III - L’ITALIE

8. LE MONDE DES ARTS

8.6. Le Caravage

Michelangelo Merisi ou Amerighi, dit Caravaggio (1573-1609 [ou 1610]), peintre milanais originaire de la ville de Caravaggio.
1941Caravaggio, il pittore maledetto (Le Peintre maudit) (IT) de Goffredo Alessandrini [et Riccardo Freda]
Francesco Curato, Riccardo Freda/Elica Film (Edizioni e Lavorazioni Industriali di Cinematografia Artistica), Roma, 108 min. - av. Amedeo Nazzari (Michelangelo Merisi, il Caravaggio), Clara Calamai (Madonna Giaconella Tommasoni), Beatrice Mancini (la blanchisseuse Lena), Achille Majeroni (le cardinal Scipione Caffarelli-Borghese), Lamberto Picasso (Giuseppe Cesare dit Cavalier d'Arpino), Nino Crisman (Alof de Wignacourt, grand maître de l'Ordre de Malte), Olinto Cristina (le cardinal Francesco Maria del Monte), Lauro Gazzolo (Lionello, disciple de Caravaggio), Maria Dominiani (Alessandra), Renato Malavasi (Mauro), Salvatore Furnari (le nain).
A son arrivée à Rome en 1588, Michelangelo Meriso dit le Caravage mène d'abord une existence difficile en compagnie de Lena, une repasseuse dont il fait son modèle et qui lui sera fidèle toute sa vie. Sa peinture, d'un baroque incandescent faite d'ombres et de lumière, éclatante, violente, agressive, est l'objet de moqueries. Dans l'atelier de Giuseppe Cesare dit Cavalier d'Arpino, peintre attitré du pape Clément VIII, le Caravage n'est qu'un exécutant (1593) ; il est congédié après avoir corrigé une toile de son maître. Dans l'atelier, il a rencontré la belle Giaconella Tommasoni qui s'est éprise de lui et est devenue sa maîtresse. Séduit par ses compositions transgressives, le cardinal Del Monte se fait son protecteur et ami ; grâce à ses recommandations, les commandes de prélats importants affluent, ce qui attire au peintre de nombreux ennemis, parmi lesquels le notaire Pasqualone, le fiancé de Lena qui tente de le faire assassiner dans un guet-apens. En 1606, orgueilleux, querelleur, arrogant et violent, le Caravage affronte Tommasini, le mari jaloux de Giaconella qui l'a provoqué en duel ; il le tue d'un coup d'épée et doit fuir à Malte où il peint le portrait du grand maître de l'Ordre, Alof de Wignacourt, et devient chevalier. Trois ans plus tard, malade, le Caravage rêve toujours de rentrer à Rome où son ami et disciple Lionello tente de fléchir le pape grâce à l'intervention du cardinal Scipione Borghese. Il demande au peintre de l'attendre clandestinement à Porto Ercole, à quelques kilomètres des États pontificaux. Mais la police le recherche, il doit se terrer et survit misérablement. En juillet 1610, quand Lionello et Lena viennent chercher le peintre qui a enfin obtenu le pardon pontifical, celui-ci est mort : ils passent devant son cadavre couché dans les marais sans le voir.
