I - LA FRANCE
1. LOUIS XIII et Richelieu (1610 à 1643)
1.6. "Le capitaine Fracasse" de Théophile Gautier
Roman paru en 1863. - La Gascogne en 1630 : le baron de Sigognac, un jeune châtelain ruiné, rejoint une troupe de théâtre ambulante et s’improvise comédien par amour pour Isabelle, une actrice qu’il protège contre les assauts galants du duc de Vallombreuse. Celui-ci est, ce que tout le monde ignore, le propre frère d’Isabelle, et Sigognac l’épousera.
1909 | Capitan Fracassa (IT) d’Ernesto Maria Pasquali Pasquali e Tempo, Torino, 300 m. – av. Alberto A. Capozzi ( ?) (Jean-Luc Henri Camille, baron de Sigognac / capitaine Fracasse), Mary Cléo Tarlarini ( ?). |
1909 | Le Capitaine Fracasse (FR) de Victorin Jasset Société Française des Films Eclair, 220 m. – av. Jean-Marié de l’Isle (Jean-Luc Henri Camille, baron de Sigognac). – Tourné à Epinay-sur-Seine. |
1915 | Captain Fracasse (US) American Biograph Co., 2 bob./20 min. – av. Alan Hale (Sigognac/Fracasse), Vola Smith [=Vola Vale] (Isabelle), Charles Hill Mailes (duc de Vallombreuse), Kate Bruce (Dame Léonarde), Herbert Barrington (Vallombreuse père), G. Raymond Nye (Agostino), Jack Drumier. |
1918 | Capitan Fracassa (IT) de Mario Caserini Palatino Film, 2582 m. – av. Franco Zeni (Sigognac/Fracasse), Thea [=Teresa Termini] (Isabelle), Ferruccio Biancini (duc de Vallombreuse), Nini Dinelli (Chiquita), Roberto Spiombi (Leandro), Gemma De Ferrari (Agostina), Ernesto Treves (le vieux duc de Vallombreuse), Mimi, Amedeo Ciaffi. |
1928/29 | **Le Capitaine Fracasse (FR) d’Alberto Cavalcanti (et Henry Wulschleger) Lutèce Films (Charles Schneider)-P.J. de Venloo, 2900 m./92 min. – av. Pierre Blanchar (de Sigognac), Lien Deyers (Isabelle), Charles Boyer (duc de Vallombreuse), Marguerite Moreno (Dame Léonarde), Daniel Mendaille (Agostin), Marie-Thérèse Vincent (Séraphine), Pola Illéry (Chiquita), Odette Josylla (Zerbine), Bergeron (Scapin). Une adaptation de prestige signée Cavalcanti, ex-assistant et décorateur de L’Herbier et Delluc, proche de Jean Renoir. L’influence des surréalistes et de l’avant-garde française (« La Chute de la maison Usher » d’Epstein) y est particulièrement sensible au début du film, riche en fondus enchaînés, habiles mouvements de caméra, angles et éclairages insolites. L’entreprise est d’abord commerciale, donc inusitée pour ce cinéaste d’origine italo-brésilienne, intellectuel, à la carrière cosmopolite, mais ses compositions d’une plasticité surprenante et la fluidité du récit enchantent les spectateurs en France, lui garantissant, pour une fois, une certaine aisance matérielle. Blanchar est fort séduisant en Fracasse, maniant la rapière avec agilité ; son adversaire est joué par Charles Boyer, dont c’est le premier rôle important. Le scénario altère la fin du récit : Vallombreuse n’est pas ici le frère d’Isabelle ; excédé par son comportement criminel, Louis XIII lui donne à choisir entre la prison et l’exil perpétuel. Quant à son employé, le brigand Agostin, qui blesse grièvement Fracasse, il est condamné au supplice de la roue en place de Grève (la caméra se met à sa place), comme l’écrit aussi Gautier ; à l’instant où le bourreau va le broyer de sa lourde barre de fer, Chiquita, la compagne du malheureux, escalade l’échafaud comme un chat et lui plonge sa navaja dans le cœur. Tournage à Sarlat (Dordogne), aux châteaux de Saint-Fargeau (Yonne), Sully-sur-Loire (Loiret), La Boétie (Dordogne), Collonges (id.), Saint-Fargeau (Yonne), dans le Périgord, puis aux studios Francoeur à Paris, avec de fort beaux décors d’Erik Aaes, sans doute supervisés par Cavalcanti. |
