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 l’antiquité au cinéma
(Nestor), Maxwell Reed (Ajax), Patricia Marmont (An-
dromaque). –
Chargé de négocier la paix avec les Grecs,
le prince Pâris fait naufrage devant Sparte où il est soigné
par des pêcheurs et une beauté qu’il prend pour Aphrodite,
ignorant qu’il s’agit en réalité de la reine. Il est accueilli
avec hostilité par les Achéens qui cherchent à déclencher un
nouveau conflit. Hélène le met en garde contre Ménélas,
son goujat de mari, qui s’apprête à le faire assassiner pen-
dant la nuit. Pâris s’enfuit, mais, poursuivie par les soldats
du roi, Hélène est contrainte de se sauver sur le navire du
Troyen. Ainsi les Grecs ont-ils enfin trouvé un prétexte à
leur guerre d’expansion («mes amis les pirates », les félicite
Ulysse) ...
Une superproduction américaine réalisée entièrement àCine-
città pour utiliser les fonds gelés de la Warner en Italie (les
murailles de Troie sont érigées sur un terrain vague en-
tre Rome et Ostia Antica et le campement grec est installé
près de Lavinio Lido di Enea). L’un des deux tout premiers
films anglo-saxons qui abordent sérieusement l’antiquité
grecque (Robert Rossen réalise simultanément
Alexander
the Great
en Espagne). Le projet fut initialement confié à
Michael Curtiz pour être tourné en Californie avec le pro-
ducteur Samuel Bischoff (1951). Le film prend le contre-
pied du récit d’Homère : les Grecs y sont des brigands, les
Troyens n’aspirent qu’à la paix. Sparte est un nid de mili-
taristes fanatiques « qui se couperaient un bras pour prou-
ver qu’ils sont courageux ». Hélène est vertueuse, Achille un
vaniteux sadique manipulé par les frères Agamemnon et
Ménélas, tous deux amoraux et cyniques (à l’image qu’en
donne Euripide dans son
Iphigénie à Tauris
). Ulysse n’est
qu’un fourbe, une description proche de celle de Sopho-
cle dans
Philoctète
ou d’Euripide dans
Hécube
. «Toute
la Grèce unie dans une guerre pour l’honneur ! » s’exclame
un Spartiate lorsque les hostilités commencent. «Oui, c’est
dans ces termes qu’on en parlera à l’avenir », rétorque sar-
doniquement Ulysse. Le début est un emprunt direct à
l’
Odyssée
 : échoué sur une plage après une tempête, Pâris
y est accueilli par Hélène, comme Ulysse par Nausicaa.
Hélène est blonde, une Aphrodite aux cheveux d’or, ainsi
que l’atteste le
Cycle épique grec
. Sans s’en douter, elle est
la cause du drame qui va éclore, la torche qui incendie la
cité : sa seule existence signifie destruction, et son érotisation
L’arrivée des mille navires grecs, le débarquement et un premier
assaut de la cité orchestré par Raoul Walsh (
Helen of Troy
, 1956)
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