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 l'antiquité au cinéma
prenant une esclave pour reine, les conspirateurs Arbacès et
Balesi provoquent un soulèvement. Sardanapale périt dans
l’incendie du palais avec ses femmes (campées par des dan-
seuses de la Scala de Milan). Tourné dans des studios de la
banlieue milanaise sur un scénario de l’homme de lettres
Enrico Annibale Butti, le film est primé au «Concorso ci-
nematografico di Milano » de 1910. GB :
Sardanapolus,
King of Assyria
.
1911
The Fall of Babylon
(GB) Theo Frenkel ; Natural Color
Kinematograph Co., 17 min. – av. Theo Frenkel (Bal-
thasar, roi de Babylone).
1911
La regina di Ninive (La reine de Ninive)
(IT) Luigi
Maggi ; Ambrosio Film SATorino, 320 m. – av. Gigetta
Morano (Tamaris, reine de Ninive), Mirra Principi, Al-
berto A. Capozzi (Assur), Luigi Maggi (le roi Sennache-
rib), Giuseppe Gray, Mario Voller. –
La reine Tamaris
fait assassiner son époux Sennacherib par son amant Ca-
nach, mais un prêtre cache le prince héritier Assur. Quinze
ans plus tard, Assur prend le pouvoir et tue sans le savoir
sa propre mère, qui a revêtu l’armure de Canach pour dé-
fendre le palais. US :
The Queen of Ninevah
.
1913
Daniel
(US) FredThomson ; Vitagraph Co. of America,
2 bob. – av. Charles Kent (Daniel), Courtney Foote,
L. Rogers Lytton.
1916
Intolerance. Love’s Struggle Throughout the Ages –
1. The Fall of Babylon (Intolérance – 1
e
partie: La
chute de Babylone)
(US) David Wark Griffith ; Wark
Producing Corporation, 210 min. / 14 bob. – av. Alfred
Paget (le prince Balthazar /Belshazzar), George Siegman
(Cyrus II le Grand, roi des Perses), ConstanceTalmadge
(Fille de la Montagne), Elmer Clifton (le rapsode), Seena
Owen (la princesse Altarea), Carl Stockdale (Nabonide,
roi de Babylone, 555 / 538), Tully Marshall (le grand-
prêtre), Elmo Lincoln (l’Homme Fort), George Fawcett
(le juge), Charles Van Cortlandt (Gobyras). –
Sans doute
le film le plus gigantesque de l’histoire du cinéma. Destinée
à stigmatiser l’intolérance, l’injustice et le fanatisme à tra-
vers les siècles, l’œuvre, d’une durée de plus de trois heures
(huit à l’origine), comporte quatre histoires contées quasi
simultanément, qui s’entremêlent de plus en plus étroite-
ment (en montage alterné), multipliant les télescopages et
les analogies symboliques jusqu’à l’apothéose fraternelle et
christique finale. Un récit se déroule en 1914, un autre
évoque les derniers jours du Christ (cf. 6b.5), un troisième
la nuit de la Saint-Barthélemy en 1572, et le quatrième
la chute de l’opulente Babylone en 539 av. JC. Le rapsode
et le grand-prêtre de Marduk pactisent avec Cyrus II et se
préparent à lui livrer la ville où règne le tolérant roi Na-
bonide, un souverain opposé à toute forme de persécution.
Cyrus marche sur la ville, mais un premier assaut est re-
poussé après de violents combats sur les remparts. Lorsque
la Fille de la Montagne, qu’aime secrètement Balthazar, le
fils du roi, découvre le complot fomenté par le rapsode fé-
lon et les envahisseurs, il est trop tard. La trahison des prê-
tres provoque la chute de Babylone qui tombe aux mains
des Assyriens ; Balthazar se tue avec son épouse favorite.
La Fille de la Montagne trouve la mort à son tour. Par-
tout, l’intolérance l’emporte sur l’amour, sauf dans l’épi-
sode contemporain où le gréviste condamné par erreur sera
sauvé in extremis de la pendaison.
Symphonie en quatre mouvements, film à message universel
non dénué de boursouflures et de naïvetés,
Intolerance
est
un essai d’une extrême audace, dérogeant au principe de la
continuité et de linéarité narrative, mais qui aboutit sty-
listiquement à une fascinante impasse. Tournée en réponse
au colossal
Cabiria
de Pastrone (1914 – cf. 6a.3.3), l’œu-
vre de Griffith est la première grande superproduction his-
torique du cinéma hollywoodien. Elle a nécessité 14 mois
de travail et un budget final de 424’000 $, à l’époque une
fortune que seul Griffith peut avancer grâce aux rentrées de
Birth of a Nation
(un long métrage coûte alors entre 16 et
30’000 $). Le portail d’Imgur-Bel et les murailles chaldéen-
nes de Babylone (érigés aux Fine Arts Studios à Silverlake,
aujourd’hui au croisement de Sunset Blvd. et Hollywood
Blvd.) font 45 mètres de hauteur, le décor s’étend sur 600
m. On y cumule les colonnes éléphantines de
Cabiria 
, les
taureaux ailés à tête humaine, l’effigie de Gilgamesh et la
statuaire de Persépolis. Archéologue improvisé, le cinéaste
soigne les détails du quotidien de Babylone, les coutumes,
les rites, les croyances, se référant souvent dans ses inter-
titres aux cylindres de Nabonide et de Cyrus. Pour filmer
la célèbre séquence du festin de Babylone avec 4000 figu-
rants, Griffith fait construire un chariot de travelling qui
atteint la hauteur des murailles. Une gigantesque tour à
roulettes sur rails permet de surplomber l’ensemble du dé-
cor, de descendre graduellement avec l’objectif vers les mar-
Gigetta Morano dans
La regina di Ninive
de Luigi Maggi (1911)
Altarea et le prince Balthazar (
Intolerance
de D.W. Griffith, 1916)
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