1940 | Capitan Fracassa (Capitaine Tempête) (IT) de Duilio Coletti Vittorio Vassarotti-Vi.Va.Film, 90 min. – av. Giorgio Costantini (de Sigognac/Fracasse), Elsa De Giorgi (Isabelle), Osvaldo Valenti (duc Roger de Vallombreuse), Nerio Bernardi (le prince), Clara Calamai (Yolande de Foix), Olga Vittoria Gentilli (Dame Léonarde), RenatoChiantoni (Scapin), Ernesto Gentili (Leandro), Pia DeDoses (Zerbine), Mario Siletti (Giacomo Lampourde), Fiorella Betti (Chiquita), Guido Morisi (Vidalino), Egisto Olivieri (Hérode), Dina Perbellini (marquise de Bruyères), Ernesto Bianchi (Matamore), Umberto Casilini (Pierre, le vieux Vidomestique), Franco Coop. – Une adaptation très décevante et superficielle, tournée à Cinecittà d’après un scénario d’Arrigo Benedetti. |
1942/43 | *Le Capitaine Fracasse / La maschera sul cuore (FR/IT) d’Abel Gance Lux Film France-Zénith Film, 108 min. – av. Fernand Gravey (baron de Sigognac-Fracasse/Fracasse), Assia Noris (Isabelle de Lineuil), Jean Weber (duc de Vallombreuse), Vina Bovy (Séraphine), Alice Tissot (Dame Léonarde), Mary Lou (Yolande de Foix), Lucien Nat (Agostin), Maurice Escande (marquis des Bruyères), Mona Goya (la marquise des Bruxères), Roger Blin (Fagotin), Roland Toutain (Scapin), Josette France (Zerbine), Pierre Labry (Hérode), Paul Oettly (Matamore), Jacques François (Vidalenc), Philippe Rolla (Malastic), Nino Costantini (Léandre), Jean Fleur (Blazius). En Gascogne, au château délabré de la Misère, le jeune baron de Sigognac est complètement ruiné. Une troupe de comédiens ambulants s’étant arrêtée dans la cour du manoir, Sigognac leur offre l’hospitalité, remarque la belle ingénue Isabelle et, à l’occasion du décès d’un vieil acteur, décide de le remplacer et suivre le chariot de Thespis dans ses pérégrinations sous le nom d’artiste de Capitaine Fracasse. Il soulève l’enthousiasme des populations et dispute Isabelle au duc de Vallombreuse. Les rivaux se mesurent en duel dans un cimetière à Poitiers, mais Vallombreuse enlève Isabelle pour l’enfermer dans son château. Sigognac-Fracasse accourt, l’épée en main, mais un coup de théâtre bouleverse la situation : Isabelle est une riche héritière et la propre sœur de Vallombreuse. Redevenu Sigognac, l’ex-capitaine Fracasse peut l’épouser. Fin 1941, grâce à certains appuis, Gance vient d’être rayé de la liste des juifs recherchés par la Gestapo (« aryanisé »), et il cherche la protection de Pétain pour échapper aux soupçons. Ne pouvant quitter la France (une mission à Rio de Janeiro est annulée par les Allemands), le cinéaste accepte cette tâche alimentaire en Zone occupée, un vieux projet annoncé en 1933 déjà, presque entièrement tourné aux studios Saint-Maurice avec d’importants décors d’Henri Mahé. Le scénario est de Gance, la musique d’Arthur Honegger. Initialement, Maurice Chevalier, puis Claude Dauphin sont prévus pour le rôle-titre. Le casting est français (avec Jean Weber de la Comédie-Française), mais la star féminine, Assia Noris, vient d’Italie. Le tournage, rocambolesque, dure sept mois, ponctué d’un conflit avec Gravey, de la maladie d’Assia Noris (Gance est forcé d’utiliser des doublures), de devis dépassés. La société Zénith-Film reprend le film et décide de l’exploiter en deux épisodes pour compenser les pertes. Gance poursuit pendant le tournage des essais de Pictographe (procédé breveté en 1938) pour remplacer des décors réels, difficiles à édifier en temps de guerre, par des maquettes réduites. Le procédé permet d’obtenir par système optique approprié une netteté parfaite entre les images d’objets situés à des distances différentes. A sa sortie, le film est réduit de moitié afin de pouvoir être projeté en une séance ! Gance introduit en vain une action en justice pour obtenir que son nom soit retiré du générique du film mutilé. Fougueux et romantique, son travail est bien accueilli par un public jeune, avide de dépaysement en pleine Occupation (14 semaines d’exclusivité à Paris, au cinéma Madeleine, sept. 1943), mais les critiques sont négatives : elles démontrent surtout l’incompréhension générale pour ses recherches sur le rapport théâtre-cinéma (le duel dans un cimetière entre Sigognac et Vallombreuse qui échangent des répliques en alexandrins, utilisation d’une actrice de l’Opéra). Gance montre bien le mépris du XVII e siècle pour les comédiens, voués aux enfers. Peu après la sortie du film, le cinéaste parvient à échapper à une invitation à s’installer dans les studios de Berlin-Babelsberg en s’exilant en Espagne jusqu’à la fin de la guerre. |