Compte tenu de la réputation sulfureuse du peintre (aujourd'hui remise en cause par l'historiographie), le cinéma s'est longtemps abstenu d'en illustrer les dédales, au grand soulagement du Vatican et de la bourgeoisie bien-pensante. Mais en 1941, l'Italie se doit de se souvenir de ses gloires nationales (cf. Sei bambine e il Perseo célébrant Benvenuto Cellini en 1939/40). Le projet d'un biopic sur le Caravage provient de Renato Angiolillo, fondateur et directeur du quotidien Il Tempo qui réunit les capitaux nécessaires à la toute première production de l'Elica Film romaine, mais c'est Goffredo Alessandrini qui en assume la mise en scène. Alors l'époux d'Anna Magnani, ce dernier est devenu le cinéaste officiel du régime pour avoir réalisé Luciano Serra pilota (1938), fresque militariste récompensée par la Coupe Mussolini à Venise, un prix gagné ex-aequo avec l'Olympia de Leni Riefenstahl. (Alessandrini se dédouanera en 1948 grâce à L'ebreo errante / Le Juif errant d'après Eugène Sue.) Toutefois, le jeune Riccardo Freda semble avoir joué un rôle non négligeable dans l'entreprise (le générique le présente comme " collaborateur à la réalisation "), à titre de directeur exécutif pour Elica Film, co-scénariste, superviseur technique et directeur artistique (il crée notamment la maquette du port d'Ostie avec ses quais, ses galions et ses marchandises) ; il passera officiellement à la réalisation l'année suivante avec Don César de Bazan. Le tournage a lieu de septembre à décembre 1940 aux studios S.A.F.A.-Palatino à Rome, sous la supervision du peintre Vittorio Verga. À la caméra, on trouve Aldo Tonti, le futur chef-opérateur de Visconti, Rossellini, Fellini, mais aussi de King Vidor, Nicholas Ray et John Huston. Ayant longuement étudié son personnage, la vedette Amedeo Nazzari, idole suprême du public féminin italien, découvre avec stupéfaction et quelque inquiétude que le Caravage n'embrasse aucune femme dans le scénario, ce qui, dit-on, lui aurait fait craindre pour sa popularité et sa carrière ultérieure. Par chance pour lui, on ignore les préférences sexuelles du peintre et ce n'est certainement pas le cinéma de l'Italie fasciste qui souhaitait creuser la question (Freda a éliminé toutes les scènes trop sentimentales). De manière générale, les maigres informations biographiques sur le peintre proviennent d'une poignée de sources peu fiables, contradictoires et/ou partisanes - les ouvrages de Karel van Mander (1604), Giulio Mancini (v.1620), Giovanni Baglione (1642), Giovan Pietro Bellori (1672), Joachim von Sandrart (1675) et Francesco Susino (v.1724) - ce qui peut expliquer l'aspect romancé sinon romanesque du film (pour plus de détails historiques, cf. infra les télé-séries de 1967 et 2007). Même les circonstances exactes de la mort du Caravage restent mystérieuses. Plus aquarelle que fresque malgré d'importants moyens, le film obtient deux Prix nationaux de la Cinématographie à la Mostra de Venise (Nazzari meilleur acteur dramatique, Riccardo Zandonai meilleure prise de son). La presse de l'époque parle d'un " aventurier violent " mais guère " maudit ", quoique le mensuel catholique Rivista del Cinematografo conseille de réserver la vision du film à un public adulte " (mars 1941).
1967(tv) Caravaggio - genio e sregolatezza (IT) mini-série de Silverio Blasi
RAI Radiotelevisione Italiana (Rete Nazionale 15.-29.10.67), 207 min./3 x 65 min. - av. Gian Maria Volonté (Michelangelo Merisi, il Caravaggio), Carla Gravina (Tullia), Renzo Palmer (le peintre Prospero Orsi), Roldano Lupi (Alof de Wignacourt, grand maître de l'Ordre de Malte), Luigi Montini (Lionello Spada), Franco Bucceri (Orazio), Andrea Lala (Filippo), Glauco Onorato (Onorio Longo, poète-architecte), Giancarlo Maestri (Ranucci Tommasoni), Carlo Hintermann (le cardinal Francesco Maria del Monte), Giorgio Bonora (le cardinal Scipione Caffarelli-Borghese), Claudio Sora (Bartolomeo), Carlo D'Angelo (le pape Paul V), Carlo Ninchi (Messer Zambeccari), Manlio Guardabassi (Giuseppe Cesare dit Cavalier d'Arpino), Mimmo Craig (Mao Salini), Franco Odoardi (Giovanni Baglione), Franco Passatore (Andrea Zenari), Franco Graziosi (Hyeronimo/Gerolamo de Varays), Giuseppe Fortis (Battista), Piera Vidale (la gitane), Alvaro Piccardi (le cardinal Gonzaga), Aldo Massasso (le marquis Vincenzo Giustiniani), Patrizia Valturri (Lena Antognetti), Manlio Busoni (le notaire Pasqualone), Gasstone Bartolucci (Monseigneur Pucci), Mariolina Bovo (Caterina), Riccardo Cucciolla (narration).
