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l'antiquité au cinéma
accepte de reprendre les rênes de cette production relative-
ment coûteuse en Technirama à condition de ne pas être
crédité au générique – sa participation à un genre décrié
par toute l’intelligentsia de la Péninsule pouvant nuire
à sa carrière. (Il fera jouer la fille du réalisateur défunt,
Lilla Brignone, dans
L’eclisse
en 1962.) Suivant le décou-
page de Brignone, Antonioni réalise tous les intérieurs avec
les comédiens aux studios romains IN.CI.R.-De Paolis et
au Filmiski Studio de Sarajevo ainsi que quelques exté-
rieurs en Croatie, tandis que Riccardo Freda orchestre scè-
nes d’action et de foules sur les terrains des studios Jadran
à Dubrava, près de Zagreb, à Mokrice-Brezice en Slové-
nie (bataille d’Emèse) et au Museo della Civiltà Romana
de l’E.U.R. à Rome. Les deux cinéastes ne se rencontre-
ront jamais. Steve Reeves, initialement prévu, est remplacé
par Georges Marchal, la danseuse cubaine Chelo Alonso
(des Folies-Bergères) fait ses débuts à l’écran, Sergio Leone
est assistant et coscénariste. Les thuriféraires d’Antonioni
n’ont jamais abordé cette parenthèse dans la filmographie
du Maître, horrifiés qu’ils sont à l’idée que le champion de
la modernité à l’écran se soit commis dans une pareille be-
sogne. Cependant le résultat se laisse voir : la direction des
acteurs est très nettement supérieure aux films du genre, les
scènes intimes possèdent un ton pour une fois convaincant
(les doutes de la reine quant à la sincérité de Valérius, les
scrupules et la mauvaise conscience de celui-ci, une réelle
sensualité dans les étreintes), tant il est vrai que ce film
parle surtout de l’« infâmie » et du « triomphe misérable »
d’un homme sur une femme. Pas de théâtralité, des éclai-
rages nuancés, une réelle mise en scène. Mais hélas, Anita
Ekberg en jupette n’est ni la Magnani ni Monica Vitti, et
il manque à Antonioni, égaré dans un univers aux anti-
podes de ses préoccupations, l’humour d’un Cottafavi pour
dépasser les clichés scénaristiques ou l’approche bon enfant
de l’histoire.
Quant à Freda (assisté discrètement par Mario Bava), il
livre, comme on pouvait s’y attendre, une bataille dynami-
que avec cavalerie, flèches enflammées, balistes et catapul-
tes. Aux Etats-Unis, le film est racheté par American Inter-
national Pictures qui le remonte en modifiant son contenu
(Marcus Valérius devient un ancien gladiateur chargé de
mater la rébellion d’une reine nommée Sheba avec ses an-
ciens compagnons de l’arène ...) et exploite cette mascarade
sous les titres de
Sheba and the Gladiator
ou
Sign of the
Gladiator
.
1961 Ø (tv)
Polyeucte
(FR) Alain Boudet. – av. Georges Des-
crières (Polyeucte)
. – Martyr chrétien supplicié sous Dèce,
cf. 6c.1.5.
Vaincue, Zénobie, la reine de Palmyre (Anita Ekberg), est exhibée en chaînes dans le rues de Rome (
Nel segno di Roma
, 1959)
Gino Cervi en empereur-soldat Aurélien (
Nel segno di Roma
, 1959)
Anita Ekberg et Georges Marchal dirigés par M. Antonioni, et ...