V - LE SAINT EMPIRE ROMAIN GERMANIQUE

7. ENTRE FANTAISIE, FANTASTIQUE ET HISTOIRE

7.4. Le joueur de flûte de Hamelin

On trouve les premières traces de la légende de la flûte magique attirant les rats, puis les enfants d’une petite ville allemande sur une fenêtre garnie d’illustrations de l’église de Hamelin (Hameln, en Basse-Saxe), vers 1300. Le récit figure ensuite dans le Manuscrit de Lüneburg (v. 1440), dans le De miraculis sui temporis de Jobus Fincelius (1556) qui associe le flûtiste au diable, dans la Zimmerische Chronik du comte Froben Christoph von Zimmern (v. 1560) et dans De praestigiis daemonum de Johann Weyer (1563). Goethe en a fait un poème (Der Rattenfänger, 1804) mis en musique par Hugo Wolf (1891), les frères Grimm l’ont inclus dans leurs recueils des Deutsche Sagen (1816), Prosper Mérimée incorpore la fable dans sa Chronique du règne de Charles IX (1829), Théophile Gautier célèbre l’artiste à la flûte (projet inabouti de ballet avec Jules Massenet en 1872) et Robert Browning écrit un poème en anglais paru dans Dramatic Lyrics (1842) qui va surtout inspirer les cinéastes anglo-saxons (même Walt Disney produira un charmant court métrage animé en Technicolor de 7 minutes intitulé The Pied Piper dans la série « Silly Symphonies » en 1933). Entre 1938 et 1941, Bertolt Brecht met en poème Die wahre Geschichte vom Rattenfänger où la carrière du joueur de flûte finit sur le gibet. Enfin, dans sa pièce Der Rattenfänger (1974), Carl Zuckmayer a repris la trame originelle mais en transpose l’action dans le présent pour illustrer inégalités sociales et conflits générationnels (Friedrich Cerha en fait un opéra en 1987). - Aujourd’hui, la version « officielle » du récit place l’action sur un 26 juin 1284, 130 enfants auraient disparu à l’intérieur d’une montagne, seuls un enfant muet et un autre aveugle seraient revenus. Chaque année depuis 1956, de mai à la mi-septembre, quelque 80 figurants de Hamelin rejouent l’évènement pour les touristes du monde entier (« Rattenfänger-Freilichtspiel » à la Hochzeitshaus-Terrasse).
1908The Pied Piper of Hamelin (US)
Thomas A. Edison/Thomas Edison Company (West Orange, New Jersey), 220 m. – cf. infra, film de 1910. - DE: Der Rattenfänger von Hameln.
1910Der Rattenfänger von Hameln [Le Joueur de flûte de Hamelin] (DE)
Paul von Woringen/DMB Deutsche Mutoskop- und Biograph GmbH (Berlin), 2 actes. – En 1284, lorsque la petite ville de Hamelin est frappée par une invasion de rats qui s’en prennent aux provisions de nourriture, rongent les vêtements, tuent les chats et s’attaquent même aux enfants, les citoyens sont impuissants. Arrive un ménestrel qui, en jouant de sa flûte, attire à lui les rats. En échange de 100 thalers, il promet aux habitants d’éloigner les rongeurs de la ville quand la lune sera pleine. Lorsqu’Ursula, la fille du maire, lui demande de lui jouer un air, elle se déhanche en dansant et le suit comme envoûtée. Le ménestrel est accusé de sorcellerie. La lune étant enfin pleine, il parcourt les rues avec sa flûte, suivi de milliers de rats qui se noient dans la rivière. Mais alors qu’il va chercher le salaire promis, il est condamné à mort – à moins qu’une jeune fille des lieux ne consente à l’épouser ; Ursula se détourne de lui. Seul et humilié, il quitte la ville en jouant de la flûte, suivi par tous les enfants du lieu qu’on ne reverra plus jamais... – La fable est tournée dans le Muto-Atelier à Lankwitz, au sud-ouest de la capitale allemande.
1911The Pied Piper of Hamelin (US) de Theodore Marston
Edwin Thanhouser/Thanhouser Films Corp. (New Rochelle. N.Y.). – av. Frank Crane, Marguerite Snow, James Cruze, William Garwood, Marie Eline, Mignon Anderson. - Un « photo-play » tiré du poème de 303 vers de Robert Browning (1842).