Une restitution scrupuleuse, mais modeste, sage, didactique et un peu théâtrale (en noir et blanc aux studios de la RAI), dominée par le jeune Gian Maria Volonté, communiste fervent, déjà dans un de ces rôles de rebelle contestataire qui vont lui coller à la peau et marquer tout le cinéma politique italien. Son Caravage est tout en colère rentrée, intense, incontrôlée, pathétique. Le téléaste Silverio Blasi, qui a déjà signé trois ans plus tôt une Vita di Michelangelo avec Volonté, affirme avoir choisi l'acteur (qui a percé au cinéma en 1964 en tueur dans Pour une poignée de dollars de Sergio Leone) en raison de sa nature de polémiste et non-conformiste. Le générique du début révèle le peintre moribond, titubant sur la plage du Monte Argentario. D'entrée, les scénaristes Andreo Barbato et Ivo Perilli admettent que la biographie du peintre est très lacunaire (ils se réfèrent massivement aux dossiers judiciaires des Archives d'État de Rome et au témoignage inédit du propre frère de l'artiste, un ecclésiastique). À défaut d'un portrait, ils offrent au moins un profil qu'ils situent sur fond d'une Contre-Réforme cherchant à rendre l'Église plus sévère et rigoureuse ; en introduction, il évoquent brièvement les efforts de Michel-Ange, souffrant de la malaria, dans la Chapelle Sixtine. Le Caravage, fêté à Bologne comme représentant d'une peinture radicalement nouvelle, aux modèles issus du petit peuple, se heurte à des clercs scandalisés qui le font bastonner. Lionello Spada l'empêche de détruire ses toiles et l'encourage à poursuivre ses audacieuses recherches picturales. Le Saint Office ayant condamné le Caravage à mort après l'homicide de Tommasoni, le cardinal Del Monte plaide vainement la cause de cet artiste irritable, sanguin, qui " manie plus facilement l'épée que le pinceau " et, reprenant les termes du pontife, explique que l'Église ne peut se fermer aux temps nouveaux ni à cet art " révolutionnaire ". N'ayant pas obtenu le pardon papal, le Caravage se réfugie chez les Colonna, puis à Naples et à Malte où il est fait chevalier, puis expulsé de l'Ordre et condamné à mort après un geste de révolte. À Rome, on le croit décédé après avoir été agressé dans une taverne. Il rend l'âme sur le rivage de Porto Ercole, blessé par des sicaires, poursuivi par la soldatesque, terrassé par la fièvre.
1978® Rubens (NL) de Roland Verhavert. - av. Andre van den Heuvel (Caravaggio). - cf. Pays-Bas XVIIe s.
L’entourage homosexuel du « Caravaggio » de Derek Jarman (1986).
1986Caravaggio (GB) de Derek Jarman
Sarah Radclyffe, Nicholas Ward-Jackson, Colin MacCabe/British Film Institute (BFI London)-Channel Four Television, 93 min. - av. Nigel Terry (Michelangelo Merisi, il Caravaggio), Sean Bean (Ranuccio Tommasoni), Tilda Swinton (Lena Antognetti), Garry Cooper (Davide), Dexter Fletcher (Caravaggio jeune), Noam Almaz (Caravaggio enfant), Spencer Leigh (Jerusaleme, le valet sourd-muet), Nigel Davenport (le marquis Vincenzo Giustiniani), Robbie Coltrane (le cardinal Scipione Caffarelli-Borghese), Michael Gough (le cardinal Francesco Maria del Monte), Dawn Archibald (Pipo), Jack Birkett (le pape Paul V), Imogen Claire (la femme aux bijoux), Sadie Corre (la princesse Colonna), Jonathan Hyde (Baglione), Una Brandon-Jones (la pleureuse), Cindy Oswin (Lady Elizabeth), Emile Nicolaou (Jerusaleme jeune), Simon Fisher-Turner (Fra' Fillipo), Vernon Dobtcheff (un amateur d'art).