1958 | (tv) Capitan Fracassa (IT) d’Anton Giulio Majano (RAI 11.1.-8.2.58), 5 épis. – av. Arnoldo Foà (Fracasse), Lea Massari (Isabelle), Margherite Bagni, Florella Mari (Yolande de Foix), Leonardo Cortese (marquis de Bruyères), Nando Gazzolo (duc de Vallombreuse), Scilla Gabel (Zerbina), Ivo Garrani (Erode), Alberto Lupo (Lampourde), Ubaldo Lay, Giulia Lazzarini, Warner Bentivegna. |
1961 | Le Capitaine Fracasse / El capitán Fracassa / Capitan Fracassa (FR/ES/IT) de Pierre Gaspard-Huit Adolphe Osso/Documento Films-Films Meltzger et Woog-Hoche Productions-Piazza-Unidex-Paris Elysées Films, 108 min. – av. Jean Marais (baron Philippe de Sigognac), Geneviève Grad (Isabelle), Gérard Barray (duc de Vallombreuse), Anna-Maria Ferrero (marquise des Bruyères), René Charvey (Louis XIII), Louis de Funès (Scapin), Philippe Noiret (Hérode), Riccardo Garrone (Lampourde), Danielle Godet (Serafina), Sophie Grimaldi (Zerbine), Sacha Pitoëff (Matamore), Jean Rochefort (Malartic), Bernard Dhéran (Chevalier de Vidalenc), Alain Saury (Agostin), Maurice Teynac (marquis des Bruyères), Guy Delorme (homme du prince de Moussy), Jacques Toja (Léandre), Raoul Billerey (Mérindol), Robert Pizani (Blaius), Jean Yonnel (prince de Moussy), Joëlle LaTour (Chiquita), Renée Passeur (Dame Léonarde), Bernard La Jarrige (Pierre). Première version en couleurs (Eastmancolor) et Dyaliscope, adaptée par Gaspard-Huit, et qui s’inscrit dans la vogue de films de cape et épée franco-italienne inaugurée par André Hunebelle, avec un surplus d’escrime (six à sept duels) ; Jean Marais, 48 ans, accomplit toutes les cascades. La présence comique de Louis de Funès rappelle le tandem à succès Marais-Bourvil dans le « Le Bossu ». Tournage aux studios d’Epinay et dans la région parisienne, dans la forêt de Rambouillet, à Croix Pater (forêt de la Charmoie), aux châteaux de Gisors (Eure), à Fontenay Trésigny, Maintenon (fin du film, Eure- et Loir), Pierrefonds (chez le roi) et à Senlis (Oise). La fin est plus fidèle à Théophile Gautier que celle de Gance : ici, comme dans le roman, Vallombreuse est sérieusement blessé par Signognac, et c’est son vieux père qui découvre en Isabelle sa propre fille. Une lecture dynamique mais foncièrement superficielle et dénuée de poésie : des coups d’épée dans l’eau. |
1961 | (tv) Le Capitaine Fracasse (FR) de François Chatel « Le théâtre de la jeunesse », ORTF (1e Ch. 23.+30.3.61), 90 min. – av. Bernard Woringer (Philippe de Sigognac/Fracasse), Marcel Bozzuffi (Lampourde), Jacqueline Monsigny (Isabelle), Henry Gicquel (Pierre), Jean-Paul Moulinot (Blazius), Jacques François (Bruyères), Jean Galland (Bellombre), Julien Guiomar (Hérode), Mag-Avril (la duègne), Robert Murzeau (Matamore), Bernard Cara (Scapin), Maïté Andres (Chiquita). |
1968 | (tv) Capitaine Fracasse (FR) de Philippe Joulia "Théâtre de la Jeunesse" (Claude Santelli), ORTF (1e Ch. 23.12.68), 6 x 25 min. – av. Simon Eine (Philippe de Sigognac/Fracasse), Annie Sinigalia (Isabelle), Pierre Tornade (Hérode), Henri Virlojeux (Blazius), René Roussel (duc de Vallombreuse), Maurice Sarfati (Scapin), Philippe Mareuil (Léandre), Elisabeth Margoni (Zerbine), Edith Loria (Sérafina), Germaine Ledoyen (Léonarde), Marc Miller (Lampourde), André Cagnard (Mérindol), Billy Callaway (Tortguele), Michel Bastet (la Rapée), Jack Blanchot (Malartic), Jean-Pierre Janic (Agostin), Jean-Claude De Goros (Vidaline), Christine Simon (Chiquita), Teddy Bilis (Pierre), Philippe Joulia, Claude Cobast, Irma Joulia, Catherina Catsaros. – Emission pour la jeunesse. |
Louis XIII (René Charvey) assiste à la représentation des camarades du capitaine Fracasse (1961).