1913The Pied Piper of Hamelin (US) de George Lessey
Thomas A. Edison/Edison Manufacturing Company (Bronx Park, New York), 305 m. – av. Robert Brower (le bourgmestre), Herbert Prior (le joueur de flûte), Mary Fuller, Miriam Nesbitt, Richard Tucker. – Le poème de Robert Browning.
Paul Wegener, Lyda Salmonova et les silhouettes de Lotte Reiniger dans « Der Rattenfänger » (1918).
1918* Der Rattenfänger / Der Rattenfänger von Hameln (Le Joueur de flûte de Hamelin) (DE) de Paul Wegener
Paul Davidson/Projektions-AG Union (PAGU, Berlin)-UFA, 1749 m. - av. Paul Wegener (le joueur de flûte), Lyda Salmonova (Ursula, la fille du bourgmestre), Wilhelm Diegelmann (son père), Elsa Wagner (sa mère), Jakob Tiedtke (l’apothicaire), Armin Schweizer (le conseiller municipal), Märte Rassow (Märte), Clemens Kaufung (le valet), Hannes Sturm (le bourreau).
Dernier film de la trilogie fantastique du couple Wegener-Salmonova (assistés du grand Rochus Gliese, collaborateur de Murnau, pour les décors et de Lotte Reiniger pour les ravissants titres en silhouettes), après Rübezahls Hochzeit (cf. supra, 1916) et Hans Trutz im Schlaraffenland (1917). Paul Wegener, fasciné par le bizarre et l’inquiétant qui se terrent dans l’âme humaine (ses premiers films d’auteur sont les récits fantastiques de L’étudiant de Prague, 1913, et de Le Golem, 1915) s’impose ici à la fois comme réalisateur, scénariste et interprète principal, présentant quelques variantes dans la trame originale (cf. synopsis film de 1910). C’est Ursula, la grâcieuse fille du bourgmestre, qui introduit le musicien-magicien dans la petite ville saxonne où ce dernier fait d’abord danser la collectivité au son de son violon. L’apothicaire adipeux qui convoite Ursula voit cette dernière charmée par la musique, exige que l’étranger joue de sa flûte et découvre inquiet l’emprise ensorcelante de cet instrument. En attendant d’être débarrassés des rats lors de la prochaine pleine lune, les bourgeois de Hamelin placent le flûtiste sans le sou dans un hospice où croupissent les miséreux de la terre (aux traits dignes, avec leurs barbes et attitudes quasi vétérotestamentaires). Puis, pour ne pas avoir à le payer, les autorités l’accusent d’être un dangereux sorcier, l’enchaînent et le condamnent à mort. Aiguillonnée par le pharmacien, la population le maudit. Au moment d’être pendu, on lui accorde un dernier vœu et le malheureux obtient la permission de jouer une ultime fois de son instrument. L’air de la flûte ravit Ursula au point qu’elle demande à épouser l’étrange musicien – supplique que la loi ne peut refuser et qui fait enrager son père comme l’apothicaire jaloux. Le flûtiste a donc la vie sauve, mais ne pouvant rester, il fait une dernière tournée à travers la ville, flûte à la bouche, avec les conséquences que l’on sait. Seul un enfant trop lent verra la montagne magique se refermer sous son nez et rapportera aux parents la tragique nouvelle.
Wegener tourne en extérieurs autour de Bautzen et Hildesheim (Saxe), puis en studio aux Ufa-Union-Atelier de Berlin-Tempelhof où, après bien des essais, il utilise des rats en bois filmés en stop-motion (ces rongeurs-là sont plus disciplinés !). Projeté en décembre 1918, le résultat s’avère un poème visuel plein d’invention, un livre d’images lyriques qui annonce l’expressionnisme et ravit autant les enfants que les adultes plus exigeants, critiques compris. Si Wegener ne cache pas l’effet « démoniaque » du flûtiste issu des montagnes dont les mélodies enlèvent toute volonté aux auditeurs qui entrent en transe, effets dus aux fantasmagories néoromantiques, au nouvel esprit alternatif et au décorum Jugendstil, sa mise en scène reflète aussi, par ses farandoles populaires auxquelles s’adonnent les adolescents. Ces grands courants naturistes à la mode sont des mouvements fortement antibourgeois qui marquent la nouvelle génération allemande depuis le fin du XIXe siècle (par ex. la « Deutsche Jugendbewegung » et les « Wandervogel », des activités de plein air proches du scoutisme, initiés dès 1896). « Image inoubliable que celle où Wegener montre sur une colline couverte d’herbe et de fleurs, dans la dentelle argentée que tisse le soleil, une petite fille qui danse », décrit Lotte H. Eisner. « Sa robe aux ornements ton sur ton s’harmonise avec les couleurs de la prairie. Elle danse aux sons de la flûte enchantée de Hamelin. La jeune Lyda Salmonova, ensorcelée par cette musique ne ressemble-t-elle pas, ainsi vêtue, aux Ophélie et aux Juliette du Deutsches Theater ? La ligne de ce corps svelte au maintien « gothique » rappelle les attitudes des vierges frêles et flexibles des primitifs allemands qu’évoquent les actrices dirigées par Max Reinhardt » (L’Écran démoniaque, Paris, 1965, p. 42). Rien d’étonnant : Wegener débuta en effet comme acteur et metteur en scène chez Reinhardt. Hélas, seuls deux fragments du film subsistent. Deux ans plus tard, Wegener présentera son chef-d’œuvre, Der Golem, wie er in die Welt kam (1920), co-dirigé avec Carl Boese, la terrifiante légende juive dont Gustav Meyrink tira un livre à succès (cf. partie VI - Europe centrale/2.3. Bohême).
