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 l'antiquité au cinéma
Gioriani (la reine Sieglinde, mère de Siegfried), Philippe
Hersent (Danwarth). –
Une amusante relecture méditer-
ranéenne des mythes nordiques, avec quelques variantes : le
roi Siegmund a été massacré avec les siens. Veuve et mou-
rante dans la forêt enneigée, Sieglinde confie son fils Sieg-
fried au forgeron Mime, frère du nain maléfique Alberich.
Devenu adulte, Siegfried tue le dragon – un monstre méca-
nique verdâtre assez pataud créé par Carlo Rambaldi (
E.T.
,
Alien
) à ses débuts, supervisé par Eugenio Bava, le papa
de Mario – et bat son rival Hagen au tournoi pour cour-
tiser Kriemhild. Après avoir assassiné le héros, Hagen doit
comparaître devant son cadavre qui se met à saigner. Tan-
dis que Brunhild se suicide, le félon s’empare de l’anneau
magique et pénètre dans la grotte du trésor des Nibelungs,
mais la montagne s’écroule et l’ensevelit. Une première moi-
tié «magique », préchrétienne, une seconde plus médiévale,
mobilisant les poncifs du film de chevalerie (joutes, ban-
quet, chasse à courre). De l’imagerie candide en Eastman-
color et Supercinescope, avec utilisation fréquente de motifs
wagnériens
(Götterdämmerung)
: le vétéran Gentilomo,
qui a étudié les beaux-arts en Allemagne dans les années
vingt, est un inconditionnel de Bayreuth. Certains plans
sont des copies carbone du premier volet du film de Lang
(les escaliers de la cathédrale de Worms, les amoureux sous
le pommier en fleur, la mort de Siegfried, etc.). Le réalisa-
teur imite à l’occasion le hiératisme, le monumentalisme et
les compositions géométriques de son modèle, mais ses ima-
ges sagement colorées et sans âme n’en paraissent que plus
théâtrales, parfois même délicieusement kitsch (le cortège
funèbre sous une lune rouge). Ses interprètes allemands et
italiens, tous insipides, ne le soutiennent guère. Siegfried,
second volet préfigure en quelque sorte l’hécatombe géné-
rale de 1945 : la volonté de vengeance, monstrueuse et sui-
cidaire, y appelle la mort sur tous les protagonistes, anéan-
tis dans un feu crépusculaire. En 1933, après le départ de
Lang, les nazis ignoreront cette fin dont le pessimisme pa-
raît peu propice à la propagande pour ne rééditer que la
première partie, rebaptisée
Siegfrieds Tod
, avec la musi-
que de Wagner (que le cinéaste détestait) et un commen-
taire dit par Theodor Loos. Déjà la première à Berlin en
1924 est accompagnée de flons-flons ultrapatriotiques et
même d’un discours de Gustav Stresemann, alors ministre
des Affaires étrangères. Un accueil public et critique excel-
lent en Allemagne, un succès d’estime à Londres et à Pa-
ris, un échec commercial aux Etats-Unis où les spectateurs
peinent à s’identifier avec des protagonistes aussi fortement
prisonniers des rouages de la fatalité (thème langien par
excellence). GB :
The Nibelungs
et
The She-Devil
, US :
Siegfried
et
Krimhild’s Revenge
.
1951
Sigfredo
(PH) Manuel Conde ; Lebran Studios, Ma-
nila. – av. Manuel Conde (Siegfried von Xanten), El-
vira Reyes (Brunhild, reine d’Islande), Erlinda Cortes
(Kriemhild von Burgund). –
Influencé par Fritz Lang,
le comédien-réalisateur Manuel Conde, surnommé le Ce-
cil B. DeMille philippin, réalise à Manille une variante
exotique en couleurs du combat de Siegfried contre le dra-
gon. L’année suivante, sa fresque
Genghis Khan
sera pro-
jetée au festival de Venise et applaudie par le critique
James Agee.
1957
Sigfrido – la leggenda dei Nibelunghi
(Le chevalier
blanc)
(IT) Giacomo Gentilomo, Piero Pierotti ; Anto-
nio Ferrigno-Aeffe Cinematografica-Lux Films, 93 min.
– av. Sebastian Fischer (Siegfried von Xanten), Katha-
rina Mayberg (Brunhild, reine d’Islande), Illaria Occhini
(Kriemhild), Rolf  Tasna (Hagen von Tronje), Gior-
gio Costantini (Gunther, roi des Burgondes), Franca
Mazzoni (la reine-mère Ute), Giulio Donnini (le nain
Alberich), Alberto Cinquini (Mime), Enrico Olivieri
(le roi Giselher), Germano Longo (le roi Gernot), Tina
Sebastian Fischer, le héros d'un démarcage maladroit du classique de
Fritz Lang (
Sigfrido - la leggenda dei Nibelunghi
, 1957)
Le cinéaste et acteur Manuel Conde terrasse le dragon dans une
version philippine de la légende,
Sigfredo
(1951)
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