1974 | (tv) Fracasse (FR) de Raoul Sangla, Marcel Maréchal (th) (FR3 12+19.1.74). – av. Jean-Claude Drouot (Philippe de Sigognac/Fracasse), Edith Garnier (Isabelle), Marcel Maréchal (professeur), Bernard Ballet (Scapin), Jeanne Berdin (la duègne), Jacques Angéniol (Matamore), Françoise Lervy (sœur Martine), Antoine Baud, Guy Delorme. – Gautier adapté pour la scène par Serge Ganzl (1972). Captation de la mise en scène de Marcel Maréchal au Théâtre de l’Odéon à Paris en 1973. |
1983 | (tv) Kapitana Frakass (SU) de Vladimir Saveljev Dovzhenko Film Studios-Televidenje Sovjetskovo Sojusa, 70 + 65 min. – av. Oleg Menchikov (Philippe de Sigognac), Anna Isaikina (Isabelle), Mikhail Danilov, Juri Jarvet, Svetlana Toma (Sérafine), Leonid Yarmolnik (Léandre), Pyotr Gorin, Ivars Kalnins, Yelena Kondulainen, Valentin Nikulin, Vsevolod Chilovsky, Thomas Urb. – Tournage en couleurs à Kiev (Ukraine). |
1990 | **Il viaggio di capitan Fracassa / Le Voyage du capitaine Fracasse (IT/FR) d’Ettore Scola Mario et Vittorio Cecchi Gori-Massfilm-Studio EL-Gaumont, 135 min. – av. Vincent Pérez (Jean-Luc Henri Camille, baron de Sigognac), Emmanuelle Béart (Isabelle Andrini), Massimo Troisi (Pulcinella [=Scapin]), Ornella Muti (Sérafine Poisson), Jean-François Perrier (Matamore), Tonni Ucci (Tyran), Tosca D’Aquino (Zerbine), Remo Girone (le duc François de Vallombreuse), Marco Messeri (marquis des Bruyèes), Claudio Amendola (Augustin, le bandit), Massimo Wertmuller (Léandre), Lauretta Masiero (Dame Léonarde), Ciccio Ingrassia (Pierre). Fantaisie rêveuse et un brin désenchantée, la vie des comédiens servant ici de prétexte pour explorer la condition humaine. La fin diffère fortement du roman : Sigognac se bat en duel et perd Isabelle qui doit suivre le duc. Blessé, il est sauvé par un bandit espagnol, se transforme en auteur dramatique, rejoint la troupe des comédiens et part pour Paris. Il a perdu un amour mais s’est laissé gagner par un autre : celui du théâtre. Massimo Troisi est remarquable en Pulcinella (qui raconte le récit). Une narration lente, mais de superbes décors, où l’artificialité onirique contraste avec un réalisme cru et amer (le film est entièrement tourné en intérieurs à Cinecittà, avec lune bleue et pluie de flocons aux allures de plumes). Scola est nominé à l’Ours d’or au festival de Berlin 1991, prix David di Donatello pour la photo et les décors. |
1999 | [(tv) Fracasse / Capitán Fracasse (FR/ES) de Philippe Vidal; D’Ocon Films-Ellipsanime-France 2, 26 épis./74 min. – Dessin animé, sur un scénario de Paul Nougha et Martin Brossolet.] |