1926The Pied Piper of Hamelin (GB) de Frank A. Tilley
A. E. Bundy/British Projects (London), 600 m. - av. Judd Green (le maire), Edward Sorley (le joueur de flûte). – Le poème de Robert Browning adapté par Ralph C. Wells.
1957(tv+ciné) The Pied Piper of Hamelin (US) de Bretaigne Windust
DuMont Television Network (NBC 26.11.57), 89 min. – av. Van Johnson (le joueur de flûte/Truson), Lori Nelson (Mara), Claude Rains (le maire de Hamelin), Kay Starr (la mère de John), Stanley Adams et Doodles Weaver (les conseillers du maire), Rene Kroger (Paul), Jim Backus (l’émissaire du roi), Carl Benton Reid (le maire de Hamelout), Brian Corcoran (John), Oliver Blake (le chef des villageois), Amzie Strickland (la cheffe des villageoises).
Comme dans le poème de Robert Browning (1842)) et les autres versions filmées du conte, le joueur de flûte est odieusement trompé par les dirigeants de la ville de Hamelin. Truson, l’amoureux de Mara (la fille du bourgmestre) proteste en vain et finit emprisonné, car Mara doit épouser l’émissaire du roi. Alors que les dirigeants de la cité sont paralysés, le joueur de flûte emmène les enfants de Hamelin dans un royaume magique à l’intérieur d’une caverne. Des canons (sic) tentent vainement de créer une brèche dans la montagne. Furieuse, la population de Hamelin destitue le maire et nomme Truson à sa place. Le joueur de flûte réapparaît alors avec la marmaille, bohème et bourgeois se réconcilient. – Un film de télévision tourné en 35mm Technicolor mobilisant des vedettes de Hollywood (Claude Rains, Van Johnson) et une partition musicale faite d’extraits d’Edvard Grieg (Peer Gynt, e.a.) ; la majorité des dialogues sont en rimes, mais le scénario se distancie de Browning en introduisant un rassurant happy-end. Le responsable de cette curiosité pour enfants également exploitée en salle est le producteur franco-américain Bretaigne Windust, metteur en scène réputé à Broadway et réalisateur occasionnel (la série tv Alfred Hitchcock Presents, le film The Enforcer/La femme à abattre coréalisé par Raoul Walsh, avec Humphrey Bogart, 1959).
Le joueur de flûte hippie (le chanteur Donovan) dans une version rare signée Jacques Demy (1972).
1971/72** The Pied Piper (Le Joueur de flûte) (GB/US) de Jacques Demy
David Puttnam, Sanford Lieberson/Goodtimes Enterprises Film (London)-Sagittarius Productions Inc. (New York)-[Paramount], 86 min. - av. Donovan (le joueur de flûte), Jack Wild (Gavin), Donald Pleasence (le baron), John Hurt (Franz, son fils), Michael Hordern (l’alchimiste juif Melius), Roy Kinnear (le bourgmestre Poppendick), Cathryn Harrison (Lisa, sa fille), Peter Vaughan (l’évêque), Diana Dors (Frau Poppendick), Keith Buckley (le chef gitan Mattio, un baladin), Patsy Puttnam (sa femme Helga), Peter Eyre (le pélerin), John Welsh (le chancelier), Hamilton Dyce (le nonce papal), Arthur Newlett (Otto), Sammie Winmil (Gretel), André van Gyseghem (le moine), Roger Hammond (Burger), John Falconer (le prêtre), David Netheim (Kulik), Gertan Klauber (le crieur public).
