Christophe Colomb).
2016® (tv) El ministerio del tiempo : 19. Tiempo de lo oculto (2016) d’Abigail Schaaff – av. Joan Carreras (Christophe Colomb).
2017® (tv) Conquistadores Adventum (ES) d’Israel del Santo. – av. Miguel Lago Casal (Christophe Colomb).
2019/20® (tv) The Spanish Princess (US) de Lisa Clarke, etc. – av. Luka Peros (Christophe Colomb).
2022® Die Geschichte der Menschheit - leicht gekürzt (DE/CH) d'Erik Haffner. - av. Gustav-Peter Wöhler (Christophe Colomb).