Apologiste du cinéma homoérotique, Derek Jarman imagine une liaison bisexuelle tourmentée du Caravage avec le blond spadassin Ranuccio Tommasoni, joueur-boxeur androgyne et la maîtresse de ce dernier, Lena, une fille de joie qui va servir de modèle pour divers tableaux. Dans sa première commande importante, Le Martyre de saint Matthieu, le bourreau a les traits de Ranuccio. Le scandaleux triangle amoureux aboutit à un drame, malgré la protection du cardinal Del Monte et du marquis Vincenzo Giustiniani, principal mécène d'un artiste flambeur, dépensier, parfois prostitué lui-même. Lors d'une débauche dans les catacombes romaines où le Saint-Père se montre torse nu sous un masque de satyre, Lena séduit le puissant cardinal Borghèse, neveu du pape, qui la rend enceinte. On la retrouve noyée dans le Tibre, Ranuccio est soupçonné du crime. Le Caravage peint le cadavre de la malheureuse pour La Mort de la Vierge, puis, une fois Ranuccio sorti de prison, il l'égorge... Fidèle collaboratrice de Luchino Visconti, Suso Cecchi d'Amico participe discrètement à l'écriture du scénario qui débute et finit par l'agonie du Caravage à Porto Ercole, terrassé par le paludisme. Jarman considère que l'artiste maudit conte sa propre histoire à travers sa peinture, située dans les bas-fonds parmi les voleurs, les mendiants et les prostituées (ses modèles), avec à ses côtés le fidèle Jerusaleme, un sourd-muet " acheté " qui lui sert d'esclave virtuel. Injectant divers aspects autobiographiques dans son film, le cinéaste opte pour un récit imaginaire, baroque, bizarre et inattendu, à l'instar des toiles de son idole qui présentent des personnages bibliques en costumes de la fin du XVIe siècle ; il fait, lui aussi, appel à des anachronismes volontaires (machine à écrire, calculateur, lumière électrique, cigarettes) pour restituer la vie d'un imagier réaliste en qui il voit non seulement un adepte du naturalisme le plus " gore " mais le précurseur des cadrages et éclairages cinématographiques. C'est en résumé l'occasion d'une méditation chromatique réalisée par une icône de l'" underground " britannique, lui-même peintre (décédé du sida en 1994). En outre, son Caravaggio, autant film dramatique que film d'art plastique, milite - comme toutes ses autres réalisations - pour la reconnaissance de la contribution culturelle de l'homosexualité à l'histoire : élément-clé, la nature " gay " du peintre et son narcissisme sont censés expliquer sa peinture, car - à en croire le binôme en vogue - pour être un grand artiste, il faut bien sûr lutter contre la morale, transgresser les tabous, etc. En tête du casting, on retrouve Nigel Terry, le roi Arthur d'Excalibur de John Boorman. Doté d'un budget risible de 475'000 £ et tourné entièrement aux Limehouse Studios (Western Half Warehouse) à Londres après une gestation de 8 ans et 17 versions du scénario, le film sort en ouverture du festival de Berlin en février 1986 où il récolte l'Ours d'argent de la meilleure photo. Échos très mitigés. " Les hommes préfèrent les blonds ", titre sarcastiquement Le Monde (20.12.87).
2002Vernissage ! 1607, Caravaggio (IT) de Stella Leonetti
Stella Leonetti, Marc Fiorini/HIP Film, 18 min. - av. Danny Quinn (Michelangelo Merisi, il Caravaggio), Lella Costa (la poétesse), Marc Fiorini (un marchand d'art obséquieux), David Halevim (Monseigneur), Adriana Sartogo (Donna Adriana), Renato Nicolini (Cavaliere Renato), Goerild Mauseth. - Court métrage de fiction en costumes illustrant avec une subtile ironie le vernissage hypothétique du tableau Le Sette Opere di Misericordia (1607), chef-d'œuvre conservé à Naples dans l'église Pio Monte della Misericordia ; le film décrit l'accueil du public, la réaction des clients potentiels et les commentaires de l'artiste, tantôt véhéments, tantôt aimables. Court métrage filmé sur place à Naples avec près de 50 comédiens, couronné du Globo d'Oro et du prix de la meilleure photo au festival d'Elche 2003. Film inclus dans le DVD Visioni di Caravaggio (2004).
2005(tv) Caravaggio, l'ultimo tempo / Caravaggio, the Last Act (IT) de Mario Martone
Associazione Culturale PAV-Regione Campania-Polo Speciale Museale-Regione Campania, 41 min. - av. Danio Manfredini / Michelangelo Merisi, il Caravaggio), Salvatore Ruocco. - La mort entourée de mystère du Caravage dans le Latium, tournée à Naples en novembre 2004.