The Pied Piper est le moins connu des films de Jacques Demy, un conte désespéré et sombre, où la légèreté de la forme cache une profonde tristesse. – Synopsis : En été 1349, une troupe de baladins se dirigeant vers Hanovre est rejointe par un jeune joueur de flûte qui leur conseille de bifurquer vers Hamelin, seule cité encore épargnée par l’épidémie de peste noire qui décime alors la moitié de l’Europe. Mais les portes de la ville sont fermées aux étrangers. Tout le monde y est occupé aux préparatifs des noces du fils du baron, le cynique et cruel Franz, et de Lisa, la fillette adolescente du riche bourgmestre. Lisa, qui ignore son fiancé mais a de la tendresse pour le peintre boiteux Gavin, est mal en point, les curés la disent même mourante, mais lorsque le joueur de flûte la réveille par sa musique, ses compagnons sont mobilisés pour les festivités à venir. Quand l’alchimiste-apothicaire juif Melius et Gavin, son jeune apprenti, voient les premiers rats noirs propager la peste, ils en alertent le baron. Plutôt que de s’employer à trouver un antidote à la peste, le baron, cherchant à éviter l’enfer, gaspille sa fortune et ses ressources pour la construction d’une cathédrale qui lui attirera les faveurs du clergé tandis que son fils, lui, ordonne à l’alchimiste de lui fabriquer un substitut d’or afin d’enrôler une armée destinée à la « guerre sainte » qu’exige le pape. Quant au bourgmestre, il vend en mariage sa fille de onze ans pour grimper dans l’échelle sociale. Les rats infestent massivement la cité pendant la cérémonie de mariage. Après que le joueur de flûte ait entraîné les repoussants mammifères dans la rivière, le bourgmestre refuse de lui verser les mille florins qu’il lui a promis. Impitoyable, Franz envoie le vieux juif « hérétique » sur le bûcher – avec l’appui de l’Église, l’évêque en tête - pour lui avoir désobéi et, en homme de science, avoir refusé de considérer l’épidémie menaçante comme un châtiment divin. Le musicien joue alors de la flûte et enlève tous les enfants, Lisa comprise. De leur côté, les innocents et les purs que sont les baladins gitans gagnent le large sains et saufs ; Gavin part pour les Pays-Bas, la patrie des peintres, tandis que Franz, la soldatesque et les habitants de la ville maudite sont happés par la Mort Noire.
De toute évidence la plus intéressante des versions du « Joueur de flûte » depuis le film muet de Wegener en 1918 est réalisée par Jacques Demy, bien connu pour ses comédies musicales françaises un peu « féériques » (Les Parapluies de Cherbourg en 1964, Les Demoiselles de Rochefort en 1967) et qui vient d’illustrer avec délicatesse et poésie le conte de Peau d’âne de Charles Perrault l’année précédente (un échec public). Pourtant, la démarche est cette fois radicalement différente, car Demy, qui travaille à présent pour des producteurs anglais, souhaite ancrer son récit dans un contexte historico-géographique précis et y faire cohabiter le réalisme et la magie, tâche complexe où, dit-il, l’équilibre « entre l’enfance et les réalités politiques adultes » est difficile à trouver. L’équipe de production n’est pas anodine : le populaire chanteur écossais Donovan, spécialiste de folk, jazz, pop et psychedelic rock, est imposé dans le rôle-titre et gère la musique du film ; à ses côtés, des vedettes comme John Hurt (Elephant Man) et Donald Pleasence (Blofield, l’ennemi de 007). Le frère de Jane Birkin, Andrew, est co-scénariste : il fut l’assistant de Kubrick sur 2001, co-signera par la suite le script du Nom de la Rose d’Annaud d’après Umberto Eco et réalisera Le Secret Brûlant d’après Stefan Zweig, avec Klaus Maria Brandauer et Faye Dunaway. Quant à la caméra extrêmement fluide et ses couleurs terreuses, elle est en mains de Peter Suchitzky, l’opérateur de David Cronenberg, grand créateur de cauchemars. Le tournage en Eastmancolor et Panavision se fait de mai à juillet 1971 en extérieurs dans la cité médiévale de Rothenburg ob der Tauber (Bavière) où l’on édifie notamment le fabuleux chantier d’une cathédrale gothique en construction (avec échafaudages complexes, tailleurs de pierres, roue d’écureuil et cabestans), puis dans les studios Lee International à Kensington (Londres).