2006(tv) Caravaggio (GB) de Carl Hindmarch
Série " Simon Schama's Power of Art ", BBC-Thirteen-WNET (BBC2 20.10.06), 55 min. - av. Paul Popplewell (Michelangelo Merisi, il Caravaggio), Andrew Garfield (le garçon avec fruit), Christine Bottomley (Fillide Melandroni), Jalaal Hartley (Onorio Longhi), Dominic Colchester (Ranuccio Tommasoni), Anna Walton (Lena [Maddalena] Antognetti), Dave Hill (le modèle pour saint Matthieu), Massimiliano Davoli, Alex Noodle, Iain Pearson. - La peinture du Caravage, ses compagnons de débauche et ses modèles présentés par Simon Schama.
Alessio Boni, un Caravage fougeux et colérique dans la télésérie d’Angelo Longoni (2007).
2007* (tv+ciné) Caravaggio (IT/FR/ES/DE) mini-série et film d'Angelo Longoni
Ida Di Benedetto, Esther Cases, Joan Antoni González, Piero Amati, Angelo Frezza, Claudio Mancini/EOS Entertainment-GMT Productions-Institut del Cinema Català (I.C.C.)-Televisió de Catalunya (TV3)-Titania Produzioni-RAI Fiction (RAI uno 17-18.1.08 / FR2 20.6.09), 2 x 105 min. (2 parties), cinéma : 151 min./135 min. - av. Alessio Boni (Michelangelo Merisi, il Caravaggio), Claire Keim (Fillide Melandroni, modèle et courtisane), Jordi Mollà (Francesco Maria Bourbon del Monte Santa Maria), Paolo Briguglia (le peintre Mario Minniti), Benjamin Sadler (l'architecte et poète Onorio Longhi), Elena Sofia Ricci (la marquise Costanza Sforza Colonna), Ruben Rigillo (Fabrizio Colonna, son fils), Sarah Felberbaum (Lena [Maddalena] Antognetti, modèle), Marta Bifano (Lucia Merisi), Maurizio Donadoni (Ranuccio Tommasoni), Maria Elena Vandone (Beatrice Cenci), Simone Colombari (Zuccari), Marcello Catalano (Ippolito Malaspina), Francesco Siciliano (Giulio Strozzi, poète et avocat apostolique), Paolo Giovannucci (Giovanni De Ponte), Luigi Diberti (le cardinal Scipione Caffarelli-Borghese), François Montagut (Alof de Wignacourt, grand maître de l'Ordre de Malte), Vincenzo Alfieri (Pedro de Montaya), Joachim Bissmeier (le cardinal Gonzaga), Beatrice Burati (Cuoca Sforza), Luca Capuano (Francesco Tommasoni), Maria Rita Cardella (Adriana Minniti), Alessandro Colecchi (Cecco), Leslie Csuth (Jan Bruegel), Alessandro Di Natale (Giordano Bruno), Stefano Fregni (le pape Paul V), Francesc Garrido (Antonio Martelli, chevalier de Malte), Arnaud Giovaninetti (le marquis Vincenzo Giustiniani), Bojana Ordinacev (Anna Bianchini), Massimiliano Pazzaglia (Gaspare), Ricard Sadurni (Prosperino Orsi), Manuel Witting (Bernardino), Francesco Di Lorenzo (le capitaine de Porto di Palo), Giuseppe Tumminello (Sbirro), Renzo Musumeci Greco (le maître d'armes), Sebastiano Filocamo (l'Inquisiteur).
La série reprend dans les grandes lignes, mais avec beaucoup plus de détails et d'exactitude les événements développés dans celle de la RAI en 1967 (cf. supra) : son enfance à Milan, le décès de sa mère, ses débuts modestes à Rome, son apprentissage auprès de Simone Peterzano, sa longue relation avec la marquise Costanza Colonna qui l'aime depuis l'âge de six ans (ils se sont juré fidélité mutuelle), qui le prend à présent sous son aile et l'introduit auprès du cardinal Del Monte, un des plus grands collectionneurs romains d'alors. Enthousiaste, celui-ci lui offre le gîte au Palazzo Firenze, le couvert et des gages, le recommande au Vatican et lui procure des commandes toujours plus prestigieuses, dont un portrait du pape Paul V. Nonobstant, le bouillant Caravage ridiculise les barbouilleurs serviles de l'Académie des Arts et défend publiquement des causes impopulaires comme celle de la parricide Beatrice Cenci (cf. chap. 5.3) ou de l'hérétique Giordano Bruno (cf. chap. 5.4), tous deux exécutés. Sa foi foncière se heurte à l'intransigeance dogmatique de la Contre-Réforme catholique et quoique menacé par les zélotes de l'Inquisition, il engage pour ses tableaux religieux des modèles issus des bas-fonds ; plusieurs œuvres majeures sont refusées, les postures sont jugées trop vulgaires, des saints " trop humains ". Il continue aussi à fréquenter la canaille alors qu'il est au sommet de la gloire, mais son engouement pour la belle courtisane Fillide Melandroni, son modèle, le pousse à tuer en duel le souteneur jaloux de cette dernière, Ranuccio Tommasoni. Condamné à mort, il s'enfuit à Naples, puis à Malte où Costanza le recommande au grand maître de l'Ordre qui se fait portraiturer et adoube l'artiste. Mais une autre rixe sanglante - il défend l'honneur du chevalier Fabrizio Colonna, fils de Costanza - lui fait perdre son titre de chevalier de Malte et le contraint à fuir en Sicile avec l'aide de Fabrizio. À Syracuse, chez son ami le peintre Mario Minniti, il est ratrappé par la milice pontificale, le clan vindicatif des frères Tommasoni et les chevaliers de Malte. Le Caravage parvient à retourner à Naples où, grièvement blessé lors d'une embuscade des Tommasoni, il est soigné par Costanza, son amie d'enfance avec laquelle il développe enfin une liaison passionnée. En chemin pour obtenir le pardon du pape à Rome, il est arrêté par la police de Porto Palo. Relâché après avoir éclairci le malentendu, mais affaibli par son séjour en prison et la maladie, il abandonne les tableaux qu'il destinait au Saint Père et s'éteint sur la plage de Porto Ercole, dans les bras de Costanza, après avoir vu en mourant le " Cavalier Noir " qui va l'emporter. La grâce pontificale lui sera accordée deux jours trop tard.
L'intrigue est arrondie par quelques touches romanesques, quoique la relation étroite avec l'aristocrate Costanza Colonna (v.1555-1626), épouse de Francesco Ier Sforza di Caravaggio et sœur du puissant cardinal Ascanio, soit documentée ; la marquise abrita l'artiste persécuté au Palazzo Colonna à Rome et le suivit même jusqu'à Naples, où il séjourna au Palazzo Carafa ; on n'en sait pas plus. Quant à la prostituée Fillide Melandroni (1581-1618), elle servit de modèle pour Judith décapitant Holopherne, Marie-Madeleine et Sainte Catherine d'Alexandrie (v.1598), et Lena (Maddalena) Antognetti, sa muse peu avant sa fuite de Rome (Marie-Madeleine en extase), fut aussi le modèle de Michel-Ange. L'hypothétique bisexualité de l'artiste (avec Francesco Tommasoni ?) est laissée dans l'ombre, mais Longoni montre le peintre étudier l'anatomie des cadavres pêchés dans le Tibre, assister à la mise à mort de Beatrice Cenci et de sa mère devant le château Saint-Ange, décapitation qu'il reproduit dans sa toile de La Décollation de Saint Jean Baptiste, ou à l'exécution au bûcher de Bruno dont les hurlements sont couverts par les doucereux chœurs ecclésiastiques de l'époque. La suavité contraste avec la sauvagerie, démontrant que le Caravage est bien le reflet de son époque. L'atout principal de cette télésérie honorable sont les images du prestigieux chef-opérateur Vittorio Storaro, trois fois oscarisé (8 films de Bertolucci dont The Last Emperor, 4 films de Coppola dont Apocalypse Now, 5 avec Carlos Saura, 3 avec Woody Allen). Séduit à l'idée de moduler ses cadrages à partir de la fabuleuse palette chromatique du peintre, il a accepté de travailler pour la première fois pour la télévision. Le rôle-titre est tenu avec passablement de conviction, d'énergie batailleuse et de crédibilité par Alessio Boni, 39 ans comme le Caravage à sa mort, un comédien révélé dans La meglio gioventù (Nos meilleures années) de Marco Tullio Giordana en 2003. Luis Enriquez Bacalov, oscarisé pour Il postino de Massimo Troisi, signe la musique. La série est filmée en mai-juin 2007 à Rome (palais Farnese), en Sicile (Syracuse et Messine), à Malte et, pour les anciens quartiers de Rome dans les studios Avala à Belgrade (Serbie) avec un budget de 8 millions d'euros. Elle sort en juillet 2007 au Roma Fiction Festival, passe sur les antennes dès janvier de l'année suivante, est projetée en salle au Lincoln Center à New York en juin dans une version condensée (151 min.) et décroche cinq nominations au prix David di Donatello (photo, décors, costumes, trucages, coiffures).