Résultat : à la colère des producteurs qui souhaitaient reproduire la féerie d’un autre Peau d’âne (David Puttnam s’est disputé avec Demy qui avait obtenu le droit de contrôle total sur sa création), le film s’avère trop sombre pour un public d’enfants, certaines scènes font peur, comme le somptueux gâteau de noce en forme de cathédrale, pâtisserie infestée par les rats et qui sème la panique, ou l’exécution de Melius dans les flammes, la puissance et l’imbécillité mortifères du haut clergé, habillé de rouge sang, confrontée à la « punition céleste » qui s’abat sur la collectivité gangrénée de cette Sodome médiévale qu’il convient de fuir comme le firent Lot et sa famille, etc. En fait, le cinéaste s’intéresse très peu aux personnages du conte dont il ne garde que les grandes lignes, et le joueur de flûte est nettement mis en retrait. La peste est ici la métaphore apocalyptique des maux d’une société dont le sacre de l’argent est la valeur dominante. Demy dessine un monde sans morale ni Dieu. Pourtant absente de la légende initiale, l’Église romaine s’y complaît dans sa toute-puissance mortifère, caricaturée à travers une suite d’images anticléricales d’une virulence rare. De son propre aveu. Le Septième sceau d’Ingmar Bergman fut la principale source d’inspiration du cinéaste. Quant au flûtiste « hippie » de Donovan, ce n'est pas un vengeur mais un divin sauveur emmenant la jeunesse – toute vêtue de blanc - loin de la corruption, de la bêtise et de la cupidité.
Ainsi, Demy compose-t-il un pamphlet de la contre-culture des années 1970, un « hymne aux artistes, aux baladins, les seuls, comme chez Renoir, à apporter de la cohésion au monde » (Pierre Murat, Le guide du cinéma chez soi, éd. Télérama, 2004) dans une société incapable d’accepter toute forme d’altérité. Le film sort aux USA (via Paramount) en mai 1972, en Grande-Bretagne seulement en décembre 1972 (Puttnam tente de le bloquer) et ne trouvera de distributeurs en France qu’en décembre 1975, après une projection au Festival international de Paris un mois plus tôt. Le public comme les chaînes tv et éditeurs vidéo le boudent – à tort, car (ou parce que) cette production dérangeante, tombée dans les oubliettes, est bien trop dans l’air du temps… - DE : Der Rattenfänger von Hameln, IT: Il pifferaio di Hamelin, ES : El flautista.
Les corbeaux rouges d’une Église fanatisée au centre du Hamelin de J. Demy.
1985(tv) The Pied Piper of Hamelin (US) de Nicholas Meyer
Série « Shelley Duvall’s Faerie Tale Theatre », Shelley Duvall, Fredric S. Fuchs, Bridget Terry, Andi Copley/Gaylord Television Entertainment-Lions Gate Films-Platypus Productions-RazzMaTazz Entertainment (Showtime 5.4.85), 47 min. – av. Eric Idle (le joueur de flûte), Keram Malicki-Sánchez (little Willie), Tony Van Bridge (Edward Fisher), Peter Boretski (Bernard le nécroman), Peter Blais (le rat Jules César), James Edmond, Tom Harvey, Kenneth Wickes, Chris Wiggins, George Buza, Michael Fletcher, Graham Harley, Kay Hawtrey, Charles Hayter, Susannah Hoffmann, Christopher Kelk, Araby Lockhart, Don McManus, Shelley Duvall (présentation).
Synopsis cf. film de 1910. - Toute l’histoire, qui s’adresse clairement à un public d’enfants, est contée en rimes (en hommage au poème de Robert Browning dont elle s’inspire exclusivement), et le village s’anime comme dans un tableau de Jan Brueghel. Le rôle du joueur de flûte était initialement prévu pour David Bowie, mais c’est Eric Idle, un des incorrigibles farceurs des Monty Python, qui le remplace. Morale du conte tourné aux Glen-Warren Studios à Toronto (Canada) et qui s’adresse à un public juvénile : il faut toujours tenir ses promesses… C’est Shelley Duvall, star de nombreux films de Robert Altman, qui a crée la série tv des « Faerie Tale Theatre » qui connaît une distribution mondiale et dont les épisodes sont dirigés par des réalisateurs de renom comme Francis Ford Coppola ou Tim Burton. L’épisode de Hamelin est réalisé par Nicholas Meyer, cinéaste-scénariste révélé par l’excellent Time After Time (C’était demain) en 1979 dans lequel le romancier H. G. Wells traquait Jack the Ripper !