2007 [sortie: 2017](tv) Caravaggio : The Search (US) de Michael C. Merisi et Maureen Murphy - [2017:] The Search for Caravaggio / Caravaggio and My Mother the Pope (US) de Gladys Florence
Martin Kast, Francesco Del Monte, Maureen Murphy, Gladys Florence [2017], Eileen Norman/M & Associates-Gladeyes Productions [2017] (Los Angeles), 180 min./120 min./90 min. - av. Andrea Grassi / Ettore Belmondo / Matteo Sapio / Daniel Kurtz / Charlie Badders / F. Damion Barela / Pasquale Cassalia / Stefano Della Pietra / Gabriele Martinelli / Carlo Alberto Orecchia / David Sciabica / Andoni Zorbas / Siso Kamburov (Michelangelo Merisi, il Caravaggio), Filippo Chiero / Fabrizio Imas / Simon von Grunigen (Leonardo da Vinci), Lorenzo Micheli (Raffaello), Waler G. Zeri (le pape Alexandre VI Borgia), Caroline Amiguet (Caterina Sforza), Anthony Vitale (le cardinal Bembo), Marzia Ciacci (la fille de Galilée), Tom Troupe (le cardinal Del Monte), Sara Sometti (sœur Margherita Lena), Mary Grace (la Madone), Maximilian Stroscio (Ranuccio), Harsha First/Gladys Florence (Rembrandt), Domiziano Arcangeli (le cardinal Puccini), Arianna Ferraro (Lucrezia Borgia), Sergio Guarino (Giordano Bruno). - La vie tumultueuse du " premier peintre moderne ", hantée par les personnages qui ont inspiré ses tableaux, des contemporains célèbres, des artistes plus tardifs (Picasso, Van Gogh, Goya) et diverses réincarnations. Un film totalement chaotique tourné en été 2007 à Los Angeles, à Rome et à Amsterdam, interrompu par un grave accident de voiture de la réalisatrice Maureen Murphy. Du grand n'importe-quoi.
2008Caravaggio (PT) de José Maria Vaz da Silva
Paolo Branco/Clap Filmes (Lisboa), 15 min. - av. António Simão (Michelangelo Merisi, il Caravaggio), João Pedro Vaz (Cristo), Sofia Marques, Pedro Nuñes. - Après avoir passé la nuit avec une prostituée, le Caravage rêve que Dieu lui rend visite alors qu'il joue avec des tricheurs dans une taverne, ce qui va inspirer un de ses tableaux les plus célèbres. Le scénario s'inspire d'un conte d'António Tabucchi, Sonho de Michelangelo Merisi, Dito o Caravaggio, Pintor e Homem iracundo.
2018® Bathory / Chroniques d'Erzebeth : Le Royaume Assailli / Báthory - A legenda másik arca (SK/HU/CZ/GB/FR) de Juraj Jakubisko. - av. Hans Matheson (Michelangelo Merisi, il Caravaggio).
2010(tv-df) Caravaggio : Man & Mystery (Le Mystère Caravage) (GB) de Richard Blanshard et Marco Visalberghi
Bettina Hatami, M. Visalberghi/Spring Film Productions-Doclab-Sky Arts (Sky Arts 1.1.12 / Histoire 27.3.14), 52 min. - av. Luca Lionello (Michelangelo Merisi, il Caravaggio), Jonathan Kydd (narration). - Docu-fiction : portrait érudit d'un artiste en tant que grand metteur en scène, qui mobilise des trésors d'inventivité et de technicité pour mettre ses œuvres à la portée du regard de tous.
2011[I.M. Caravaggio (US) de Derek Stonebarger; Vegaswood Studios, 92 min. - av. Ryan Eicher (Ian Milano), Beverly Lynne, Fletcher Sharp, Alastair Bayardo. - Errances, tourments, crimes et excès d'un Caravage du XXIe siècle à Las Vegas, film-hommage pour le 400ème anniversaire de la mort du peintre.]
2013(tv-df) Caravaggio criminale (IT/ES) de Giovanni Troilo
Todos Contentos Y Yo Tambien (Sky Arte HD), c.m. - av. David Richard White (Michelangelo Merisi, il Caravaggio). - Docu-fiction expérimental.
2018(tv-df) Caravaggio - L'anima e il sangue (IT) de Jesus Garces Lambert
Francesco Invernizzi, Dimitri Cioffi/Sky Italia-Magnitudo Film-Nexo Digital-Direzione Generale Cinema (Roma) (Sky Cinema/Arte 4.11.18), 90 min. - av. Emanuele Marigliano (Michelangelo Merisi, il Caravaggio), Manuel Agnelli (la voix de Caravaggio), Simone D'Andrea (narration). - Docu-fiction.
Isabelle Huppert et Riccardo Scamario dans « L’ombra di Caravaggio » (2022).
2020-2022* L'ombra di Caravaggio / Caravage / Caravaggio's Shadow (IT/FR) de Michele Placido
Federica Vincenti/Goldenart Production Srl-Charlot (Paris)-RAI Cinema-Le Pacte-MACT Productions-Campania Film Commission-QMI-Ministero della Cultura (Roma), 120 min. - av. Riccardo Scamario (Michelangelo Merisi, il Caravaggio), Isabelle Huppert (la marquise Costanza Sforza Colonna), Louis Garrel (l'Ombre), Michele Placido (le cardinal Francisco Maria Bourbon del Monte),Tedua [=Mario Molinari] (Cecco, un modèle androgyne), Micaela Ramazzotti (la prostituée Lena [Maddalena] Antongnetti), Vinicio Marchioni (le peintre Giovanni Baglione), Orfeo Orlando (Cardillo), Tommaso De Bacco (le condottiere Fabrizio Colonna), Gianfranco Gallo (Giordano Bruno), Luigi Chiocca (un prisonnier), Lolita Chammah (Anna), Brenno Placido (Ranuccio), Alessandro Haber (Battista), Maurizio Donadoni /le pape Paul V), Gianluca Gobbi (Scipione Borghese), Lea Gavino (Artemisia Gentleschi), Duccio Camerini (Costantino Spada), Carlo Giuseppe Gabardini (Onorio Longhi), Sebastiano Lo Monaco (Alof di Wignacourt).
Depuis 1599/1600, ayant appris que le peintre utilise des prostituées, des voleurs et des vagabonds comme modèles de ses tableaux religieux, le Vatican fait espionner par ses services secrets le Caravage, qui a fui Rome et s'est réfugié à Naples, puis à Malte après avoir été condamné à mort pour avoir tué un rival. Soutenu par la puissante famille Colonna, le Caravage tente d'obtenir la grâce de l'Église pour revenir à Rome. En 1609, l'inquisiteur connu sous le nom de l'Ombre (personnage fictif) est chargé spécifiquement de son cas et découvre vices et victoires de l'artiste menacé, véritable "pop star" transgressive de son temps. L'Ombre est un ennemi féroce, secrètement jaloux du peintre, enquêtant dans une cité plébéienne, brutale, grouillante et marchande. L'as du clair-obscur plongé dans une fresque bouillonnante qui n'évite pas toujours l'académisme. Le tournage sous la responsabilité de l'acteur-cinéaste Michele Placido est handicapé par le confinement dû à l'épidémie de la Covid et se déroule depuis fin septembre 2020 à Naples (Castel dell'Ovo, Santa Maria la Nova, via Morelli), Palerme, Malte, Rome (termes de Caracalla), Santa Severa, Ariccia (Palazzo Chigi), Vignanello, Frascati (Villa Aldobrandini), Sutri, Viterbe et Porto Ercole (Monte Argentario) en Toscane.